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MÉDINE

Arabie Saoudite : carte administrative - crédits : Encyclopædia Universalis France

Arabie Saoudite : carte administrative

La ville (madīna) du Prophète, située dans le Hedjaz en Arabie Saoudite. À l'époque pré-islamique, Médine, appelée alors Yatrib, différait beaucoup de La Mecque : cette dernière était en effet une cité commerçante, tandis que Yatrib était plutôt un groupe de hameaux situés dans une oasis fertile. Deux tribus, les ‘Aws et les Khazradj, venues d'Arabie du Sud, y exerçaient une certaine prépondérance sur trois tribus juives établies avant eux dans l'oasis : les Banū Naḍīr, les Banū Qaynuqā‘a et les Banū Qurayẓa. Toutefois, la concorde ne régnait pas entre les deux tribus arabes : ‘Aws et Khazradj avaient de fréquents litiges. La plupart ne concernaient qu'un ou deux clans de chaque bord. Mais la guerre dite de Hāthib entraîna presque la totalité des ‘Aws et des Khazradj (ainsi que le reste des tribus juives) et culmina dans la bataille de Bu‘āth quelques années avant l'Hégire — en 617 peut-être. Cela rétablit un équilibre instable dû surtout à l'épuisement des deux partis. Les tensions et la régression économique provoquées par ces guerres firent apparaître Muḥammad comme l'indispensable conciliateur : « Un prophète, avec une autorité ne reposant pas sur le sang mais sur la religion, était capable de se tenir au-dessus des groupes rivaux et de tenir le rôle d'arbitre » (W. M. Watt). Ces éléments politico-économiques expliquent que ‘Aws et Khazradj se soient entendus pour accueillir le Prophète et les premiers convertis dans leur ville : le Prophète quitte discrètement La Mecque en 622 (cette émigration, en arabe hiǧra — d'où le mot français hégire — a été prise comme point de départ du calendrier musulman). Après la victoire de Muḥammad sur les Mecquois et son entrée dans leur ville en 629, il revint résider à Médine, et c'est là qu'il mourut et fut enterré (632). C'est également dans cette ville que demeurèrent les trois premiers califes : Abū Bakr, ‘Umar, ‘Uṯmān. Pourtant, Médine n'allait pas rester longtemps la capitale politique du monde musulman : au cours des luttes qui suivirent le meurtre de ‘Uṯmān, le quatrième calife, ‘Alī se rendit compte qu'il lui était impossible de commander au monde musulman d'un endroit aussi excentrique et, malgré les supplications des Médinois, il partit s'établir à Kūfa. La victoire de Mu‘āwiya sur ‘Alī déplaça définitivement le centre de commandement vers le nord. Cette mise à l'écart du monde agité de la politique jointe au caractère sacré de la ville dû à la présence des tombes du Prophète et des premiers califes explique que Médine devint rapidement un point de refuge pour tous ceux qui avaient intérêt à se tenir éloignés de la capitale, et en particulier pour les descendants de ‘Alī ; refuge agréable, du reste, car les premières conquêtes de l'Islam avaient fait affluer les richesses du monde dans cette cité du désert. Éloignée du pouvoir, toute une aristocratie se divertit dans le luxe et le plaisir : la ville du Prophète devient un centre fréquenté par les chanteurs et les poètes ; des femmes du monde (la plus illustre d'entre elles étant Suqayna, petite-fille du Prophète) tiennent salon. À l'opposé, profitent également de ce calme les pieux savants qui recueillent les traditions, méditent le Coran et jettent les fondements d'une école juridique dont le plus illustre représentant sera, au iie siècle de l'hégire, Mālik b. ‘Anas. Si Médine participa en 682-683 à la révolte d'al-Zubayr et à diverses révoltes alides, il n'en reste pas moins qu'elle a vécu à l'écart du monde jusqu'au xviiie siècle. À cette époque, elle est, comme La Mecque, au centre des luttes entre les Wahhābites et les troupes de Muḥammad ‘Alī : en 1804, elle est prise et pillée par les Wahhābites[...]

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Écrit par

  • : docteur ès lettres, directeur de l'Institut français d'études arabes de Damas

Classification

Pour citer cet article

Georges BOHAS. MÉDINE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Arabie Saoudite : carte administrative - crédits : Encyclopædia Universalis France

Arabie Saoudite : carte administrative

Médine (Arabie Saoudite) - crédits : Neil Turner/ Getty Images

Médine (Arabie Saoudite)

Mosquée du Prophète, Médine - crédits : Abid Katib/ Getty Images News/ AFP

Mosquée du Prophète, Médine

Autres références

  • ABŪ BAKR (570 env.-634)

    • Écrit par Khalifa SOUA
    • 1 049 mots

    Premier calife musulman, ami, beau-père et successeur du Prophète Mahomet ‘Abd Allāh, Abū Bakr reçut le surnom de ‘Atīq (affranchi), puis celui d'al-Siddīq (le crédule), parce qu'il aurait été le premier à avoir cru immédiatement à l'histoire du voyage nocturne de Mahomet à ...

  • ARABIE

    • Écrit par Universalis, Robert MANTRAN, Maxime RODINSON
    • 7 614 mots
    Mahomet fut accueilli par les deux tribus païennes et les trois tribus juives de Médine, divisées par des querelles incessantes, comme un arbitre inspiré par le Ciel. Un pacte régla leurs rapports. Mahomet conduisit les émigrés mecquois venus avec lui et des volontaires médinois au pillage des caravanes...
  • ARABIE SAOUDITE

    • Écrit par Philippe DROZ-VINCENT, Universalis, Ghassan SALAMÉ
    • 25 169 mots
    • 10 médias
    ...un mouvement de prédication et à une réinterprétation rigoriste du texte islamique. Mais en annexant la province du Hijaz, où se trouvent La Mecque et Médine, les Saoud se sont dotés d'un rôle autrement prestigieux, celui de gardiens des Lieux saints, titre que le roi Fahd a décidé de voir utiliser de...
  • CALIFAT ou KHALIFAT

    • Écrit par Gaston WIET
    • 2 032 mots
    • 1 média
    ...pas prévu sa succession, et c'est pour assumer sa charge de chef d'État, pour prendre la direction des affaires publiques, que les premiers musulmans de Médine choisirent le beau-père du Prophète, Abu Bakr. Il aurait pris le titre de khalifa, « successeur » de l'Envoyé de Dieu. Les quatre premiers califes,...
  • Afficher les 15 références

Voir aussi