ALTO, instrument

Instrument à cordes de la famille des violons. L'alto est légèrement plus grand que le violon ; il mesure en moyenne 67 centimètres, dont 40 pour la caisse ; les éclisses ont 4 centimètres de hauteur vers le manche et 4,2 cm au bouton de cordier. L'alto est accordé une quinte au-dessous du violon, soit ut 2 et sol 2 (cordes filées), ré 3 et la 3 (cordes en boyau). L'écriture pour alto utilise la clé d'ut troisième ligne jusqu'au sol 4 environ. La dernière position est notée en clé de sol. La tension des cordes est de 30 à 32 kilos. L'archet est plus court et plus lourd que celui du violon : 72 centimètres, et il pèse de 63 à 65 grammes. Jusqu'à la fin du xvii^e siècle — après sa création au xvi^e siècle sous le nom de viola da braccio (viole à bras) — on utilisait concurremment deux formats de l'instrument : le ténor d'alto (tenore viola) et l'alto proprement dit (alto viola ; c'est ce dernier terme qui est resté en Allemagne et en Italie pour désigner l'instrument). Antonio Stradivari, vers 1690, donnait au premier une longueur de caisse de 47,9 cm et au second de 41,4 cm. Par la suite, on a renoncé au ténor plutôt encombrant pour le bras, mais on n'a jamais comblé la lacune que crée son absence entre l'alto et le violoncelle. À partir du milieu du xvii^e siècle, l'alto remplaça son homologue de la famille des gambes. C'est de lui que naquirent le violon et le violoncelle modernes. Le timbre de l'alto est légèrement plus sombre que celui du violon ; il possède un léger nasillement. Son médium est fort expressif. Berlioz a défini son mordant typique dans les cordes graves, ainsi que l'accent « tristement passionné » de l'aigu, et sa sonorité « d'une mélancolie profonde » ; qu'on écoute, par exemple, les Märchenbilder, op. 113, de Robert Schumann ; ces images de contes de fées passent du tragique enfiévré à la plus exquise tendresse, où l'alto chante admirablement. La technique de l'instrument est identique à celle du violon, mais les notes doubles sont plus difficiles en raison de la plus grande longueur du cordier. Quant à son répertoire, s'il est nettement plus modeste que celui du violon, il est loin d'être négligeable. Outre la littérature de musique de chambre, quelques concertos ont été composés pour lui et on lui confie plus d'un solo d'orchestre. Citons une double partie d'alto dans un quintette de Mozart, la Symphonie concertante pour violon et alto de Mozart (1780), Harold en Italie (symphonie avec alto solo) de Berlioz (1834). Gluck a « utilisé sa raucité tragique, dans les syncopes très simples, mais d'un effet puissant, qui accompagnent le récit d'Oreste, « Le calme reste dans mon cœur », au deuxième acte d'Iphigénie en Tauride ». Berlioz, encore, l'emploie superbement dans la ritournelle du roi de Thulé (Damnation de Faust). Parmi les nombreux compositeurs qui mériteraient d'être cités, retenons les noms de Spontini, Méhul, Stamitz, Haydn, Spohr, Schumann, Reger, Milhaud, Enesco, Hindemith, Kodály, Walton, Berio. Dans les diverses familles d'instruments à vent, tels que les saxophones, les saxhorns, les trombones, les flûtes, les clarinettes, etc., on ajoute le qualificatif « alto » pour désigner ceux dont l'étendue correspond à peu près à celle de l'alto des cordes. Parfois, ces altos possèdent un nom qui leur est propre ; ainsi le cor de basset (qui est une sorte de clarinette alto) ou le cor anglais (hautbois alto en fa).

— Pierre-Paul LACAS