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GUERRE FROIDE

L'expression « guerre froide » a été employée pour la première fois par le prince Juan Manuel d'Espagne, au xive siècle, pour désigner l'interminable conflit qui opposait alors les Rois Catholiques aux Maures d'Andalousie. Non certes qu'il ne fît pas couler le sang. Mais il présentait cette double originalité de n'avoir pas été précédé d'une déclaration de guerre et d'être voué à s'achever sans traité de paix.

L'usage contemporain, même si l'on a pu parler de « guerre froide » sino-soviétique, ou, à propos des événements de mai 1968, de « guerre civile froide », réserve en général, à la suite du financier américain Bernard Baruch et du grand journaliste Walter Lippmann, le nom de guerre froide à la longue épreuve de force qui s'est engagée entre les États-Unis et l'Union soviétique après la dissolution, au lendemain de la capitulation du Reich, de la coalition anti-hitlérienne.

Pour cette guerre froide-là, non plus, il n'y a pas eu de « déclaration », et elle s'est achevée, elle aussi, sans traité de paix. Mais ce qui a popularisé cette appellation, c'est que les belligérants, tout en employant toutes les ressources de l'intimidation, de la propagande, de la subversion, voire de la guerre locale, les États-Unis participant massivement quant à eux aux deux guerres de Corée et du Vietnam, ont réussi à éviter de se trouver directement aux prises.

Navire américain pendant la guerre de Corée - crédits : Central Press/ Archive Photos/ Getty Images

Navire américain pendant la guerre de Corée

Guérilla vietcong - crédits : Central Press/ Hulton Archive/ Getty Images

Guérilla vietcong

La présence des armes nucléaires y est évidemment pour beaucoup, qui a conduit plus d'une fois les superpuissances à reculer au seuil de l'apocalypse et à s'engager sur la route d'une détente marquée par d'importants accords, les uns de nature politique, les autres portant sur la limitation des armements. Mais la détente ne pouvait être qu'un ersatz de paix, dont de nouvelles tensions devaient prendre immanquablement le relais, et il aura fallu attendre l'effondrement des régimes communistes en Europe de l'Est pour qu'on puisse enfin, en 1990, considérer la guerre froide comme terminée.

Les bolcheviks, en 1917, croyaient que la révolution s'étendrait comme une traînée de poudre. Leur déconvenue, comme l'échec des tentatives des États capitalistes pour détruire dans l'œuf le régime soviétique, conduit à une première période de coexistence marquée par une coopération étroite entre les deux « réprouvés » du moment : l'URSS qui bâtit le « socialisme dans un seul pays » et l'Allemagne de Weimar.

L'avènement du nazisme renverse la situation. Staline, pour protéger son pays contre un homme qui ambitionne de le coloniser, s'allie à la France, jusqu'alors considérée comme le champion de l'impérialisme, et oblige les Partis communistes du monde entier à s'entendre avec les formations « bourgeoises » désireuses de faire échec au fascisme.

En 1938, nouveau renversement : écartée de l'accord de Munich, l'URSS interprète celui-ci comme dirigé contre elle et se retourne vers l'Allemagne. À la veille de la guerre, les deux pays se partagent l'Europe orientale. Pendant près de deux ans, le Kremlin pratique une politique de collaboration active avec le Reich.

L'agression nazie (1941), qui prend Staline par surprise, fait de lui l'allié de la Grande-Bretagne et des États-Unis. Des plans d'organisation du monde d'après guerre sont arrêtés de concert. Mais l'alliance, déjà agitée en temps de guerre, ne survit pas longtemps au péril qui l'a suscitée.

À la différence de Franklin D. Roosevelt, Harry Truman se méfie de Staline. La possession de l'arme nucléaire le convainc qu'il est possible de dresser un barrage contre ses ambitions. L'aide à la Grèce et à la Turquie, le plan Marshall, le pacte atlantique, le réarmement de l'Allemagne[...]

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Pour citer cet article

André FONTAINE. GUERRE FROIDE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Navire américain pendant la guerre de Corée - crédits : Central Press/ Archive Photos/ Getty Images

Navire américain pendant la guerre de Corée

Guérilla vietcong - crédits : Central Press/ Hulton Archive/ Getty Images

Guérilla vietcong

Intervention soviétique à Budapest - crédits : Hulton-Deutsch Collection/ Corbis/ Getty Images

Intervention soviétique à Budapest

Autres références

  • GUERRE FROIDE (notions de base)

    • Écrit par Universalis
    • 3 554 mots

    L’expression « guerre froide » désigne le conflit qui opposa les États-Unis et l’URSS durant la seconde moitié du xxe siècle. Trois traits fondamentaux la caractérisent : d’abord, la nature indirecte de l’affrontement, d’où l’adjectif « froide » qui qualifie cette « guerre » ; ensuite,...

  • MISE EN PLACE D'UN MONDE BIPOLAIRE - (repères chronologiques)

    • Écrit par Vincent GOURDON
    • 445 mots

    1945 Conférence de Yalta (4-11 février). Capitulation allemande à Berlin (8 mai). Signature de la capitulation sans condition du Japon (2 septembre).

    1946 Discours de Churchill à Fulton dénonçant le « rideau de fer » s'abattant sur le continent européen (5 mars).

    1947 Discours...

  • ACHESON DEAN (1893-1971)

    • Écrit par André KASPI
    • 324 mots
    • 1 média

    Diplomate américain de la vieille école dont l'élégance britannique faisait dire de lui qu'il était plus anglais que l'ambassadeur de Sa Majesté. Né dans le Connecticut, Dean Acheson était d'origine modeste : un père clergyman né en Angleterre et une mère canadienne. C'est à l'université Yale qu'il...

  • ACTION HUMANITAIRE INTERNATIONALE

    • Écrit par Universalis, Pierre GARRIGUE
    • 7 298 mots
    • 1 média
    Le second événement est la guerre froide. En contraignant chacun à choisir son camp, elle introduit la politique dans une action humanitaire dont les finalités – aider, soigner, sauver – se situent en dehors des enjeux du pouvoir. Nikita Khrouchtchev ne confiait-il pas à Dag Hammarskjöld,...
  • SUEZ AFFAIRE DE (1956)

    • Écrit par Vincent GOURDON
    • 281 mots
    • 1 média

    Le 22 décembre 1956, le rembarquement du corps expéditionnaire franco-britannique à Port-Saïd (Égypte) illustre les nouveaux rapports de forces internationaux de l'après-1945. En nationalisant le 26 juillet 1956 le canal de Suez, le leader égyptien Nasser entendait affirmer la...

  • ALLEMAGNE (Histoire) - Allemagne moderne et contemporaine

    • Écrit par Michel EUDE, Alfred GROSSER
    • 26 883 mots
    • 39 médias
    En France, en Italie,la naissance de la guerre froide a entraîné le départ des communistes du gouvernement et la scission politique à l'intérieur du pays. En Allemagne, elle a accéléré la division géographique du pays, à la fois cause et conséquence de la division du monde. Elle a également entraîné...
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Voir aussi