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CONCURRENCE, droit

Comprendre le phénomène de la concurrence suppose de s'intéresser à l'ensemble des règles qui ont pour objet d'assurer, sur le marché auquel elles s'appliquent, l'existence, la liberté et la loyauté de la concurrence. Mais une telle définition du droit de la concurrence, que sa généralité rendrait de toute manière peu significative, recèlerait une équivoque.

Largement entendu, le droit de la concurrence répond en effet – et cette constatation se vérifie dans plus d'un système législatif – à des préoccupations de deux ordres, qui ne sont certes pas sans lien entre elles, mais n'en demeurent pas moins distinctes, tant par les faits qui les inspirent que par le fondement, le caractère et les effets juridiques des règles qui les traduisent.

La plus grande partie de ces règles sont en effet destinées à faire obstacle aux ententes, abus de domination, concentrations qui tendent à la suppression ou à la restriction de la concurrence entre les entreprises venant en compétition sur le marché. Elles visent à assurer le fonctionnement du marché dans les conditions jugées nécessaires en économie capitaliste, et forment, peut-on dire, le droit de la concurrence dans ce qu'il a de plus spécifique (c'est le droit des pratiques anticoncurrentielles français, le Kartellrecht allemand, ou l'antitrust law américaine).

D'autres règles du droit de la concurrence, au sens large du mot, tendent à empêcher les agissements fautifs par lesquels une entreprise cherche à détourner la clientèle d'une autre en créant la confusion entre leurs produits respectifs, en profitant de ses investissements ou de sa notoriété, en dénigrant sa rivale ou en essayant de la désorganiser (par exemple, par un débauchage systématique de personnel qualifié). De tels agissements constituent la concurrence déloyale (en allemand : unlauterer Wettbewerb ; en anglais : unfair competition) à laquelle peuvent être rattachées les réglementations anti-dumping adoptées notamment aux États-Unis ou dans le cadre de l’Union européenne ; les actes de concurrence déloyale sont, par des techniques diverses, prohibés et sanctionnés indépendamment de toute incidence directe sur le fonctionnement du marché dans son ensemble. Aussi bien s'insèrent-ils, le plus souvent, dans les rapports entre deux entreprises isolément considérées.

On notera, cependant, qu'il existe une « zone frontière » entre ces deux domaines du droit de la concurrence. Certains comportements sont prohibés, bien qu'ils ne constituent pas une faute au sens de la concurrence déloyale et sans qu'il soit nécessaire d'établir qu'ils produisent un effet anticoncurrentiel sur le marché. Il s'agit, selon la terminologie française, des pratiques restrictives (pratiques discriminatoires, abus de dépendance, revente à perte, prix imposés) qui sont prohibées per se, c'est-à-dire en soi, parce qu'elles sont présumées porter atteinte à la capacité concurrentielle des concurrents ou des partenaires de l'entreprise qui les met en œuvre.

Entendu au sens strict, le droit de la concurrence est constitué de l'ensemble des règles tendant au maintien d'une concurrence suffisante sur le marché considéré dans son ensemble, à l'exclusion de celles de portée plus limitée concernant la concurrence déloyale ou les pratiques restrictives.

Le droit du marché

Logiquement, on peut penser que le contenu et l'application de règles de droit tendant au maintien de la concurrence dépendent de la conception que le législateur qui les édicte, le juge ou l'administrateur qui les applique se font des caractères économiques de la concurrence qu'ils estiment nécessaire de sauvegarder.

Au reste, cette conception tend actuellement, dans un certain nombre de pays industrialisés comme dans l’Union européenne (où la politique[...]

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Écrit par

  • : professeur émérite d'économie à l'université de Paris-IX-Dauphine
  • : professeur à l'université de Paris-II, président honoraire
  • : professeur à l'université de Paris-II-Panthéon-Assas, directeur de l'Institut de droit comparé de Paris

Classification

Pour citer cet article

Alain BIENAYMÉ, Berthold GOLDMAN et Louis VOGEL. CONCURRENCE, droit [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • AVOCAT

    • Écrit par Claude MICHEL
    • 7 342 mots
    Le droit de la concurrence est une des bases du traité de Rome. Il s'applique à toutes les activités, sans secteur protégé. L'activité des professions libérales est considérée comme une entreprise, quel qu'en soit le statut juridique. Le traité consacre encore la liberté d'établissement et le principe...
  • BOYCOTTAGE

    • Écrit par Universalis, Berthold GOLDMAN
    • 4 926 mots
    • 1 média
    ...travers le refus de vente, qui en est une manifestation courante, mais ne lui est pas entièrement coextensif (législation française). De manière générale, les dispositions qui prohibent les ententes anticoncurrentielles, les pratiques discriminatoires et les abus de puissance économique (ou de « position...
  • BREVET D'INVENTION

    • Écrit par Jacques AZÉMA, Bernard EDELMAN, Michel VIVANT
    • 10 776 mots

    Le brevet d'invention constitue un moyen juridique permettant de protéger les résultats de la recherche scientifique et technique. La protection des résultats de la recherche apparaît comme une condition à son existence. On ne saurait en effet imaginer une progression technologique sans un instrument...

  • CHRISTIE'S & SOTHEBY'S

    • Écrit par Alain QUEMIN
    • 2 851 mots
    ...services. Sommé par Bruxelles de se mettre, en matière de marché de l'art, en conformité avec le traité, le gouvernement français a dû revoir sa position. Les rapports successifs rendus aux pouvoirs publics par les commissions Chandernagor puis Aicardi n'ont pu ignorer l'ouverture du marché français à la...
  • Afficher les 13 références

Voir aussi