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CHIMIE Histoire

La détermination des masses atomiques

Jöns Jacob Berzelius - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Jöns Jacob Berzelius

Laborieuse tâche fondamentale qu'accomplirent les chimistes du xixe siècle, la détermination des masses atomiques fut d'abord l'œuvre de Berzelius dont la méticuleuse précision et l'opiniâtreté analytique ont été un modèle éclatant. Il fut l'initiateur du symbolisme des formules de constitution dont l'écriture ainsi abrégée est d'un si grand secours pour l'intellect des chimistes modernes. Il abandonne cependant la référence à l'hydrogène qu'avait choisie Dalton et lui substitue l'oxygène noté 100, parce que la multiplicité de ses combinaisons le recommande comme terme de comparaison et surtout parce que les combinaisons oxygénées lui semblaient conduire aux analyses les plus précises. Cependant, l'évaluation des masses atomiques rencontrait maintes difficultés : la théorie atomique n'était pas fermement établie et la distinction entre molécules et atomes ne devait s'imposer que tardivement ; on avait donc souvent peine à dénombrer les atomes présents dans une combinaison. Les chimistes durent alors combiner plus ou moins intuitivement et avec plus ou moins de bonheur les indices fournis par les considérations d'analogies structurales (familles naturelles de composés, théorie de l'isomorphisme de Mitscherlich) avec des grandeurs physiques. Parmi celles-ci, la mesure des densités gazeuses compte particulièrement ; son utilité apparaît clairement si l'on adopte l'hypothèse d'Avogadro : dans des conditions déterminées de température et de pression, le poids d'un volume donné de gaz ne dépend que de la masse des molécules ; car, si les molécules d'un gaz sont n fois plus lourdes que celles d'un autre, leur nombre étant supposé le même dans des volumes égaux, le même rapport doit apparaître dans la masse de ces volumes. Du coup, une caractéristique chimique, la masse moléculaire, est assignable grâce à une détermination purement physique. Malheureusement, Dumas qui proposa, un des premiers, une méthode sûre de la détermination des densités en fit un usage théorique confus qui nuisit à l'essor de la théorie atomique. Une autre relation physique applicable à la détermination des masses atomiques fut proposée dès 1819 par Dulong et Petit : tous les atomes ont même capacité calorifique, c'est-à-dire qu'ils requièrent la même quantité de chaleur pour parcourir le même échauffement, ou, en d'autres termes, la masse atomique d'un corps est inversement proportionnelle à sa chaleur spécifique. Rigoureusement parlant, le domaine de validité de cette loi est limité dans l'échelle des températures ; cependant, Dulong et Petit parvinrent à des déterminations exactes de masses atomiques, corrigeant ainsi des évaluations de Berzelius qu'ils ramenèrent à la moitié de la valeur assignée par le chimiste suédois. Par un usage judicieux des lois des combinaisons gazeuses, de la considération des isomorphismes et des analogies, des mesures de densité de vapeur et des chaleurs spécifiques, les chimistes purent progressivement s'accorder sur des masses atomiques que confirmèrent les mesures électrochimiques dont Faraday avait fait les premières en 1833. Mais ce n'est, en définitive, que vers les années 1860 que le système de la chimie minérale commence à présenter une cohérence de notation et de représentation qui puisse à bon droit apparaître fermement établie. Les éléments chimiques fonctionnent dans ce système comme des invariants fondamentaux engagés dans des combinatoires diverses selon des règles de composition homogène. Point n'est besoin alors de se décider sur la forme, la nature ou même l'existence des atomes ; la collection des corps de la chimie peut s'accroître par toute sorte de synthèses ; ils sont désormais qualifiables, analysables, définissables dans un système universel d'équivalents pondéraux immuables qui sont[...]

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Pour citer cet article

Élisabeth GORDON, Jacques GUILLERME et Raymond MAUREL. CHIMIE - Histoire [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Robert Boyle - crédits : Oxford Science Archive/ Print Collector/ Getty Images

Robert Boyle

Laboratoire de chimie au XVIII<sup>e</sup> siècle - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Laboratoire de chimie au XVIIIe siècle

John Dalton - crédits : Rischgitz/ Hulton Archive/ Getty Images

John Dalton

Autres références

  • ACIDES & BASES

    • Écrit par Yves GAUTIER, Pierre SOUCHAY
    • 12 364 mots
    • 7 médias

    Un acide est un corps capable de céder un ou des protons (une particule fondamentale chargée d'électricité positive) et une base est un corps capable de capter un ou des protons. Chacun a ses caractéristiques. Les acides ont une saveur aigre (l'adjectif latin acidus signifie « aigre...

  • AIR, élément

    • Écrit par Georges KAYAS
    • 719 mots
    • 1 média

    Anaximène (~ 556-~ 480), à la différence de Thalès, enseignait que toute substance provient de l'air (pneuma) par raréfaction et condensation ; dilaté à l'extrême, cet air devient feu ; comprimé, il se transforme en vent ; il produit des nuages, qui donnent de l'eau lorsqu'ils sont...

  • ANALYSE ET SYNTHÈSE, chimie

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    Ces deux notions, en principe complémentaires et réciproques, ne le sont pas en fait. Certes, les deux tendances à l'analyse et à la synthèse s'opposent, la première visant à couper les entités chimiques en petits morceaux et la seconde se donnant pour objectif la reconstruction des ensembles mis à...

  • ANALYTIQUE CHIMIE

    • Écrit par Alain BERTHOD, Jérôme RANDON
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    « C'est dans les cas situés au-delà de la règle que le talent de l'analyste se manifeste. L'important, le principal est de savoir ce qu'il faut observer. » Edgar Allan Poe (Histoires extraordinaires, 1844)

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