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WU CHANGSHI[WOU TCH'ANG-CHE](1844-1927)

À la fois peintre, calligraphe et graveur de sceaux, Wu Changshi [Wou Tch'ang-che] est une des figures dominantes de l'art chinois de la fin des Qing (1644-1911). Son œuvre révèle qu'en cette période de chaos politique, économique et social, marquée par la guerre de l'Opium (1839-1842), la révolte des Taiping (1851-1864), la première guerre sino-japonaise (1894) et le mouvement du 4 mai 1919, l'art chinois, longtemps considéré comme l'expression d'une société en décomposition, est au contraire riche d'audace et de rigueur. Tout en s'adaptant aux changements de son temps, et en s'impliquant dans les mouvements artistiques du sud de la Chine comme l'école de Shanghai, Wu Changshi a su puiser son inspiration dans le répertoire des modèles chinois les plus anciens et redonner souffle à la tradition lettrée. Il est vraiment le représentant de cette époque charnière qui voit la chute de la dernière dynastie impériale et l'entrée de la Chine dans le xxe siècle. Très tôt reconnu par les peintres de la génération suivante comme un maître incontesté de l'art chinois, notamment par Qi Baishi [Ts'i Pai-che], sa renommée gagne le Japon où est organisée, dès 1922, la première exposition de ses peintures et de ses calligraphies.

Un autodidacte érudit

Wu Jun, plus connu sous son nom de plume Wu Changshi, est né à Anji, petite bourgade du Zhejiang, dans une famille modeste de lettrés. Le cours ordinaire de sa vie, rythmé par l'enseignement des classiques et de la gravure de sceaux, est bouleversé en 1861 lorsque les armées Taiping pillent son village, dispersent ou tuent une partie de sa famille. Commence alors pour Wu Changshi et pour son père une longue période d'errance dans le nord de la Chine, nourrie de menus travaux saisonniers qui suffisent juste à leurs besoins. Cinq ans plus tard, Wu revient dans son village natal, passe avec succès l'examen provincial grâce auquel il occupe jusqu'à cinquante-trois ans un petit poste administratif dans le Jiangsu. Cette fonction correspond peu à ses aspirations ; il préfère se consacrer à la gravure de sceaux et à l'étude des inscriptions sur bronze et sur pierre. C'est en autodidacte que Wu mûrit ses talents. Il a déjà vingt-huit ans lorsque, pour compléter sa formation artistique, il se rend à Hangzhou, à Suzhou et à Shanghai, centres économiques où se côtoient artistes, mécènes et collectionneurs parmi les plus célèbres de l'époque. Avec la rigueur qui le caractérisera toute sa vie, Wu commence à pratiquer la calligraphie, dont il explore tous les styles auprès de Yu Yue puis de Yang Xian. Au contact des peintres de l'école de Shanghai, de Hu Yuan, de Pu Hua et, surtout, de Ren Yi [Jen Yi], Wu se met également à peindre. Enfin, il parfait sa connaissance de l'art et son érudition en étudiant les peintures, les calligraphies et les antiquités que collectionnent ses amis Pan Zuyin et Wu Dacheng. En 1894, il se rallie aux troupes gouvernementales contre l'invasion japonaise dans le nord de la Chine, mais, après une cuisante défaite, il tourne définitivement le dos à tout engagement public pour devenir peintre professionnel. Bien qu'entré assez tardivement dans la profession artistique, Wu est vite reconnu par ses pairs et admiré des jeunes artistes, tandis que le premier recueil de ses sceaux est publié en 1870. Sa popularité est telle qu'il est sollicité dans de nombreuses sociétés de charité et d'aide à la création qui se développent à la fin du xixe siècle. Durant les quinze dernières années de sa vie, qui sont aussi celles de l'apogée de son art, Wu continue de travailler avec le même acharnement, entre Suzhou et Shanghai, où il s'éteint à l'âge de quatre-vingt-trois ans.

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Bérénice ANGREMY. WU CHANGSHI [WOU TCH'ANG-CHE] (1844-1927) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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