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KUHN THOMAS (1922-1996)

Le « gestalt switch »

Pour modéliser cette expérience, Kuhn se tourne vers la psychologie « gestaltiste » : il interprète son expérience avec la physique aristotélicienne comme étant celle d'un gestalt switch (changement de forme). La théorie gestaltiste désigne par ce terme un basculement global de la perception, au cours duquel une même forme peut apparaître successivement comme propre à deux objets incompatibles (par exemple, selon un célèbre dessin, le même trait de crayon peut évoquer la forme d'un canard, ou celle d'un lapin). Dans le cas du concept de mouvement, un semblable basculement mental peut avoir lieu : le mouvement peut être vu dans une optique soit newtonienne, soit aristotélicienne. Les deux descriptions correspondent en quelque façon à l'expérience, vue de deux façons différentes.

Sur quoi porte exactement ce changement de gestalt ? La réponse de Kuhn sur ce point constitue sa principale originalité, qui s'ancre dans son apprentissage de la physique. Selon lui, la formation de la pensée scientifique est loin de se réduire à l'acquisition de connaissances purement intellectuelles abstraites et explicites : elle consiste avant tout à faire des exercices, à apprendre tacitement des règles de résolution de problèmes, pour les réemployer ensuite dans des cas inconnus mais apparentés. Le travail scientifique ne doit donc pas être conçu sur un mode purement intellectualiste, comme on le faisait jusque-là, selon Kuhn, en philosophie, mais comme un travail d'apprentissage pratique de « résolution d'énigmes ».

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Écrit par

  • : ancien élève de l'École normale supérieure de lettres et sciences humaines, agrégé de philosophie, enseignant à l'université de Paris-I

Classification

Pour citer cet article

Alexis BIENVENU. KUHN THOMAS (1922-1996) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Thomas Kuhn - crédits : Bill Pierce/ The LIFE Images Collection/ Getty Images

Thomas Kuhn

Autres références

  • APPRENTISSAGE PROFOND ou DEEP LEARNING

    • Écrit par Jean-Gabriel GANASCIA
    • 2 645 mots
    • 1 média
    ...intrinsèque à l’apprentissage supervisé qui tient au langage de description des exemples : celui-ci demeure figé et ne peut s’accroître automatiquement. Or, ce que le philosophe américain et historien des sciences Thomas Kuhn (1922-1996) appelle des « révolutions scientifiques », ou ce que le Français...
  • CONNAISSANCE

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    ...matérialisme vulgaire, un tel programme sera essentiellement abandonné après la Seconde Guerre mondiale. Il ne reviendra à l'ordre du jour que lorsque Thomas Kuhn réactualisera certaines thèses de Fleck dans son ouvrage sur La Structure des révolutions scientifiques (1962), et lorsque des sociologues,...
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    Ce sont justement ces résistances et ces inerties qui servent de point de départ à la thèse deThomas Kuhn sur les « révolutions scientifiques » et sa conception des états stables de la science. La science, selon Kuhn, se stabilise à de certaines époques en se conformant à un « paradigme », qui...
  • ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE (Arts et culture) - La philosophie

    • Écrit par Jean-Pierre COMETTI
    • 6 292 mots
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