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TERRE Formation

La Terre est une planète aux propriétés uniques. Parmi les plus de 5 000 planètes extrasolaires découvertes, aucune ne lui ressemble. Si certaines ont des proportions similaires de fer et de silicates, leur masse représente cependant plusieurs fois celle de la Terre. Nommées super-Terres, elles évoluent sur des orbites bien plus proches de l’étoile centrale que celle de la Terre l’est du Soleil. Les mesures chronologiques s’accordent à montrer que la formation de la Terre, à partir de corps primitifs constitués il y a 4,56 milliards d’années, s’est étalée sur plusieurs dizaines de millions d’années. Ce temps de formation est beaucoup plus long que pour Mars, les planètes géantes et, sans doute, les super-Terres. Aucun mélange de météorites ne permet de reproduire la composition chimique et isotopique de la Terre sans la prise en compte d’un réservoir de matière « primordiale » aujourd’hui disparu. La matière constituant la Terre a été accrétée majoritairement soit par capture de poussières du disque protoplanétaire, soit par collisions de petits corps. Les données isotopiques disponibles favorisent ce dernier scénario. Dans ce modèle collisionnel, seule une faible fraction de la masse de la Terre (MTerre) provient du système solaire externe, au-delà de l’orbite de Jupiter, et serait à l’origine d’une partie de l’eau terrestre et d’autres éléments volatils. Cependant, le processus de formation de la Terre et l’origine de ses propriétés spécifiques lui permettant d’être une planète habitable font toujours débat. Si d’importants progrès ont été réalisés, un modèle précis de formation de la Terre manque encore.

La Terre et les autres planètes

Dans le système solaire, on distingue deux grandes classes de planètes. D’une part, les planètes géantes –  Jupiter, Saturne, Uranus et Neptune – sont éloignées du Soleil, de 5,2 à 30 unités astronomiques (ua, unité correspondant à la distance Terre-Soleil, soit environ 150 × 106 km). Avec une masse comprise entre 14,5 (pour Uranus) et près de 318 fois (pour Jupiter) celle de la Terre, elles sont composées de gaz, roches et glaces. Jupiter et Saturne sont principalement constituées d’hydrogène et d’hélium, ces gaz étant également dominants dans la composition du Soleil. D’autre part, les planètes telluriques –  Mercure, Vénus, Terre et Mars – sont situées approximativement entre 0,4 et 1,5 ua du Soleil et leur masse est comprise entre 5,5 % (pour Mercure) et 81,5 % (pour Vénus) de celle de la Terre. Toutes les planètes telluriques, à l’exception de Mercure, sont composées essentiellement de fer et de silicates dans des proportions proches de celle du Soleil. Elles présentent un noyau métallique central (concentrant le fer) qui est entouré par un manteau silicaté de moindre densité. Ce sont ce que l’on appelle des corps différenciés. La « différenciation » correspond ici à un processus précoce ayant lieu lors de la fusion (totale ou partielle) de corps planétaires, au cours de laquelle se produit une ségrégation gravitaire du fer métal fondu – responsable de la formation du noyau métallique. Pour expliquer le cas de Mercure, dont le rapport noyau/manteau est à peu près le double de la valeur terrestre, les modèles évoquent une perte d’une grande partie de son manteau silicaté causée par une collision de forte énergie avec une autre planète, ayant eu lieu pendant sa phase de formation.

En dépit d’une composition chimique globale semblable, la Terre, Vénus et Mars sont très différentes. La faible masse de Mars, représentant 10,7 % de celle de la Terre, explique l’absence d’une atmosphère conséquente, les gaz ayant tendance à s’échapper s’ils ne sont pas suffisamment retenus par la gravité de la planète. De plus, une petite planète refroidit plus rapidement qu’une grande, en raison du fort rapport entre sa surface (à travers laquelle la planète refroidit) et son volume (dans lequel l’énergie acquise lors de la formation est stockée). Une planète plus froide est géologiquement moins active, expliquant les différences entre Mars et la Terre, comme l’absence de tectonique de plaques sur la planète rouge. Quant à Vénus, dont la masse représente 81,5 % de celle de la Terre, elle présente néanmoins des caractéristiques différentes. Elle ne possède ni champ magnétique ni tectonique des plaques. En revanche, son atmosphère est très épaisse, dominée par le dioxyde de carbone (CO2), imposant à la surface une pression 93 fois supérieure à celle sur Terre. Certaines de ces caractéristiques sont liées entre elles. Par exemple, l’abondance du CO2 dans l’atmosphère de Vénus est due à l’absence de précipitation (il fait trop chaud pour pleuvoir) et de tectonique de plaques, deux processus qui, sur Terre, ne permettent pas au CO2 de s’accumuler excessivement dans l’atmosphère. L’absence de ces deux processus est responsable d’un effet de serre puissant sur Vénus qui engendre une température moyenne de surface aux alentours de 460 °C, température bien supérieure à celle de Mercure (160 °C) malgré son plus grand éloignement du Soleil. Notons cependant que l’absence de tectonique des plaques et de champ magnétique sur Vénus demeure encore inexpliquée.

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Les planètes du système solaire ne sont plus les seuls éléments de comparaison avec la Terre : on connaît désormais plus de 5 000 exoplanètes (ou planètes extrasolaires) et environ 1 000 systèmes multiplanétaires. Toutefois, les techniques observationnelles ne permettent pas encore de détecter des exoplanètes avec une masse et une distance à l’étoile centrale comparables à celles qui caractérisent la Terre. Il n’est donc pas étonnant qu’aucune exoplanète analogue à la Terre n’ait été détectée. C’est d’ailleurs l’objectif du télescope spatial Plato (Planetary Transits and Oscillations of Stars) de l’Agence spatiale européenne (en anglais ESA pour European Space Agency). Malgré ces limites, on sait qu’il existe un grand nombre d’exoplanètes de masses intermédiaires entre celle de la Terre et celle de Neptune (soit 17 MTerre), dénommées super-Terres. Environ 50 % des étoiles ont des super-Terres évoluant sur des orbites proches, avec un rayon orbital inférieur à celui de Mercure ou de Vénus (les deux plus proches planètes du Soleil). De telles planètes n’existent pas dans notre système solaire.

Masse et rayon de quelques planètes extrasolaires (avec leur marge d’erreur) - crédits : Encyclopædia Universalis France

Masse et rayon de quelques planètes extrasolaires (avec leur marge d’erreur)

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Des mesures relativement précises des masses et rayons ont pu être obtenues pour une partie des exoplanètes observées. Leur densité moyenne a pu être calculée, ainsi que leur composition chimique globale, en utilisant des équations liées à la structure de la matière à haute pression. On observe que toutes les exoplanètes de plus de 5 MTerre ont un rayon supérieur à celui attendu pour une planète de la même masse ayant la composition de la Terre. Par conséquent, étant moins denses, elles doivent être enveloppées par une atmosphère étendue, sans doute composée majoritairement d’hydrogène et d’hélium, à l’instar de Neptune. Certaines super-Terres ayant une masse inférieure à 5 MTerre présentent aussi ce type d’atmosphère. D’autres, ayant perdu leur atmosphère par irradiation de l’étoile centrale, ont le rayon attendu pour une planète de composition terrestre à masse comparable.

Quelques exoplanètes dites super-Terres et zone habitable - crédits : Encyclopædia Universalis France

Quelques exoplanètes dites super-Terres et zone habitable

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Même si certaines exoplanètes sont composées de fer et de silicates dans les mêmes proportions que sur Terre, cela n’implique pas qu’elles ressemblent en tous points à notre planète. La plupart d’entre elles sont en effet trop proches de l’étoile centrale pour que l’eau puisse exister sous forme liquide à leur surface (la forte irradiation de l’étoile fait évaporer cette eau). À ces distances, seules les super-Terres orbitant autour d’étoiles de faibles masse et luminosité se trouvent en « zone habitable », c’est-à-dire avec une température de surface compatible avec l’existence de l’eau liquide. Cependant, leur habitabilité réelle dépend de plusieurs autres facteurs, notamment la composition chimique de l’atmosphère et, bien sûr, la présence réelle d’eau (une planète pourrait en être complètement dépourvue selon l’histoire de sa formation). Comme les étoiles de faible masse émettent beaucoup de rayons X, qui sont nocifs à la vie telle qu’elle est connue, l’habitabilité réelle des exoplanètes orbitant autour d’elles fait donc l’objet de débats.

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Écrit par

  • : professeur des Universités, université de Côte d'Azur
  • : directeur de recherche CNRS à l'Observatoire de la Côte d'Azur, Nice

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Masse et rayon de quelques planètes extrasolaires (avec leur marge d’erreur) - crédits : Encyclopædia Universalis France

Masse et rayon de quelques planètes extrasolaires (avec leur marge d’erreur)

Quelques exoplanètes dites super-Terres et zone habitable - crédits : Encyclopædia Universalis France

Quelques exoplanètes dites super-Terres et zone habitable

Propriétés isotopiques des météorites connues de Mars et de la Terre - crédits : Encyclopædia Universalis France

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