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TCHÉTCHÈNES

Les Tchétchènes forment, après les Russes, le groupe ethnique le plus important du Caucase du Nord. Lors du recensement russe de 2010, ils étaient au nombre de 1 431 000 dans la Fédération de Russie, dont 1 200 000 dans la république de Tchétchénie et 93 000 au Daghestan.

Les « Nakhtcho » (Tchétchènes, d'où le nom de la branche dite « nokh » des langues caucasiennes qui, en dehors du tchétchène, comprend l'ingouche et le bastbii) parlent deux dialectes principaux : le tchétchène montagnard et le tchétchène de la plaine, qui est la base de la langue littéraire.

L'origine des Tchétchènes est mal connue. Jusqu'au xvie siècle, ils vivaient en tribus, chacune portant le nom d'une montagne ou d'une rivière : les habitants des deux rives du Mitchik, par exemple, s'appelaient les Mitchik. Les villages de montagne appartenaient chacun à un clan, uni par un ancêtre commun ; les maisons étaient construites en terrasses, la cour débouchant souvent sur le toit de la maison voisine. Les terres de culture étaient privées, tandis que les forêts et les pâturages étaient communautaires, mais l'entraide était de règle dans les travaux des champs. Dans la seconde moitié du xviiie siècle, un grand nombre de Tchétchènes s'installent dans les plaines à proximité des villages cosaques. Les relations avec ces derniers étaient excellentes, et l'on assista à une interpénétration culturelle assez importante : les Cosaques adoptèrent le costume, les instruments de musique, les mélodies et les danses tchétchènes, tandis que les Tchétchènes de la plaine apprenaient auprès d'eux à cultiver la terre.

Tout au long de la première moitié du xixe siècle, tant que dura la guerre du Caucase, les nombreux clans tchétchènes furent rejoints par des groupes venus d'autres ethnies du Caucase (groupes du Daghestan, Avars, etc.) qui s'assimilèrent aux Tchétchènes. Les clans se divisaient en petits groupes de parents proches (nekf), qui rassemblaient de dix à cinquante fermes. Les grands clans regroupaient plusieurs nekf qu'on peut considérer comme des lignages. Dans les montagnes, ces nekf formaient des ligues qui se différenciaient entre elles par la langue. Dans la société tchétchène, la vendetta était l'un des faits les plus importants. Elle pouvait durer plusieurs années. Dans certaines ligues, le rachat du sang était autorisé, mais dans d'autres il était totalement exclu. Chaque ligue était indépendante sur son territoire propre. Les villages polyclaniques de la plaine étaient administrés par l'assemblée des représentants de chaque clan qui déléguait les hommes les plus âgés.

Superficiellement christianisés par les Géorgiens au viiie siècle, les Tchétchènes se tournèrent vers l'islam au xvie siècle. Venu du Daghestan, l'islam se développa plus vite dans les plaines que dans les montagnes. Il faut attendre le xixe siècle pour qu'il gagne rapidement dans les montagnes comme porte-drapeau de la lutte contre les envahisseurs russes. L'islam tchétchène donna naissance à une secte égalitaire et démocratique : le muridisme, très proche de la secte wahhabite. En 1830, l'imam des Tchétchènes, Kazi Mullah, déclara la guerre sainte aux Russes. Après sa mort, il fut remplacé par l'imam Shamil, dont le nom devint légendaire bien au-delà des frontières du Caucase. Ces fiers montagnards réussirent à entraîner dans leur lutte pour leur foi mais aussi pour leur liberté, toutes les ethnies du Caucase du Nord. Après la fin de la guerre, les meilleures terres furent distribuées par les Russes aux administrateurs militaires et aux aristocrates russes. Les quelques officiers tchétchènes ayant combattu sous le drapeau de l'Empire reçurent de grandes propriétés. Riche en pétrole, la région connut un relatif développement économique, surtout autour de Mozdok et de Groznyï (actuelle capitale[...]

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Pour citer cet article

Charles URJEWICZ. TCHÉTCHÈNES [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • CAUCASE

    • Écrit par André BLANC, Georges CHARACHIDZÉ, Louis DUBERTRET, Universalis, Silvia SERRANO
    • 17 147 mots
    • 4 médias
    ...Le Haut-Karabakh, peuplé de 80 p. 100 d'Arméniens, dépend de l'Azerbaïdjan, ce qui a conduit aux drames que l'on connaît. Une importante fraction des Tchétchènes-Ingouches, déportés massivement en 1944, vit encore au Kazakhstan, de même que nombre de Karatchaïs et de Balkars, victimes du même sort....
  • DOUDAEV DJOKHAR (1944-1996)

    • Écrit par Christophe CHICLET
    • 681 mots

    Père de l'indépendance de la Tchétchénie en 1991, celui qui se faisait appeler le « loup tchétchène » n'aura pas assisté à la débâcle de l'armée russe, ni à la signature d'un accord de paix à l'automne de 1996.

    Le destin de Djokhar Doudaev se confond avec la...

  • NETTOYAGE ETHNIQUE

    • Écrit par George J. ANDREOPOULOS
    • 1 507 mots
    • 2 médias

    Tentative de créer des zones géographiques se caractérisant par leur homogénéité ethnique, au moyen de la déportation ou du déplacement forcé de personnes appartenant à des groupes ethniques définis. Le nettoyage ethnique entraîne parfois la suppression de toutes les marques physiques témoignant de...

  • RUSSIE (Le territoire et les hommes) - Géographie

    • Écrit par Pascal MARCHAND
    • 8 602 mots
    • 11 médias
    ...autonomes de petite taille, mais ethniquement très homogènes (sauf le Daghestan). Les nationalités les plus nombreuses sont les Avars (800 000) et les Tchétchènes (1,3 million), mais de sérieux doutes ont été formulés par les démographes sur les données du recensement de 2002 dans le Caucase, qui auraient...

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