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SUPRAMOLÉCULAIRE (CHIMIE)

Au-delà de la chimie moléculaire, fondée sur la liaison covalente, s'étend la chimie supramoléculaire, fondée sur les interactions moléculaires – les associations de deux ou plusieurs espèces chimiques et la liaison intermoléculaire.

Anneaux borroméens - crédits : Encyclopædia Universalis France

Anneaux borroméens

Les interactions moléculaires sont à la base des processus hautement spécifiques qui se rencontrent en biologie, tels que la fixation d'un substrat sur une enzyme ou un récepteur, l'assemblage de complexes protéiques, la lecture intermoléculaire du code génétique, l'induction d'un signal par des neurotransmetteurs et la reconnaissance cellulaire. La manipulation correcte des caractéristiques énergétiques et stéréochimiques des forces non covalentes intermoléculaires (forces électrostatiques, liaisons hydrogène, forces de Van der Waals, etc.), à l'intérieur d'une architecture moléculaire déterminée, devrait permettre de concevoir des molécules réceptrices artificielles capables de fixer un substrat fortement et sélectivement pour former des entités supramoléculaires, appelées supermolécules, de structure et fonction parfaitement définies. On pourrait dire que les supermolécules sont aux molécules et à la liaison intermoléculaire ce que les molécules sont aux atomes et à la liaison covalente.

De la chimie moléculaire à la chimie supramoléculaire

Pour que le récepteur « reconnaisse » un substrat potentiel et s'y fixe, les deux espèces doivent être complémentaires tant en ce qui concerne la taille et la forme (géométrie) que les sites de fixation (énergie). Il s'agit là d'une extension du concept de « clé et serrure » d'Émile Fischer, de l'ajustement stérique à d'autres propriétés intermoléculaires.

La chimie des récepteurs peut ainsi être considérée comme une chimie de coordination généralisée. Elle étend la finalité des agents complexants organiques artificiels de la coordination des ions métalliques de transition, pour laquelle ils ont été d'abord utilisés, à la coordination de toutes sortes de substrats : cationiques, anioniques et espèces neutres de nature inorganique, organique et biologique.

Fonctions de base - crédits : Encyclopædia Universalis France

Fonctions de base

Si, outre les sites de fixation, le récepteur porte aussi des fonctions réactives, il peut réaliser une transformation chimique du substrat fixé, se comportant ainsi en réactif ou catalyseur supramoléculaire. S'il est muni de groupes lipophiles qui lui permettent de se dissoudre dans une membrane, il peut agir comme transporteur moléculaire, capable d'effectuer la translocation du substrat fixé. Ainsi, la reconnaissance, la transformation et la translocation moléculaires représentent les fonctions de base des espèces supramoléculaires. Des fonctions plus complexes peuvent résulter de l'interaction entre plusieurs sous-unités de fixation au sein d'un même récepteur. En association avec des assemblages polymoléculaires et des phases organisées (couches, membranes, vésicules, cristaux liquides, etc.), des supermolécules fonctionnelles peuvent conduire à la formation de composants moléculaires, dont les propriétés résultent de la mise en œuvre des fonctions supramoléculaires au sein d'un ensemble organisé.

Récepteurs macropolycycliques. La reconnaissance moléculaire exige qu'un récepteur et son substrat aient une grande surface de contact. Ainsi, les récepteurs artificiels doivent contenir des cavités intramoléculaires suffisamment grandes pour permettre l'inclusion du substrat, de même que des éléments structuraux qui dotent l'ossature tridimensionnelle des caractéristiques géométriques et dynamiques prévues : en somme, un équilibre entre flexibilité et rigidité. Cela conduit à des molécules concaves, « creuses », d'architecture déterminée, capables de fixer un substrat par de multiples interactions non covalentes.

Les architectures macropolycycliques satisfont[...]

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Pour citer cet article

Jean-Marie LEHN. SUPRAMOLÉCULAIRE (CHIMIE) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Anneaux borroméens - crédits : Encyclopædia Universalis France

Anneaux borroméens

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Fonctions de base

Structures macropolycycliques - crédits : Encyclopædia Universalis France

Structures macropolycycliques

Autres références

  • CHIMIE - Histoire

    • Écrit par Élisabeth GORDON, Jacques GUILLERME, Raymond MAUREL
    • 11 186 mots
    • 7 médias
    ...que des édifices totalement inorganiques comme de petits agrégats d'atomes métalliques ou clusters (fig. 1). On s'oriente aussi vers l'élaboration d'une chimie supramoléculaire, fondée non plus sur des liaisons covalentes classiques, mais sur des interactions diverses entre molécules ; c'est ainsi qu'ont...
  • CHIMIE - La chimie aujourd'hui

    • Écrit par Pierre LASZLO
    • 10 856 mots
    • 3 médias
    CharlesJohn Pedersen (1904-1989), Donald James Cram (1919-2001) et Jean-Marie Lehn (né en 1939) sont les créateurs de la chimie supramoléculaire, ce qui leur valut le prix Nobel en 1987. L'un des germes en fut le modèle « clé-serrure », comme Emil Fischer (1852-1919) dénomma l'interaction spécifique...
  • COMPLEXES, chimie

    • Écrit par René-Antoine PARIS, Jean-Pierre SCHARFF
    • 4 304 mots
    • 5 médias
    ...complexation. De plus, ces substances permettent le transport sélectif de cations complexés à travers des membranes artificielles ou biologiques. Plusieurs équipes de recherche ont alors tenté d'obtenir des macrocycles synthétiques susceptibles de présenter des propriétés analogues. Des études systématiques...
  • LEHN JEAN-MARIE (1939- )

    • Écrit par Jean-Paul BEHR, Universalis, Mir Wais HOSSEINI
    • 595 mots

    Chimiste français né le 30 septembre 1939 à Rosheim (Bas-Rhin), Jean-Marie Lehn a reçu, en 1987, le prix Nobel de chimie, avec les Américains Donald J. Cram et Charles J. Pedersen. Ce prix récompense leurs travaux sur l'élaboration et l'utilisation de molécules « creuses » pouvant exercer, avec...

Voir aussi