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JACOBSEN ROBERT (1912-1993)

Né, selon son mot, « physiquement à Copenhague, puis intellectuellement en France » — en 1912 puis au tout début des années 1950 —, Robert Jacobsen est une personnalité marquante sur la scène de la sculpture européenne de l'après-guerre ; son œuvre est partagée entre un formalisme abstrait et une figuration expressive.

Marin, mécanicien, joueur de banjo, bricoleur, Jacobsen tâte de la vie en désordre. Ses premières sculptures, en bois, par taille directe mais aussi par assemblage, datent de 1930. Autodidacte, il sera marqué par la culture populaire danoise, par le légendaire viking, mais aussi par l'art africain. Il découvre rapidement l'art moderne européen, en particulier Klee, Arp, Picasso. Lié au peintre Richard Mortensen, à Asger Jorn et à d'autres membres du futur groupe Cobra, il expose dans les pays scandinaves à partir de 1940 des travaux sur bois et sur pierre.

En 1947, il s'installe à Paris. Il est alors au contact des artistes réunis par la géométrie abstraite autour de la galerie de Denise René : Dewasne, Magnelli, Vasarely... Dans le cours de ses années parisiennes, il se lie avec des artistes d'horizons différents : Giacometti et Pevsner, par exemple. En 1949, il entre à son tour dans ce « nouvel âge de fer » que traverse la sculpture du siècle quand il systématise l'emploi du métal. Il devient sculpteur sur ferraille, cette matière moderne, en quoi se marque la domination de l'homme sur la nature, qui se travaille autant comme structure que comme surface. Feuilles et profilés de fer, découpés, pliés, soudés... : c'est la forme construite qui l'intéresse ici, plutôt que la forme trouvée.

« Moi, je travaille avec l'espace, je le fais bouger », dit l'artiste. Il s'agit, pour obtenir une spatialité élargie, d'animer un espace interne, souvent « cadré » par une structure qui demeure ouverte, dans un vocabulaire formel qui joue de la combinaison des plans, des surfaces, des volumes aux découpes tendues et rythmiques. Avec des éléments solides, pleins, ou décrits par leurs seuls contours, leurs arêtes, leurs absences, en se servant de contradictions et d'oppositions formelles — ainsi de la rencontre de la ligne droite, des articulations orthonormées, des volumes simples, des figures d'une architecture fondamentale, d'une part, et d'autre part de la courbe, de l'arc, de la parabole —, les pièces de Jacobsen s'inscrivent dans la vocation moderne de la sculpture à élaborer et à baliser l'espace vécu. Le jeu de l'équilibre interne crée des sensations de tension — bien à l'écart du cinétisme cependant — qui permettent de dépasser l'autonomie formelle de la sculpture abstraite pour engager le spectateur à avoir par le regard un rapport libre et actif à l'espace. Afin de laisser jouer cette faculté sans la forcer par la monumentalité, Jacobsen dira longtemps son attachement à limiter la dimension de ses œuvres à la taille humaine.

Cependant, quand il retourne s'installer au Danemark en 1969, dans sa ferme-atelier près d'Egtved — alors qu'il expose régulièrement depuis 1950 en Europe et 1962 aux États-Unis —, il va rompre avec cette contrainte de dimension pour déployer la grammaire formelle qui lui est familière et reprendre les expériences du passé à une plus grande échelle. Il va ainsi répondre à plusieurs commandes publiques dans les dernières années de sa vie, s'autorisant à plusieurs reprises la dimension du monument. Ainsi la sculpture — L'Unesco — inaugurée au printemps de 1993 dans l'enceinte de l'U.N.E.S.C.O. à Paris.

On a pu parler à son sujet de dépassement du constructivisme, puisque, si sa pratique s'inscrit dans une tradition architecturante de la sculpture, elle ne renie jamais le souci d'expressivité, de spontanéité[...]

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Christophe DOMINO. JACOBSEN ROBERT (1912-1993) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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