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ROGERS RICHARD (1933-2021)

Un Meccano géant : le siège du Lloyd's

Les années suivantes voient naître des projets d'usines de plus en plus étonnants. D'abord des entrepôts près de Quimper pour la société Fleetguard, boîte suspendue à une forêt régulière de mâts métalliques par tout un jeu de câbles et d'accastillages ; puis l'usine d'électronique Inmos à Newport, en Galles du Sud, et les laboratoires Pat de Princeton aux États-Unis, bâtiments évolutifs, préfabriqués, organisés autour d'une rue intérieure, « épine dorsale » qui, sur plus de 100 mètres pour l'une, 80 pour l'autre, abrite divers services, « noyau dur » de ces constructions. De hautes structures métalliques dressées sur ces axes, portiques en treillis dans un cas, grands chevalets en forme de A dans l'autre, émergences aiguës, supportent, par des câbles et des tirants tendus de part et d'autre, des poutres horizontales qui fournissent, sans aucun appui intermédiaire, de vastes abris couverts. Le long de 1'« épine dorsale » courent les gaines et tuyaux divers, des boîtes techniques et des passerelles qui rendent extrêmement spectaculaire et expressive l'insolite exposition, sur le toit des bâtiments, de cette « tripaille » aux couleurs vives, symbole efficace de l'univers de l'industrie.

Dans les mêmes années, Rogers réalise à Londres, dans la City, son grand œuvre, inauguré à l'automne de 1986 : le nouveau siège du Lloyd's. Il s'agit d'un édifice en béton préfabriqué, usiné comme de l'acier, sorte de Meccano géant – de « kit », dit l'architecte –, formant un volume de plan rectangulaire organisé autour d'un haut atrium éclairé par une verrière qui évoque le Crystal Palace construit pour l'Exposition universelle de 1851, irrigué par le mouvement ininterrompu d'une double batterie d'escaliers mécaniques. Tous les services (sanitaires, escaliers, ascenseurs de verre) ont été situés à l'extérieur, où ils composent six tours « satellites » faites d'un empilement régulier de volumes métalliques, très saillants, glissés dans les structures de béton comme des capsules autonomes rangées dans des casiers. Des gaines de climatisation inoxydables glissent le long des façades et se hissent jusqu'aux énormes boîtes-usines bardées de tôle, ceintes de passerelles et d'escaliers de secours, hérissées de bras de grues, qui couronnent cet édifice complexe, grouillant d'excroissances, syncopé, heurté, curieux assemblage de pièces et de modules autonomes, où rien n'est jamais caché, où chaque constituant prend sa place dans une organisation quasi mécanique, les éléments « servants » qui risquent de devenir rapidement obsolètes pouvant être démontés et remplacés par des composants nouveaux.

Siège du Lloyd's, Londres - crédits : Roger Last/  Bridgeman Images

Siège du Lloyd's, Londres

Immeuble du Lloyd's - crédits : Bernard Annebicque/ Sygma/ Sygma/ Getty Images

Immeuble du Lloyd's

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Pour citer cet article

François CHASLIN. ROGERS RICHARD (1933-2021) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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Richard Rogers - crédits : Martin Bureau/ AFP

Richard Rogers

Siège du Lloyd's, Londres - crédits : Roger Last/  Bridgeman Images

Siège du Lloyd's, Londres

Immeuble du Lloyd's - crédits : Bernard Annebicque/ Sygma/ Sygma/ Getty Images

Immeuble du Lloyd's

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