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RÉVOLUTION MILITAIRE

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En 1956, l'historien britannique Michael Roberts analyse les effets induits par l'adoption de l'artillerie de campagne dans les armées européennes au début du xviie siècle. Deux hommes sont alors à l'origine de ce qu'il définit comme une « révolution militaire » : Maurice de Nassau dans les Provinces-Unies et le roi de Suède Gustave II Adolphe. L'artillerie de campagne (canons légers, mousqueterie) oblige les chefs de guerre à abandonner l'ordre profond pour la ligne, dont l'étirement protège les soldats contre les tirs adverses et accroît la puissance de feu grâce à la technique du feu roulant et de la contre-marche. Sur le plan tactique, cette innovation technologique exige un entraînement poussé du soldat – la fameuse discipline du feu –, une plus grande manœuvrabilité des troupes, une plus grande complexité dans l'utilisation complémentaire des armes. Mais sur le plan stratégique, l'augmentation de la taille des armées offre des possibilités d'intervention simultanée sur plusieurs champs d'opération. Pour affronter ce défi, l'État doit mettre en place une administration plus performante afin de gérer les effectifs, les armements et la logistique, et il a recours aux sujets, sommés de contribuer à l'effort de guerre par l'impôt et la conscription. Pour Michael Roberts, la révolution militaire qui se manifeste en Europe entre 1560 et 1660 est à l'origine à la fois de l'État moderne et de la prépondérance de l'Europe sur le monde. Toutefois, ce texte (The Military Revolution 1560-1660) rencontre peu d'échos, même après sa réédition en 1967 (dans Essays in Swedish History).

La portée tactique et stratégique de la révolution militaire

En 1987, le Britannique Geoffrey Parker « revisite » le concept (dans La Révolution militaire. La guerre et l'essor de l'Occident : 1500-1800, paru en France en 1993) et retouche la thèse de Michael Roberts sur plusieurs points. Il fait commencer la « révolution militaire » beaucoup plus tôt que Roberts, avec l'invention du canon de bronze et du boulet de fer dès la fin du xve siècle, et la miniaturisation des armes portatives et donc l'augmentation de la puissance de feu sur le champ de bataille, au début du xvie siècle. Pendant les guerres d'Italie, l'artillerie de siège devient une arme redoutable devant laquelle les anciennes fortifications, aux murs droits et élevés, aux tours rondes et creuses, sont incapables de tenir. L'une des premières conséquences de la révolution militaire se traduit donc par l'apparition de la fortification basse et bastionnée (la forteresse d'artillerie), dont le premier exemple a été réalisé à Civitavecchia en 1515. Geoffrey Parker fait aussi commencer plus tôt l'abandon de l'ordre profond dans l'infanterie. Le tercio espagnol, constitué de compagnies de fantassins plus réduites et plus mobiles, associant la pique et l'arquebuse, représente déjà une première tentative d'adaptation devant l'augmentation de la puissance de feu. Quant à l'augmentation significative de la taille des armées, il l'attribue surtout à la généralisation de l'architecture bastionnée. Il faut des garnisons pour assurer la défense des forteresses, et la nouvelle guerre de siège exige des armées nombreuses. Enfin, pour compléter le tableau de la révolution militaire telle qu'il la conçoit, Geoffrey Parker insiste sur les progrès considérables de la guerre navale, un point totalement ignoré par Michael Roberts. Les navires sont construits plus solidement, capables ainsi d'embarquer une artillerie nombreuse et lourde, l'invention du sabord permettant le tir par le travers, celle de l'affût mobile autorisant le chargement rapide du canon par la gueule. Tous ces progrès donnent[...]

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Jean-Michel SALLMANN. RÉVOLUTION MILITAIRE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 10/02/2009