Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

RÉALISME (art et littérature)

Tout comme en littérature, le réalisme a été le mouvement dominant en art pendant la seconde moitié du xixe siècle. Pourtant, il n'a fait l'objet, de la part des chercheurs, que d'investigations fragmentaires, et ses limites tant géographiques que chronologiques restent mal définies. En outre, les spécialistes discutent toujours sur le point de savoir quels peintres peuvent être qualifiés de réalistes et selon quels critères. Enfin, on ne dispose d'aucune étude concernant la sculpture réaliste.

L'étude du réalisme se heurte à plusieurs difficultés. La première est d'ordre sémantique : le terme de réalisme est utilisé de façon vague par le grand public et aussi, malheureusement, par les spécialistes. Il sert souvent à décrire, pour n'importe quelle période, toute forme d'art représentatif ; on le donne comme synonyme de naturalisme quand on ne le confond pas purement et simplement avec ce dernier terme, qui ne désigne, dans le meilleur des cas, qu'une phase tardive du réalisme. Qui plus est, le terme de réalisme nous confronte à cet important problème philosophique : « Qu'est-ce que la réalité ? »

La seconde difficulté tient à l'approche doctrinaire du mouvement par les historiens d'art. Au cours de ce dernier demi-siècle, une sorte de conspiration a fait qu'on a surtout cherché à écrire l'histoire de l'art en termes de mouvements français d'avant-garde. En sorte que, tant en France qu'à l'étranger, l'attention accordée au mouvement réaliste s'est centrée sur les réalistes de la « voie principale du progrès » : Courbet, Manet et les impressionnistes. Le même préjugé a conduit à limiter la « période » du réalisme, de manière à le situer commodément entre le romantisme et le symbolisme.

La troisième difficulté est d'ordre esthétique : personne n'aime vraiment le réalisme en art. Objectivité, élimination du sentiment personnel et suspension du contrôle intellectuel, intérêt porté à la laideur en tant qu'antagoniste de la beauté, tous ces traits constituent, pour le public comme pour de nombreux critiques, l'antithèse même de l'art.

Une plus riche information aidera peut-être à surmonter ces préjugés. Ainsi, l'histoire du réalisme littéraire nous suggère ce qu'a dû être la durée probable du réalisme en art. La peinture réaliste manifeste encore de la vigueur en 1900, année où le romancier américain, Theodore Dreiser, publie Sister Carrie, et elle semble être aussi populaire dans le monde occidental que l'était le roman réaliste. C'est pourquoi, en considérant le fondement social ou philosophique du réalisme per se en tant que doctrine du milieu du xixe siècle, on peut dégager un certain nombre de croyances transposables dans le domaine de la peinture. Le réalisme était fondé sur l'idée que la nature, ou le monde extérieur, a une existence objective, que la nature est visiblement soumise à la causalité physique, et que l'homme, en tant que partie de la nature, est soumis aussi aux lois de la causalité. On tenait les lois établies a priori pour des obstacles dans la recherche de la vérité, et des causes d'injustice dans la société. Pour découvrir les peintres réalistes qui œuvrèrent dans le monde occidental entre 1850 et 1900, il nous faut cerner un art qui fut anti-idéaliste ou révolutionnaire dans le style comme dans les sujets, et objectif dans sa description de l'homme et de la nature, qu'on accédât à cette objectivité en se soumettant à des méthodes scientifiques ou simplement à l'aide d'une observation réglée.

Art

Réalisme anti-idéaliste ou révolutionnaire

Dans ses premières manifestations, la peinture réaliste se dresse contre les traditions dominantes dans le domaine de l'art et dans les conventions sociales. Il[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Pour citer cet article

Gerald M. ACKERMAN et Henri MITTERAND. RÉALISME (art et littérature) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

<em>Réception des ambassadeurs du Siam à Fontainebleau</em>, J. L. Gérôme - crédits : G. Dagli Orti/ De Agostini/ Getty Images

Réception des ambassadeurs du Siam à Fontainebleau, J. L. Gérôme

<it>Les Glaneuses</it>, J.-F. Millet - crédits : VCG Wilson/ Corbis/ Getty Images

Les Glaneuses, J.-F. Millet

<it>Le Pont de l'Europe</it>, G. Caillebotte - crédits :  Bridgeman Images

Le Pont de l'Europe, G. Caillebotte

Voir aussi