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PROVINCES-UNIES (1579-1795)

Fédération « lâche » de provinces du nord des Pays-Bas formée lors de l'Union d'Utrecht (1579) et dissoute par le traité de La Haye (1795).

Par l'Union d'Utrecht, les sept provinces calvinistes des Pays-Bas septentrionaux (Hollande, Zélande, Utrecht, Frise, Groningue, Gueldre et Overijssel) constituent la république des Provinces-Unies. Sous la conduite de quelques grands nobles tels que le stathouder Guillaume d'Orange (1533-1584), aussi appelé le « Taciturne » ou le « père de la patrie », elles rejettent l'autorité de Philippe II d'Espagne et proclament leur indépendance.

1600 à 1700. Les nouveaux conquérants - crédits : Encyclopædia Universalis France

1600 à 1700. Les nouveaux conquérants

Les autorités espagnoles n'acceptent pas facilement leur sécession. Sous le commandement d'Alexandre Farnèse, duc de Parme, elles remportent des succès militaires importants, notamment la reconquête de la ville marchande d'Anvers en 1585. La victoire provoque un exode des calvinistes des provinces du Sud vers le Nord. Ces immigrants auront une grande influence sur le développement des Provinces-Unies. Ils renforcent l'élément calviniste. En outre, les réfugiés apportent leurs connaissances, techniques, capitaux et réseaux commerciaux, contribuant ainsi à l'essor du commerce, de l'industrie et des arts, qui marque les Provinces-Unies au xviie siècle.

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Les immigrants des Pays-Bas du sud ne sont pas les seuls réfugiés que les Provinces-Unies reçoivent à bras ouverts. Les huguenots, les juifs et les jansénistes y trouvent asile, y exercent leurs métiers et expriment leurs opinions dans la presse éclairée. Ainsi les Provinces-Unies attirent des intellectuels mais aussi des artistes, négociants et artisans. Quoique exclus du service de l'État, les catholiques bénéficient également d'une certaine tolérance.

La mauvaise conjoncture et l'instabilité politique dans les autres pays européens permettent aux Provinces-Unies de profiter au maximum de leur situation géographique privilégiée, au carrefour des grandes routes du commerce international. Les villes d'Amsterdam, de Rotterdam et de Middelbourg servent d'entrepôt et on y effectue le transbordement des marchandises de l'Europe du Nord et du Sud. Du Nord, les Provinces-Unies importent surtout des denrées pondéreuses à bas prix, telles que les grains (le « négoce-mère ») et le bois. Le poids du commerce des marchandises précieuses ne doit cependant pas être sous-estimé. La Compagnie hollandaise des Indes orientales (créée en 1602) importe des épices, de la porcelaine et du poivre, tout en développant des ambitions territoriales. Au xviiie siècle, l'importation de sucre et de café en provenance des Indes occidentales devient de plus en plus importante. L'hégémonie commerciale des Provinces-Unies est renforcée par la facilité du paiement et du crédit et par l'importance de la flotte marchande (les flûtes) dont les services s'achètent à bon compte.

Les industries profitent de l'essor du commerce. Les matières premières et les demi-produits importés sont transformés pour un marché international (sucrerie, distillerie, construction navale). Comparé à d'autres pays, le niveau de vie dans les Provinces-Unies est élevé. Jusqu'aux années 1660, le coût de la vie diminue alors que les salaires augmentent.

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Les historiens sont divisés sur la datation exacte de la fin du Siècle d'or néerlandais. Certains considèrent que le déclin économique s'annonce déjà dans les années 1660, quand Colbert prend les mesures mercantilistes contre les Provinces-Unies, qui provoquent la guerre de Hollande (1672-1678). D'autres datent la récession vers le milieu du xviiie siècle en soulignant qu'il ne s'agit, jusqu'à la guerre contre l'Angleterre de 1780, que d'un déclin relatif, par rapport à d'autres pays européens.

L'esprit de tolérance et la prospérité culturelle et économique des Provinces-Unies sont étroitement liés à une structure politique hors du commun. À une époque où la monarchie absolue est le régime le plus répandu en Europe, la république bourgeoise fait sensation. Le pouvoir y est peu centralisé : quelque deux mille régents participent à la gestion du pays à des échelons différents. Les États généraux, à la Haye, détiennent la plus haute autorité. Ils sont composés de quarante députés des provinces, dont dix-neuf de la Hollande. Avant d'être appliquées, ses décisions doivent être ratifiées par les États provinciaux. Ceux-ci sont composés de délégués des villes et de représentants de la noblesse. Ces corps nomment les stathouders (traditionnellement un des membres de la maison d'Orange), qui exercent le commandement militaire. Ils désignent également un Pensionnaire, chargé de diriger l'administration provinciale. Le Pensionnaire de la Hollande fait en même temps office de Grand Pensionnaire pour toute l'union. Chaque ville est administrée par un conseil, qui nomme les maires, les échevins et les délégués aux États provinciaux.

Les événements politiques ne favorisent pas toujours la prospérité économique et culturelle. En 1609, l'Espagne et les Provinces-Unies, de guerre lasse, concluent un armistice, la trêve de douze ans. Pendant cette période, les Provinces-Unies traversent leur première crise politique. Elle est occasionnée par un différend entre deux théologiens calvinistes, Jacobus Arminius et Franciscus Gomarus, concernant l'interprétation de la prédestination. Ce conflit prend une tournure politique lorsque les arminiens cherchent la protection des États provinciaux de la Hollande et du Grand Pensionnaire Jean van Oldenbarnevelt. Le stathouder Maurice de Nassau, l'un des fils de Guillaume le Taciturne, prend en revanche le parti des gomaristes. L'opposition de ces deux partis, les étatistes et les orangistes, traversera tout le xviie siècle.

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Après la trêve, quand les Provinces-Unies reprennent les hostilités contre l'Espagne en 1621, la guerre change de nature. Elle sera désormais liée à la guerre de Trente Ans. Le traité de Münster de 1648, par lequel l'Espagne reconnaît l'indépendance des Provinces-Unies, marque une césure dans l'histoire politique. Dans la seconde moitié du xviie et au xviiie siècle, les États généraux décident à plusieurs reprises de se passer du stathouder et de confier tout l'exécutif à un Grand Pensionnaire. Dans cette fonction, des hommes d'État talentueux, tels que Jean de Witt et Antoine Heinsius, conduisent les Provinces-Unies dans des grands conflits internationaux : les deux premières guerres maritimes contre l'Angleterre (1652-1654), (1665-1667) et la guerre Nordique contre la Suède (1655-1660) pour le premier, et la guerre de la Succession d'Espagne (1702-1714) pour le second. La guerre de la Succession d'Autriche (1740-1748) et l'occupation française conduisent à la restauration de la maison d'Orange.

Au cours des années 1770 naît un nouveau mouvement politique, les « patriotes ». Ils s'opposent au soutien apporté par le stathouder Guillaume V aux Anglais dans la guerre d'Indépendance américaine. Inspirés par la philosophie des Lumières, ils rejettent l'exclusivité de l'oligarchie au pouvoir. En 1787, après une tentative de révolution avortée, de nombreux patriotes sont contraints de se réfugier en France. L'invasion française de 1795 leur permet de rentrer au pays. À cette occasion, les Provinces-Unies deviennent République batave.

— Anne WEGENER SLEESWIJK

Bibliographie

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K. Davids & L. Noordegraaf dir., The Dutch Economy in the Golden Age : Nine Studies, Nederlands Economisch Historisch Archief, Amsterdam, 1993

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J. Israel, Dutch Primacy in the World Trade, 1585-1740, Oxford University Press, Oxford, 1989 ; The Dutch Republic. Its Rise, Greatness, and Fall 1477-1806, ibid., 1995

P. Jeannin, L'Europe du Nord-Ouest et du Nord aux XVIIe et XVIIIe siècles, P.U.F., Paris, [1969] 1987

H. Mechoulan dir., Amsterdam au XVIIe siècle, Autrement, no 23, Paris, 1993

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S. Schama, The Embarrassment of Riches : an Interpretation of Dutch Culture in the Golden Age, Knopf, New York, 1987

J. de Vries & A. Van der Woude, Nederland 1500-1815. De eerste ronde van moderne economische groei, Balans, Amsterdam, 1995.

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1600 à 1700. Les nouveaux conquérants - crédits : Encyclopædia Universalis France

1600 à 1700. Les nouveaux conquérants

Autres références

  • BANQUE - Histoire de l'institution bancaire

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    Cet ensemble élaboré de pratiques issues de l'Europe méridionale permet aux Provinces-Unies du début du xviie siècle de franchir une étape essentielle dans l'institutionnalisation de la banque. La création de la Banque d'Amsterdam a en effet eu un impact historique considérable en...
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