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VAN VEEN OTTO dit VENIUS (1556-1629)

Travaillant d'abord chez le Leydois Isaac Claesz van Swanenburgh, puis à Liège, en 1574, chez Dominicus Lampsonius, Otto van Veen visita ensuite longuement l'Italie (de 1577 à 1582) pour rester à jamais un « romaniste » et un humaniste aussi fervent que cultivé, admirateur de Corrège à Parme, et directement marqué par les Zuccari à Rome.

Après un court arrêt à Munich, il revient dans les Pays-Bas en 1583, d'abord à Liège au service du prince-évêque, puis à Bruxelles comme peintre de la cour, auprès d'Alexandre Farnèse, duc de Parme (mort en 1592). Vers 1588-1589, il se fixe à Anvers où il est bientôt reçu franc-maître (1594) et où il se marie. L'un de ses principaux titres de gloire reste d'avoir été à Anvers le maître et le patron de Rubens pendant une longue période, de 1594 à 1598, fructueuses années d'apprentissage qui se transformèrent bientôt pour Rubens en une flatteuse et efficace collaboration. Très considéré — l'archiduc le nomme, en 1612, gardien de la monnaie — Vaenius s'établit alors à Bruxelles où il devient, en 1620, membre de la gilde des peintres.

Après des essais qui restent très italianisants, comme le Mariage mystique de sainte Catherine à Bruxelles (1589), d'une suavité encore toute corrégienne, il met au point dans les années 1590 une très intéressante peinture d'histoire, lourde et austère, mais bien balancée, aux formes carrées et sculpturales, aux gestes lents et éloquents, aux visages dignes et idéalisés, au coloris rare et neutre, à la pâte coulante et lisse — enfin, d'une clarté monumentale et d'un poids narratif qui vont marquer à jamais le jeune Rubens. Peinture délibérément conservatrice et réservée comme celle des premiers Francken, peu avancée, peu sensible aux séductions coloristes chères à un Marten de Vos captivé par Venise et Tintoret, très représentative de tout un sage académisme anversois qui contraste avec les inventions débridées des peintres de Haarlem, d'Utrecht ou de Prague, peut-être n'en était-elle que plus libératrice pour le jeune Rubens, dans son refus des outrances et des habiletés maniéristes, dans son effort de clarification plastique. La Résurrection de Lazare (env. 1594-1595, cathédrale d'Anvers), la Crucifixion de saint André (église Saint-André à Anvers) témoignent parfaitement de cette voie difficile choisie par un artiste qui a très utilement médité la leçon apaisante des grands peintres italiens de la Contre-Réforme, tels les deux Zuccari, Girolamo Muziano ou Cigoli. C'est bien chez Vaenius que Rubens a appris son sens de la mise en scène lisible et monumentale qui privilégie toujours un personnage ou un motif principal avec des effets de contrastes de lumière simples et efficaces et des formes amples et comme ralenties, pesantes. Aussi bien y eut-il bientôt dans l'atelier de Vaenius une véritable collaboration entre le maître et l'élève dont témoignent, entre autres, L'Allégorie de la jeunesse (Stockholm), La Résurrection de Lazare (Saint-Michel de Gand), peut-être Le Repas chez Simon (Bergues) et aussi l'émouvante Déposition de Croix (Louvre) qui est déjà d'une plénitude toute rubénienne.

Vaenius fut, en outre, un fertile inventeur de compositions gravées, notamment pour des frontispices allégoriques, où Rubens a beaucoup puisé pour son propre répertoire iconographique. Vaenius qui dessinait souvent à l'huile sur papier dans la technique de la grisaille (exemples au Louvre, à Rouen, à la Pierpont Morgan Library de New York, à Douai, à Lille) se révèle en ce genre un narrateur de la plus grande aisance, moins antimaniériste que dans ses grands tableaux d'autels, et donnant justement au maniérisme tardif du xvie siècle des qualités d'expression et de clarté qui fructifieront pleinement au xviie siècle. On constate[...]

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Écrit par

  • : conservateur des Musées nationaux, service d'études et de documentation, département des Peintures, musée du Louvre

Classification

Pour citer cet article

Jacques FOUCART. VAN VEEN OTTO dit VENIUS (1556-1629) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ANVERS

    • Écrit par Guido PEETERS, Carl VAN DE VELDE, Christian VANDERMOTTEN
    • 8 398 mots
    • 5 médias
    ...contemporain de Bruegel, a surtout admiré Michel-Ange et les peintres maniéristes qu'il a connus pendant son séjour en Italie. Puis l'influence vénitienne s'accentue encore chez Martin de Vos, que l'on dit élève du Tintoret. Otto Van Veen, un des maîtres de Rubens, a travaillé avec Federico Zuccari.
  • RUBENS PIERRE PAUL (1577-1640)

    • Écrit par Jacques FOUCART
    • 6 838 mots
    • 9 médias
    ...pour passer ensuite chez deux peintres d'histoire assez connus à Anvers dans le milieu des « romanistes » alors très actifs : Adam van Noort et surtout Otto Venius. On ne connaît pas la durée exacte de cet apprentissage (quatre ans chez chacun selon Roger de Piles qui recourt ici à une précieuse Vie...

Voir aussi