Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

NOUVELLE ÉCONOMIE POLITIQUE, analyse économique du vote

Une définition classique de l'économie politique est celle qu'en a donné l'un de ses pères, Adam Smith, dans La Richesse des nations (1776) : « L'économie politique, considérée comme une branche de la science d'un homme d'État ou d'un législateur, se donne deux objectifs : premièrement, de procurer aux gens revenu et subsistance, ou plus exactement de leur permettre de se procurer à eux-mêmes revenu et subsistance ; et deuxièmement de fournir à l'État un revenu suffisant pour les services publics. »

Dans cette définition, les objectifs de l'État sont bien spécifiés et font partie de la définition même de la science dite « économie politique ». Cette manière de voir est devenue partielle au fur et à mesure que la discipline s'est libérée de cette conception particulière de l'État. Le système de décision sous-jacent à cette conception ancienne de l'économie politique est rudimentaire : de même que l'ingénieur aéronautique décide de la forme d'une aile afin que l'avion puisse voler, le législateur décide des lois afin d'assurer aux individus revenu et subsistance. On appellerait plutôt maintenant « économie publique » ce que recouvre la définition de Smith.

Un des aspects novateurs de l'économie politique moderne est qu'elle incorpore à ses analyses le système de décision collectif qu'est la démocratie. L'expression « nouvelle économie politique » en est ainsi venue à désigner un ensemble de travaux dans lesquels certaines variables telles que les droits et règlements, les structures fiscales, le salaire minimum, considérées classiquement comme exogènes ou à la discrétion du décideur public, sont considérées comme endogènes, déterminées, à partir des préférences et des informations individuelles, par un mécanisme de décision collective.

Un exemple typique est celui de la détermination d'un schéma de taxation. Les taux de taxe sont décidés par la puissance publique ; l'économie politique classique va chercher à déterminer quelles sont les conséquences pour le système économique de l'adoption de tel ou tel schéma de taxation. Si un objectif social est défini, tel que l'objectif utilitariste de maximisation de la somme des utilités individuelles, l'économie politique classique pourra se donner pour but de déterminer le schéma de taxation optimal au regard de cet objectif. Prendre une telle théorie pour descriptive revient à supposer que la puissance publique agit comme un « dictateur bienveillant », dont l'objectif coïncide avec l'objectif social défini par le théoricien. La nouvelle économie politique cherche, quant à elle, à préciser tout d'abord ce qu'on entend par la puissance publique. De nombreux acteurs interviennent ici. En plus des individus qui payent les taxes et profitent des dépenses publiques, toute une série d'intermédiaires doivent être pris en compte : à différents niveaux, les hommes politiques, les fonctionnaires et divers groupes d'intérêts participent au processus, trouvant à chaque fois l'occasion de promouvoir leurs objectifs spécifiques. Étant donné cette complexité, des modèles simplificateurs seront alors recherchés, qui conservent certaines caractéristiques, supposées essentielles, du système réel de décision, et permettent cependant de dériver la décision collective à partir des préférences individuelles.

Typiquement, dans un système démocratique, un politicien ayant pour objectif d'être élu ou réélu se fera le promoteur d'un système de redistribution qui plaise au plus grand nombre. Un modèle simplificateur pourra alors partir du principe que la décision publique résulte simplement de la compétition électorale démocratique, reliant ainsi indirectement la variable publiquement décidée aux préférences individuelles.[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Pour citer cet article

Jean-François LASLIER. NOUVELLE ÉCONOMIE POLITIQUE, analyse économique du vote [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Électeur médian - crédits : Encyclopædia Universalis France

Électeur médian

Autres références

  • LE CALCUL DU CONSENTEMENT, FONDATIONS LOGIQUES DE LA DÉMOCRATIE CONSTITUTIONNELLE, James Buchanan et Gordon Tullock - Fiche de lecture

    • Écrit par Samuel FEREY
    • 1 024 mots

    Rendre compte économiquement du politique. Tel est le projet de The Calculus of Consent. Logical Foundations of Constitutionnal Democracy (Le Calcul du consentement. Fondations logiques de la démocratie constitutionnelle), un ouvrage de James Buchanan (né en 1919) et de Gordon Tullock (né en 1922)...

  • CHOIX PUBLICS ÉCOLE DES ou PUBLIC CHOICE SCHOOL, économie

    • Écrit par Samuel FEREY
    • 1 120 mots
    ...développant l'analogie entre comportements politiques et comportements économiques, l'école des choix publics a orienté ses recherches dans trois directions. La première a trait au processus de décision démocratique. Si un électeur rationnel peut classer, selon ses préférences, les propositions politiques,...
  • ÉLECTIONS - Sociologie électorale

    • Écrit par Patrick LEHINGUE
    • 5 412 mots
    • 2 médias
    ...(Michael Delli Carpini, Scott Keeter), la domination qu'exercent à compter des années 1980 en sciences politiques des schèmes d'analyse souvent importés de la science économique néolibérale est, au moins dans les pays anglo-saxons, impressionnante : ainsi, dans le New Handbook of Political Science (Oxford,...
  • MICROÉCONOMIE - Incitations et contrats

    • Écrit par Bernard SALANIÉ
    • 6 259 mots
    La solution la plus courante à cette difficulté consiste précisément à exclure a priori certaines configurations politiques. On peut ainsi supposer, en première hypothèse, que les préférences des électeurs ne sont pas parfaitement quelconques, mais qu'elles sont par exemple unimodales. On entend...

Voir aussi