CHOIX PUBLICS ÉCOLE DES ou PUBLIC CHOICE SCHOOL, économie
Née au tournant des années 1960, sous l'influence des travaux d'Anthony Downs, Gordon Tullock et James M. Buchanan (distingué par le prix Nobel d'économie en 1986), l'école des choix publics a profondément renouvelé l'étude des faits politiques. Si ses objets d'étude restent ceux de la science politique traditionnelle – l'État, les règles de vote et les élections, le phénomène bureaucratique –, son originalité tient à sa méthode, héritée de la théorie économique néo-classique traditionnelle. Elle y emprunte deux piliers méthodologiques : l'individualisme méthodologique et la théorie de l'action rationnelle. Pour expliquer les phénomènes politiques, il faut partir des comportements individuels et supposer que les agents – qu'ils soient citoyen, bureaucrate ou membre élu d'un Parlement – cherchent à agir rationnellement dans leur propre intérêt. L'école des choix publics constitue ainsi la tentative la plus aboutie d'unifier théorie politique et théorie économique.
Une analyse économique de la politique
En développant l'analogie entre comportements politiques et comportements économiques, l'école des choix publics a orienté ses recherches dans trois directions. La première a trait au processus de décision démocratique. Si un électeur rationnel peut classer, selon ses préférences, les propositions politiques, il votera pour celle qu'il préfère. Cependant, à la différence des choix effectués sur le marché, ces préférences sont agrégées selon des procédures dont il faut étudier les caractéristiques, les règles de vote.
Ainsi, en cas de « préférences unimodales » (lorsqu'une seule et unique proposition maximise la satisfaction des agents), la décision adoptée à la majorité sera toujours celle qui est préférée par l'électeur médian (« théorème de l'électeur médian »). Ce dernier partage le corps électoral en deux parties égales et fait donc basculer la majorité. Cela permet de comprendre que, dans certains systèmes politiques, les programmes politiques convergent vers le centre : les partis tentent de s'emparer de la voix de l'électeur médian.
Dans le cas général, pourtant, la règle majoritaire est extrêmement instable. Ainsi, si l'on prend le cas de trois électeurs A, B et C et de trois propositions X, Y et Z tels que A préfère X à Y et Y à Z, B préfère Y à Z et Z à X et C préfère Z à X et X à Y, le choix collectif n'est pas transitif. La proposition X est collectivement préférée à Y, qui est collectivement préférée à Z, qui est elle-même préférée à X. Paradoxalement, l'institution majoritaire, clé de voûte des démocraties contemporaines, peut donc déboucher sur n'importe quelle décision. Elle est alors sujette à de nombreuses manipulations, puisque la décision finale dépend de l'ordre dans lequel les propositions sont mises aux voix.
La deuxième direction de recherche a porté sur le comportement des instances représentatives – Parlements, Assemblées – et la possibilité que des politiques collectivement inefficaces voient le jour. A priori, de telles politiques ne peuvent obtenir la majorité : elles favorisent uniquement un petit nombre de membres de la collectivité – un groupe de pression par exemple – tout en faisant supporter leurs poids à l'ensemble du corps social. Mais, selon l'école des choix publics, il faut tenir compte des dynamiques de coalition au sein des Assemblées. Plusieurs votants peuvent échanger leur vote (logrolling) : chacun votera en faveur des propositions des autres, en échange de leur vote sur sa propre proposition. On peut ainsi expliquer l'inflation de législations produites par les instances représentatives.
La troisième direction des recherches de l'école des choix publics pointe le rôle de[...]
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Écrit par
- Samuel FEREY : enseignant-chercheur à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne
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