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NIMBĀRKA (XIIe s.)

Brahmane orthodoxe qui, né dans l'Āndhra Pradesh (pays de Haydérabad) au xiie siècle, fut d'abord un dévot de Krishna avant de devenir célèbre comme interprète du Vedānta. Ce darśana (« système de pensée » concernant les doctrines brahmaniques traditionnelles) pose en principe l'unité de l'ātman (« âme » humaine) et du brahman (l'« absolu », le principe de toutes choses). Sous sa forme la plus originale, celle que lui a donnée Śaṅkara au viiie siècle, le Vedānta est un monisme parfait (advaita-vedānta). D'autres philosophes cependant ont essayé d'atténuer cette position, notamment de manière à rendre compte de l'existence du monde, de la liberté de l'homme, etc., et à justifier la dévotion (bhakti), attitude « normale » de l'individu face à la divinité.

Ainsi Nimbārka, dans la mesure même où il vouait un culte à Krishna, tente-t-il de donner une certaine autonomie à l'ātman : car, si l'ātman n'était pas distinct du brahman, comment la dévotion pourrait-elle exister, elle qui implique un dialogue entre le fidèle et son Dieu ? Reprenant une image ancienne, Nimbārka explique que les âmes sont comme les rayons du soleil : ceux-ci sont distincts de l'astre puisqu'ils existent de façon apparemment indépendante de lui, et pourtant ils ne le sont pas non plus vraiment puisque, de toute évidence, il ne peut exister de rayon solaire sans soleil. C'est là la doctrine dite bhédâbhéda (bhēda : « distinction » ; abhēda : « non-distinction »), position subtile qui souligne la difficulté plutôt qu'elle ne la résout.

En fait, l'œuvre de Nimbārka est plus importante par ses prolongements que par sa valeur propre. De lui, en effet, dérive notamment l'œuvre de Madhva, qui fut presque son contemporain (xiiie s.) et qui n'hésita pas à franchir le pas décisif en affirmant que l'ātman est réellement distinct du brahman.

— Jean VARENNE

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Écrit par

  • : docteur ès lettres, professeur à l'université de Lyon-III

Classification

Pour citer cet article

Jean VARENNE. NIMBĀRKA (XIIe s.) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ADVAITA

    • Écrit par Jean FILLIOZAT
    • 1 551 mots
    Proche de celle de Rāmānuja, la doctrine de Nimbārka (xiie siècle) est celle du bhedābheda. Elle reconnaît, elle aussi, trois entités fondamentales : īsvara, le « Seigneur » ; cit et acit, entre lesquelles il y a à la fois distinction (bheda), puisqu'elles se manifestent différemment,...
  • BHAKTI

    • Écrit par Anne-Marie ESNOUL
    • 1 431 mots
    Nimbārka, d'origine telugu (xiie-xiiie s.), philosophe autant que mystique, s'inscrit dans la lignée de Rāmānuja, mais accentue l'aspect de complet abandon à Dieu. Rāmāṇanda, d'un bon siècle son cadet, appartient à la même tradition, tout en adressant plus particulièrement ses adorations à l'avatāra...
  • HINDOUISME

    • Écrit par Anne-Marie ESNOUL
    • 9 148 mots
    • 4 médias
    ...réformateurs vishnouites d'inspiration vedantine se sont d'ailleurs succédé pendant plusieurs siècles. L'aspect de dévotion y va toujours s'accentuant : Nimbārka (xiiie-xive s.), formé par des disciples de Rāmānuja, substitue à la bhakti la notion de prapatti, qui désigne la complète reddition entre...
  • INDE (Arts et culture) - Les doctrines philosophiques et religieuses

    • Écrit par Jean FILLIOZAT
    • 16 660 mots
    • 3 médias
    ...individuelle comme à la fois distincte et non distincte (bhedābheda) du Brahman à la façon des vagues à la fois distinctes et non distinctes de la mer. Nimbārka (xiie s.) a soutenu des vues analogues en insistant sur la dépendance des âmes par rapport à Dieu, tout en accentuant la conception de leur individualité...

Voir aussi