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MÉKONG

Les composantes sectorielles et territoriales de l'intégration durant la première décennie de la région du Grand Mékong (1992-2002)

Le président de la B.A.D., Mitsuo Sato, présentait ainsi en 1992 sa vision stratégique d'intégration régionale : « Le Mékong n'est plus un facteur de division mais un trait d'union, symbole d'un nouvel esprit de coopération. » Depuis l'implosion de l'Union soviétique en 1991, la situation géopolitique dans la péninsule indochinoise a en effet changé. La fracture sur le Mékong entre pays communistes et pays d'économie libérale, établie en 1975, tend à s'effacer. De fait, le Vietnam en 1995, puis le Laos et le Myanmar en 1997, et enfin le Cambodge en 1999 ont rejoint l'A.S.E.A.N., renforçant le pôle continental de l'organisation régionale de l'Asie du Sud-Est.

La méthode choisie croise la vision stratégique proposée par la B.A.D. avec les propositions des six pays de la région, discutées lors des trois réunions ministérielles tenues en 1992, 1993 et 1994. Ces réunions ont permis d'identifier six champs de coopération (transport, commerce, énergie, tourisme, environnement et ressources humaines) qui font l'objet de forums sectoriels annuels, et d'établir des plans de financement par projet avec les principales institutions de coopération internationale et bilatérale. Contrastant avec le Comité international du Mékong, cette approche originale ne nécessite aucun accord international fondateur entre pays membres, et n'exclut donc aucun partenaire potentiel. Elle ne crée pas non plus un nouvel échelon bureaucratique, puisque la coopération intergouvernementale est privilégiée. L'engagement de la B.A.D. a suffi pour crédibiliser cette initiative auprès des pays de la région comme des bailleurs de fonds.

Durant la première décennie de ce vaste programme d'intégration transnationale, quatre corridors routiers ont été sélectionnés. Deux corridors méridiens mettent d'abord en relation le Yunnan avec les pays du sud. Le premier, Kunming-Bangkok, se place sur l'axe méridien transasiatique Singapour-Pékin par voie continentale, et le second, Kunming-Hanoï-Haiphong, ouvre au Yunnan un accès à la mer de Chine méridionale ; il se prolonge par la route suivant le littoral vietnamien jusqu'au Cambodge. Deux corridors transversaux relient ensuite les façades orientale et occidentale de la péninsule indochinoise. Le premier, le corridor est-ouest, Danang-Sanvannakhet-Khon Kaen-Phitsanulok-Moulmein (ou Mawlamyine) relie les deux façades littorales de la péninsule et ne dessert que des villes de second rang ; en revanche le second, Hô Chi Minh Ville-Bangkok, qui doit être prolongé prochainement jusqu'à Tavoy sur la mer d'Andaman, dispose d'un plus grand potentiel puisqu'il relie les métropoles méridionales de la région. La priorité a donc été donnée à la reconstruction des infrastructures de transport routier et à la reconstitution des échanges mis à mal par le cloisonnement colonial puis par les décennies de guerre. Toutefois, le pont de l'Amitié, construit en 1994 sur le Mékong en aval de Vientiane, a montré qu'il ne suffit pas de disposer de l'infrastructure de transport pour libéraliser les échanges. Aussi, la crise asiatique de 1997 passée, la B.A.D. a-t-elle impérativement lié la reconstruction des infrastructures de transport à la conclusion d'accords de libre-échange, corridor par corridor, devançant l'accord généralisé de l'A.F.T.A. (A.S.E.A.N. Free Trade Area) qui sera effectif pour les nouveaux membres en 2010 seulement. Il aura fallu cinq années pour que ces accords soient finalisés et huit pour qu'ils soient opérationnels.

La même approche pragmatique, négociée avec les partenaires intéressés projet par projet, a été appliquée au domaine du transport[...]

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Pour citer cet article

Christian TAILLARD. MÉKONG [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Delta du Mékong - crédits : M. Gifford - De Wys Inc.

Delta du Mékong

Autres références

  • ASIE (Géographie humaine et régionale) - Dynamiques régionales

    • Écrit par Manuelle FRANCK, Bernard HOURCADE, Georges MUTIN, Philippe PELLETIER, Jean-Luc RACINE
    • 24 799 mots
    • 10 médias
    Ce projet Gange-Mékong se voulait un contrepoids à l'accord de coopération du Grand Mékong, signé en 1992 entre la Chine, pour cette même province du Yunnan, et le Laos, le Cambodge, le Vietnam, la Thaïlande et la Birmanie. Pour l'heure, la coopération économique autour du Grand Mékong progresse,...
  • CAMBODGE

    • Écrit par Philippe DEVILLERS, Universalis, Manuelle FRANCK, Christian LECHERVY, Solange THIERRY
    • 25 909 mots
    • 24 médias
    ...l'inondation recouvre pour partie les meilleures terres. Le cours du Tonlé Sap, qui récupère habituellement le trop-plein des eaux des lacs et se jette dans le Mékong, s'inverse, bloqué par les hautes eaux du Mékong. Les lacs débordent et transforment le cœur du pays en une véritable mer intérieure de 12 000...
  • ÉCONOMIE MONDIALE - 1995 : vers une redistribution des ressources mondiales

    • Écrit par Tristan DOELNITZ
    • 6 242 mots
    Un accord sur l'utilisation des eaux du Mékong a été signé le 5 avril à Chiang Rai, dans le nord de la Thaïlande, par quatre États riverains, la Thaïlande, le Vietnam, le Cambodge et le Laos. Reprenant les objectifs du Comité du Mékong constitué en 1957 par les trois pays de l'Indochine et la Thaïlande,...
  • GARNIER FRANCIS (1839-1873)

    • Écrit par Universalis
    • 842 mots

    Officier de marine, administrateur colonial et explorateur français, né le 25 juillet 1839 à Saint-Étienne, mort le 21 décembre 1873 aux portes de Hanoï.

    Fils d'un officier militaire, Marie Joseph François Garnier, dit Francis, intègre en 1856 l'École navale de Brest en dépit de l'opposition...

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Voir aussi