Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

BLONDEL MAURICE (1861-1949)

Surnaturel et autonomie humaine

Après des années de discussions souvent très vives, la plupart des objections faites à Blondel, tant au nom de la raison qu'à celui de l'orthodoxie catholique, se sont révélées caduques. L'élargissement des études théologiques vers l'exégèse, la patrologie orientale, la philosophie moderne a brisé le cercle étroit en lequel un certain thomisme scolaire s'était enfermé. Depuis 1945, la pensée contemporaine a tenté d'intégrer l'irrationnel et le vécu dans ses nouveaux courants, tels la phénoménologie, l'existentialisme et les diverses formes d'hégélianisme. Le danger serait plutôt dans une certaine dissolution de la raison, qui, n'ayant plus de norme ni d'arêtes précises, se flatte de tout accueillir, alors qu'elle n'a plus de prise. L'influence de Blondel est dès lors menacée, non plus par le rationalisme, mais par les facilités de l'irrationalisme.

S'il fallait indiquer, pour finir, la difficulté majeure de la pensée blondélienne, peut-être la trouverait-on dans l'ambiguïté du terme « surnaturel » en contexte chrétien. Ce mot semble désigner un surcroît (la grâce rédemptrice et déificatrice octroyée à la nature) et un événement (l'initiative divine manifestée par l'histoire du salut dont le Christ est le centre). Mais ce surcroît, comme cet événement, n'est assimilable que s'il est déjà en chacun le principe de tout le développement humain. Pour être véritable, une fin doit être, obscurément mais réellement, première et premièrement normative. Dieu se précède lui-même. Aussi le surnaturel historique suppose-t-il un infini présent et communiqué au principe de l'action, une « théergie » selon le mot de Blondel. Et c'est la suture, la synthèse a priori entre cette communication primordiale et le don ultérieur, qui est le point délicat du blondélisme. Mais il faut reconnaître que ce point est largement à la charge d'une certaine théologie.

— Jean TROUILLARD

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Pour citer cet article

Jean TROUILLARD. BLONDEL MAURICE (1861-1949) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • APOLOGÉTIQUE

    • Écrit par Bernard DUPUY
    • 3 535 mots
    ...Fonsegrive, Le Christianisme et la vie de l'Esprit (1899), et Ferdinand Brunetière, Raisons actuelles de croire (1900). Il n'en est pas de même chez Maurice Blondel qui, dans la Lettre sur les exigences de la pensée contemporaine en matière d'apologétique (1896), fait appel conjointement à la...
  • GUITTON JEAN (1901-1999)

    • Écrit par Gérard LECLERC
    • 734 mots

    Écrivain, philosophe, auteur d'une trentaine d'ouvrages qui regardent aussi bien la philosophie que l'exégèse ou l'autobiographie, Jean Guitton s'est inscrit tout au long du xxe siècle, comme un penseur catholique, particulièrement soucieux d'établir des liens rigoureux entre...

  • IMMANENTISME

    • Écrit par Henry DUMÉRY
    • 192 mots

    Doctrine philosophique qui rejette la transcendance, c'est-à-dire l'irréductibilité de Dieu (ou bien d'un principe du réel) à ce qui relève des pouvoirs et des limites de l'esprit. Dans ce sens, Spinoza est taxé d'immanentisme ; il conçoit Dieu comme totalement intelligible...

Voir aussi