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ANDERSON MARIAN (1897-1993)

Bien sûr, lorsqu'on évoque la contralto américaine Marian Anderson, il y a le mythe et une vie entière consacrée à la lutte pour l'égalité des droits civiques. L'Amérique d'avant guerre n'est pas tendre pour ces Noirs qui ont la témérité de revendiquer leur part de Constitution, leur morceau de ce rêve américain qui était l'espérance du monde. Imaginons ce qu'est alors la réaction de ces ligues tétanisées par un conservatisme d'un autre temps, quand une jeune Noire a les moyens et l'audace de triompher dans un répertoire qui semble réservé de toute éternité à la « race blanche ». Marian Anderson est la première de ces grandes dames noires qui ont offert à l'art lyrique de nouvelles et somptueuses couleurs. Comme Paul Robeson, elle porte le negro spiritual à un rare point de perfection. Mais, bien mieux que lui, elle impose l'évidence de sa nature et la souveraineté de son chant dans les plus belles pages de la musique occidentale. Sans elle, y aurait-il eu Leontyne Price, Grace Bumbry, Jessye Norman, Shirley Verrett ou Kathleen Battle ?

Des débuts tardifs

Marian Anderson naît à Philadelphie, le 27 février 1897 (elle affirmera toujours être née le 17 février 1902, cinq ans plus tard), dans une famille noire d'une grande pauvreté. Vers huit ans, elle apprend le piano et commence à s'accompagner. Après la mort de son père en 1910, elle est contrainte – tout en fréquentant l'école – de chanter en public pour assurer la survie matérielle du foyer. Elle commence à travailler sa voix dans sa ville natale avec Giuseppe Boghetti. On finit par remarquer les qualités naturelles de celle-ci, mais l'accès à l'Académie de musique de Philadelphie lui est refusé pour des raisons raciales. Elle a déjà vingt-quatre ans quand elle devient à New York l'élève d'Agnes Reifsnyder, qui lui inculque le style et la discipline classiques, mais Marian Anderson conservera, rançon d'études commencées tardivement, une justesse parfois instable. Dès la fin de ses études, elle remporte en 1925 un concours de chant organisé par la National Music League, ce qui lui permet de se produire le 27 août 1925, accompagnée par l'Orchestre philharmonique de New York, au Lewisohn Stadium de New York. Après des études avec Frank La Forge, elle se lance dans une série de concerts à travers les États-Unis.

Marian Anderson - crédits : Courtesy of RCA Records

Marian Anderson

Très vite, l'ampleur exceptionnelle de sa voix de contralto, la profondeur et le velouté de son timbre, la ferveur de son expression musicale lui ouvrent les portes d'une éblouissante carrière internationale : une première tournée européenne (1930-1932) avec des débuts en Grande-Bretagne au Wigmore Hall de Londres et un concert à Berlin (1930), suivie d'une seconde (1933-1934) avec un concert à Paris (1934) ; en 1935, elle donne un récital au festival de Salzbourg. Lors d'un séjour en Scandinavie en 1933, elle rend visite à Jean Sibelius, retiré dans sa maison de Järvenpää ; le compositeur finlandais, fasciné par sa voix, lui dédie le liedSolitude. C'est à cette époque qu'elle enregistre ses premiers 78-tours pour Pathé-Marconi et qu'Arthur Rubinstein, cédant à l'enthousiasme, lui offre son propre imprésario, Sol Hurok, pour organiser sa carrière. Malgré les retentissants échos d'une renommée mondiale, New York attendra 1935 pour lui proposer un premier concert, au Town Hall. Les grandes scènes lyriques américaines restent toujours fermées à cette chanteuse qui fait la gloire de l'Amérique.

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Pour citer cet article

Pierre BRETON. ANDERSON MARIAN (1897-1993) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Marian Anderson - crédits : Courtesy of RCA Records

Marian Anderson

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