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MALADIES MENTALES

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Protection de la personne et des biens des malades mentaux

Les deux principales lois qui, dans le monde, ont servi longtemps de modèle aux diverses législations furent la loi française de 1838 et la loi anglaise de 1845.

La loi française du 30 juin 1838 visait un triple objectif : prévoir dans chaque département des moyens d'hospitalisation sous forme d'asiles d'aliénés ; fixer les modalités de placement et de sortie de façon à éviter tout arbitraire, tout en protégeant efficacement la société ; protéger les biens des aliénés pendant leur internement. Malgré son archaïsme, cette loi est restée en vigueur jusqu'en 1990. Après un siècle et demi, son premier objectif n'était toujours pas atteint ; et l'on doit, sans doute, s'en féliciter. Déjà scientifiquement obsolète lorsqu'il donna lieu à des applications à la fin du xixe siècle, il était en complète contradiction avec la politique de secteur mise en place à partir des années 1960, laquelle nécessite des structures légères de soins ambulatoires, favorisant l'insertion dans le tissu social, plutôt que des asiles qui consacrent l'aliénation du patient. Les traitements sans hospitalisation ont ainsi pris le pas sur les internements de jadis. Depuis 1968, les hôpitaux psychiatriques sont eux-mêmes assimilés aux hôpitaux généraux. De ce fait, leurs médecins, naguère encore fonctionnaires départementaux, ont acquis le statut de médecins des hôpitaux. C'est la reconnaissance, pour les malades mentaux, d'un statut de « malades comme les autres ». Depuis le décret du 14 mars 1986 qui confie la gestion du secteur à l'hôpital, les centres médico-psychologiques se sont développés dans les hôpitaux généraux.

La loi du 30 juin 1838 a été abrogée par la loi du 27 juin 1990, spécialement dans le but de renforcer les garanties entourant le séjour des malades en hôpitaux psychiatriques. Le nouveau dispositif distingue les décisions d'admission et de maintien à l'hôpital du patient. L'hospitalisation peut toujours être réalisée à la demande d'un tiers et au vu non plus d'un seul, mais de deux certificats médicaux constatant le trouble mental et la nécessité de l'internement : c'est l'ancien « placement volontaire ». Cette hospitalisation doit être confirmée par un troisième avis conforme d'un médecin de l'établissement dans les vingt-quatre heures suivant l'admission. L'autre mode de placement est réalisé par un arrêté préfectoral, au vu d'un certificat médical circonstancié, lorsque le malade apparaît compromettre l'ordre public ou la sûreté des personnes : c'est l'hospitalisation d'office (ancien placement d'office). Un deuxième avis conforme est également obligatoire dans le même délai. La sortie est conditionnée par un nouvel arrêté préfectoral, faisant suite à l'avis favorable d'un médecin de l'établissement. Les conditions de traitement et d'hospitalisation des malades mentaux ont rendu l'hospitalisation sous contrainte de plus en plus rare. La quasi-totalité des malades mentaux peut aujourd'hui être traité soit dans la communauté, soit dans des hôpitaux « comme les autres ». En 1965, sur 110 000 patients en psychiatrie, moins de 15 000 étaient en hospitalisation libre, en 1991 ils étaient 50 000 sur un total de 60 000 hospitalisés. Le troisième objectif de la loi de 1838 était de protéger les biens des aliénés majeurs non interdits. Sur ce point, un progrès considérable a été accompli grâce à la loi du 3 janvier 1968 « portant réforme du droit des incapables majeurs ». Auparavant, tout malade interné voyait la gestion de ses biens confiée à un administrateur provisoire. Toute protection cessait avec la sortie de l'hôpital. Cette loi présente l'avantage de ne pas donner aux malades mentaux un statut spécial : elle concerne tous les incapables de dix-huit ans et plus, que l'incapacité soit mentale ou physique (paralysie, cécité, affaiblissement dû à l'âge,[...]

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Écrit par

  • : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
  • : psychiatre honoraire des hôpitaux, Paris, professeur émérite à l'Université libre de Bruxelles

Classification

Pour citer cet article

Encyclopædia Universalis et Paul SIVADON. MALADIES MENTALES [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 25/03/2009

Autres références

  • MALADIES MENTALES (NOSOGRAPHIE DES)

    • Écrit par
    • 876 mots

    La nosographie des maladies mentales, c'est-à-dire l'identification des signes cliniques et leur regroupement au sein d'une maladie définie, a de tout temps posé de délicats problèmes d'interprétation, eux-mêmes souvent liés aux représentations des troubles mentaux dans la société. À la fin de la Seconde...

  • ALIÉNISME (histoire du concept)

    • Écrit par
    • 1 571 mots
    ...IX (1800) de substituer à la notion de « manie », qui gardait encore le sens antique de « folie » considérée comme une perte totale de la raison, celle d'aliénation mentale, définie comme une contradiction interne entre les fonctions de l'entendement et les fonctions affectives, mais respectant au moins...
  • DÉFICIENCES MENTALES

    • Écrit par
    • 3 797 mots

    Les déficiences mentales ont été reconnues médicalement depuis le début du xixe siècle. Esquirol distinguait l'idiot, qui a toujours été pauvre en intelligence, du dément, qui a perdu tous ses moyens intellectuels (cf. démence). Ce critère départageant processus de déperdition et pathologies...

  • ÉPIGÉNÉTIQUE

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    • 5 994 mots
    • 4 médias
    La délétion de la région 15q11-q13 du bras long d’un chromosome 15, l’autre chromosome étant normal, provoque des maladies mentales chez l’enfant. En effet, cette région est soumise à l’empreinte parentale. Si le chromosome tronqué est d’origine maternelle, les enfants développeront un syndrome...
  • EXPERTISE PSYCHIATRIQUE CIVILE ET PÉNALE

    • Écrit par
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    ...matière pénale, l’expertise psychiatrique des auteurs présumés d’une infraction – délit ou crime – porte essentiellement sur le diagnostic d’une éventuelle pathologie mentale, permettant l’évaluation de la responsabilité pénale et de la dangerosité. S’il est admis que le malade mental criminel doit être soigné...
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