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RIVERS LARRY (1923-2002)

De son vrai nom Yizroch Loiza Grossberg, Larry Rivers est né en 1923 dans le Bronx. Il est mort à Southampton dans l'État de New York en 2002. Il est l'un des artistes qui stimulèrent le plus l'esprit pop sans se couler dans le moule. Il était de toute façon d'une génération antérieure, celle des néo-dadas (Johns, Rauschenberg), et n'allait pas collecter des bandes dessinées, de la publicité ou des journaux : sa banque d'images déjà faites, c'était l'histoire de l'art. Son passé de saxophoniste – Rivers est son pseudonyme de musicien – le prédestinait à l'interprétation créative, à l'improvisation sur un thème connu – à quoi l'incitait également l'enseignement du peintre Hans Hofmann qu'il suivit en 1947. Dès 1950, il vient en France pour y voir des œuvres de Bonnard et des impressionnistes, il découvre alors Courbet dont il admire Un enterrement à Ornans. À son retour et contre l'expressionnisme abstrait triomphant, il devient peintre d'histoire, connaissant le succès avec Washington traversant le Delaware (1953, Museum of Modern Art, New York). Traiter un thème réaliste, un cliché national, avec une technique expressionniste, tel fut son défi. Dans les années 1954-1955, il peint des nus comme Le Double Portrait de Birdie (1955) où l'on voit deux occurrences de la même femme âgée, sa propre belle-mère, dans sa chambre, debout ou assise sur le lit, dans un décor qui évoque Manet. Il développe avant Warhol le procédé de l'image multiple.

À la même époque, Rivers fait de la sculpture figurative dans la tradition de Rodin et de Medardo Rosso. Plus généralement, il s'appuie sur le Duchamp cubo-futuriste, dans l'esprit de la fragmentation et de la simultanéité. En 1956, il peint sa réponse à Courbet avec L'Atelier, tableau de plus de cinq mètres de long où les groupes de figures, à la fois très dessinées et estompées au chiffon, s'articulent autour d'une femme nue, réminiscence des toiles tahitiennes de Gauguin. En 1959, c'est la photographie parue dans Life du dernier soldat de la guerre de Sécession dans son cercueil qui l'inspire. Comme dans l'œuvre de Jasper Johns, le drapeau américain est un thème omniprésent chez Rivers. En 1961, il revient à Paris où il rencontre les nouveaux réalistes réunis autour de Pierre Restany. Il s'installe impasse Ronsin où il est le voisin de Niki de Saint Phalle et de Jean Tinguely. Dans Parts of the body : French Vocabulary lesson (1962), les lettres typographiques énumérant les parties du corps féminin transforment le tableau en image pédagogique – leur source est d'ailleurs un cours de dessin par correspondance –, et laisse au second plan le style, dans l'esprit du pop art. L'idée des Nanas vient d'un dessin qu'il réalise avec Niki – sa femme Clarisse enceinte – dont il trace les contours et dont elle peint l'intérieur en 1964. C'est dans son atelier qu'Yves Klein se marie le 21 janvier 1962. Avec Tinguely, Rivers compose deux tableaux représentant des paquets de cigarettes françaises et américaines que le sculpteur place sur un socle rotatif : Turning Friendship between America and France I and II.

La « manière Rivers » se met en place dans les années 1960 : coulures, pinceau nerveux, peinture d'images, esquisse, fragment. Dans Dutch Masters and Cigars III (1963), les syndics des drapiers du tableau de Rembrandt sont esquissés deux fois de part et d'autre de cigares surdimensionnés. L'itération des mêmes figures instaure la répétition mécanique de l'image sans nuire à un lyrisme toujours présent. Comme dans le collageL'Histoire de la révolution russe, de Marx à Maïakovski (1953) où il mêle peintures, objets et documents dans un joyeux capharnaüm.

Dans les années 1970, Rivers[...]

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Écrit par

  • : professeur d'histoire de l'art contemporain à l'université de Paris-X-Nanterre

Classification

Pour citer cet article

Thierry DUFRÊNE. RIVERS LARRY (1923-2002) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE (Arts et culture) - Les arts plastiques

    • Écrit par François BRUNET, Éric de CHASSEY, Universalis, Erik VERHAGEN
    • 13 464 mots
    • 22 médias
    ...héritage de Pollock ». D'autres encore se servent de la touche expressive de leurs aînés pour traiter de sujets figuratifs explicites, comme Alex Katz ou Larry Rivers à New York, ou Richard Diebenkorn et les peintres figuratifs de la baie de San Francisco (Bay Area Figurative Art). Les plus critiques...

Voir aussi