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JUSTICE Justice constitutionnelle

La structure des Cours constitutionnelles

Par Cour constitutionnelle, on doit évidemment entendre celles qui viennent d'être énumérées et qui ont été créées spécialement pour connaître du contentieux constitutionnel ; il faut cependant y ajouter celles qui, telle la Cour suprême des États-Unis, statuent également en d'autres matières, mais ont un rôle constitutionnel tout à fait comparable à celui des cours spécialisées. L'analyse de leurs structures, au demeurant, fait apparaître entre elles de nombreuses analogies, en ce qui concerne tant leur composition que le statut de leurs membres.

La composition

Les cours comprennent un nombre de membres qui varie de 9 en France et aux États-Unis à 15 en Italie et 16 en Allemagne. La fonction qu'elles exercent étant éminemment politique, il paraît logique que les autorités politiques interviennent dans le choix de leurs membres. Mais faut-il pour autant accorder à ces autorités un rôle exclusif ? Certains pays ne l'ont pas pensé : ainsi l'Italie, où, sur les 15 juges, 5 sont nommés par le président de la République et 5 élus par le Parlement, tandis que 5 autres sont désignés par les Cours suprêmes des différents ordres de juridictions ; la Cour espagnole comprend également, bien que dans une proportion moindre (2 sur 12), des juges nommés par le roi sur proposition du Conseil général judiciaire.

La solution la plus répandue est cependant la désignation de l'ensemble des juges par les autorités politiques. Il peut s'agir du Parlement seul, comme en Allemagne, où le Bundestag et le Bundesrat se partagent les nominations, et au Portugal, où 3 juges sont toutefois cooptés par les 10 juges qui ont été élus par l'Assemblée de la République. Il peut s'agir également d'un partage entre le législatif et l'exécutif, comme en France, où un tiers des juges sont nommés par le président de la République, un tiers par le président de l'Assemblée nationale, et un tiers par le président du Sénat ; aux États-Unis, tous les juges sont nommés par le président, mais avec l'assentiment obligatoire du Sénat, ce qui est d'ailleurs le cas pour tous les hauts fonctionnaires fédéraux.

Séance du Conseil constitutionnel, 2007 - crédits : Conseil constitutionnel

Séance du Conseil constitutionnel, 2007

Ces modes de désignation impliquent évidemment le risque de choix partisans, voire d'un contrôle exclusif des nominations par le ou les partis au pouvoir, et on peut dire qu'aucune cour n'y échappe totalement : aux États-Unis, par exemple, 90 p. 100 des juges qui ont siégé à la Cour suprême appartenaient au même parti que le président qui les a nommés. Pour atténuer ce risque, lorsque les juges sont élus par le Parlement, on exige souvent une majorité renforcée : c'est le cas de l'Allemagne, de l'Italie et de l'Espagne, où en pratique les principaux partis (y compris ceux qui sont dans l'opposition) se partagent les nominations.

Mais il importe surtout de veiller à ce que les critères politiques ne soient pas exclusifs et ne fassent pas perdre de vue les qualifications indispensables à un bon exercice de la fonction. C'est pourquoi la plupart des pays – mais non la France – exigent des titres de compétence juridique ou même une expérience professionnelle dans ce domaine, par exemple en qualité d'avocat, de magistrat ou de professeur de droit.

Le président de la cour est soit élu par ses pairs (Italie et Espagne), soit désigné par le chef de l'État (France et États-Unis), soit encore élu par le Parlement (Allemagne). Il joue un rôle important, car il dispose très souvent de prérogatives particulières : voix prépondérante en cas de partage, pouvoir de répartir les dossiers en vue de leur instruction, ce qui peut bien entendu avoir une influence sur la solution qui sera retenue. La marque qu'un président doté d'une forte personnalité imprime à la jurisprudence de la cour n'est jamais négligeable[...]

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Écrit par

  • : professeur émérite à l'université Paris-Sud
  • : inspecteur général honoraire de l'administration de l'Éducation nationale de la Recherche

Classification

Pour citer cet article

Francis HAMON et Céline WIENER. JUSTICE - Justice constitutionnelle [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Séance du Conseil constitutionnel, 2007 - crédits : Conseil constitutionnel

Séance du Conseil constitutionnel, 2007

Autres références

  • JUSTICE (notions de base)

    • Écrit par Philippe GRANAROLO
    • 3 431 mots

    Bien que les enfants aient aisément recours à l’idée de justice en qualifiant souvent spontanément d’« injustes » tous les interdits qui font obstacle à leurs désirs, la notion de justice est l’une des plus complexes et des plus ambiguës qui soient.

    Deux raisons principales expliquent...

  • ALTERMONDIALISME

    • Écrit par Christophe AGUITON, Universalis, Isabelle SOMMIER
    • 6 805 mots
    • 1 média
    Dans le monde anglo-saxon, en revanche, s’est développée à partir de 2003, pour finir par s’imposer, l'expression« mouvement pour la justice globale » qui met l'accent sur deux de ses caractéristiques et innovations supposées : d'une part, sa dimension transnationale ; d'autre part, son cadrage...
  • ANTIQUITÉ - Naissance de la philosophie

    • Écrit par Pierre AUBENQUE
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    ...rapport à l'infini, mais l'infini est principe pour tout le reste, qu'il « enveloppe et gouverne ». Ce « gouvernement » s'exerce dans le sens de la «  justice », c'est-à-dire de l'équilibre (ou « isonomie ») entre éléments antagonistes qui, soumis à une loi commune, tournent à l'avantage du Tout ce qui...
  • ARGENTINE

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    Mais il ne se contente pas de mesures symboliques :tout l'arsenal juridique qui protégeait les crimes commis durant la dictature est démantelé. Il décide d'une profonde réforme de la Cour suprême. La nomination des juges est désormais soumise au débat public. En outre, tous les juges en poste à son...
  • ARISTOTE (env. 385-322 av. J.-C.)

    • Écrit par Pierre AUBENQUE
    • 23 786 mots
    • 2 médias
    Le livre V est consacré tout entier à la vertu de justice. Cette vertu, qui consiste à donner à chacun son dû, peut être, dans la tradition platonicienne, définie par référence à un ordre mathématique : ainsi la justice distributive (à chacun selon son mérite) s'exprime-t-elle dans une proportion....
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Voir aussi