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MARAT JEAN-PAUL (1743-1793)

Un journaliste révolutionnaire

Jean-Paul Marat - crédits : Josse/ Leemage/ Corbis/ Getty Images

Jean-Paul Marat

Les conditions créées par la réunion des États généraux et la libéralisation au moins relative du régime de la presse devaient faire de Marat un journaliste engagé et un des théoriciens les plus écoutés de la population parisienne. Les idées politiques qu'il diffusait dans son journal, L'Ami du peuple, évoluèrent d'ailleurs à mesure que se précisaient les attaques des aristocrates, contre lesquelles il ne cessa jamais de mettre en garde, au point d'être surnommé Cassandre-Marat par son rival Camille Desmoulins. Les thèmes les plus constants dans l'œuvre de Marat journaliste ou pamphlétaire étaient un amour exclusif des masses populaires, dans lesquelles il voyait aussi bien les éléments les plus efficaces de la Révolution que ceux qui devaient en bénéficier le plus, la dénonciation constante des tendances des riches du tiers état à se réserver les profits des changements politiques et sociaux, les critiques contre les fausses idoles de l'opinion publique, en particulier Necker, puis Mirabeau et surtout peut-être La Fayette. Les idées de Marat, dispersées au jour le jour dans des articles de circonstance ou de polémique, témoignaient de la familiarité de l'auteur avec les institutions britanniques. Il était, de ce fait, un juge plus documenté et plus critique que la plupart des contemporains, les souvenirs de sa formation intellectuelle lui faisant, en outre, considérer comme un idéal possible une cité inspirée de la Sparte antique. Les appels à la vigilance de Marat contre les complots liberticides des éléments modérés contribuèrent incontestablement à faire grandir, sinon naître, cette psychose obsidionale qui allait marquer tant d'épisodes de la Révolution. Même quand il rappelait les grands événements qui avaient marqué les premières années de la crise, la nuit du 4 août ou la fête de la Fédération, Marat, tout en affirmant les aspects positifs des faits, mettait en garde contre le relâchement de la vigilance révolutionnaire qu'ils pouvaient amener. Dès les débuts de l'émigration, Marat avait souligné les risques d'une coalition des souverains pour abattre les libertés conquises ainsi que les facilités offertes aux partisans de l'Ancien Régime par la consolidation de la force armée. Il devait insister sur ce risque encore après le début des opérations si décevantes du printemps 1792. Il posait au même moment le principe de la relativité des lois, estimant que seules celles qui étaient justes étaient respectables. La véhémence de ses positions devait l'amener à se cacher pendant plusieurs semaines, mais il reparut, plus populaire, après le 10-Août qui, marquant la chute de la royauté, confirmait en somme sa théorie sur la légitimité du pouvoir insurrectionnel.

Marat, comme bien des journalistes écrivant au jour le jour et surtout soucieux d'une action immédiate, soutint souvent alors, dans L'Ami du peuple, des positions aussi véhémentes que parfois contradictoires, en raison même de l'évolution de la conjoncture politique générale. Il avait en particulier signalé, à plusieurs reprises, le danger des complots des amis de la cour, et certains lui attribuent un rôle important dans la préparation psychologique de l'insurrection du 10 août, bien qu'il n'eût pris aucune part aux délibérations qui organisèrent les modalités de l'action. Son rôle fut, en tout cas, jugé assez utile pour qu'il reçût quatre des presses prises dans les dépendances du Louvre et pût ainsi donner une plus grande diffusion à son journal ; son élection à la Convention, après qu'il eut été désigné comme adjoint au Comité de surveillance de la Commune de Paris, en fit un homme politique important. Il allait se trouver bientôt en butte aux attaques des députés plus modérés, élus principalement en province, qui devaient être par la suite connus sous le nom de Girondins[...]

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Pour citer cet article

Jean VIDALENC. MARAT JEAN-PAUL (1743-1793) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

<it>Marat assassiné</it>, J.-L. David - crédits : Sergio Anelli/ Electa / Mondadori Portfolio/ Getty Images

Marat assassiné, J.-L. David

Jean-Paul Marat - crédits : Josse/ Leemage/ Corbis/ Getty Images

Jean-Paul Marat

Autres références

  • AMI DU PEUPLE L'

    • Écrit par Pierre ALBERT
    • 380 mots

    Marat fonde, le 12 septembre 1789, Le Publiciste parisien qui prend très vite le titre plus significatif de L'Ami du peuple et la devise Vitam impendere vero (« Consacrer sa vie à la vérité »). C'est une publication de huit à seize pages de petit format, rédigée tout entière par le seul Marat,...

  • CORDAY MARIE ANNE CHARLOTTE CORDAY D'ARMONT dite CHARLOTTE (1768-1793)

    • Écrit par Jean-Michel LÉVY
    • 378 mots

    Arrière-petite-nièce de Corneille, sœur d'un officier au régiment de Normandie, Charlotte Corday quitte à vingt-trois ans le domicile paternel d'Argentan, se fixe à Caen chez une vieille parente, veuve du trésorier de France, Coutellier de Bretteville ; elle s'intéresse à la politique, s'abonne au...

  • CORDELIERS CLUB DES

    • Écrit par Jean MASSIN
    • 1 558 mots

    C'est le 27 avril 1790 que naît la Société des Amis des droits de l'homme et du citoyen tenant ses séances en l'église des Cordeliers. Avant d'abriter un club, l'église avait donné son nom à l'un des soixante districts parisiens créés en avril 1789. Le district des Cordeliers,...

  • ENRAGÉS

    • Écrit par Jean DÉRENS
    • 914 mots

    Pour Michelet, « les Enragés étaient des fanatiques d'une portée inconnue, d'un fanatisme redoutable, emportés par un souffle vague encore, mais qui allait se fixer peut-être, prendre forme, et pour une révolution en face de la Révolution ». Lyrisme un peu creux, qui fut longtemps de rigueur,...

Voir aussi