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HOLLIGER HEINZ (1939- )

Choisir un instrument aussi méconnu, malgré ses origines lointaines, que le hautbois n'est certainement pas prendre le chemin le plus sûr qui mène à la célébrité. Son répertoire soliste reste finalement bien étroit et, ignorant superbement toute la période romantique, saute d'un bond des voluptés baroques aux aventures contemporaines naissantes. Les ensembles à vent et l'orchestre des xviiie et xixe siècles ne sauraient se passer de son chant mais lui accordent rarement la vedette. Amoureux de l'une des plus riches sonorités qui soient, les hautboïstes se consacrent à la musique avec une abnégation que ne vient troubler aucun rêve de gloire. Heinz Holliger n'échappe au sort commun que par l'extraordinaire perfection de son jeu et par sa soif inextinguible d'horizons sonores nouveaux.

Il naît le 21 mai 1939 à Langenthal (Suisse). Il commence ses études musicales aux Conservatoires de Berne et de Bâle (1955-1959), où il aborde la composition avec Sándor Veress. Au Conservatoire de Paris (1962-1963), il travaille le hautbois avec Émile Passagnaud et Pierre Pierlot, ainsi que le piano avec Yvonne Lefébure. Pierre Boulez s'intéresse à ses premières compositions dès cette époque. Hautbois solo de l'Orchestre symphonique de Bâle (1959-1964), il se distingue en remportant brillamment le premier prix du concours international d'exécution musicale de Genève (1959) et le premier prix du concours de Munich (1961).

L'exceptionnel talent de Heinz Holliger est d'abord fait de maîtrise : précision et clarté absolues des attaques, phénoménale virtuosité digitale, contrôle parfait des couleurs et de l'ampleur du son. Mais que seraient toutes ces qualités sans ce phrasé qui allie simplicité de la ligne et force de la déclamation, sans cette émotion contenue qu'il faut découvrir sous la sobriété des moyens, sans cette respiration sensuelle dont il sait retrouver l'évidence. Souverain dans les concertos de Vivaldi, Bach, Albinoni, Cimarosa, Telemann ou Marcello, il se passionne aussi pour des œuvres beaucoup moins jouées, comme les Concerts royaux de Couperin, les quintettes pour piano et vents de Mozart et Beethoven, les trois Romances pour hautbois et piano de Schumann ou encore l'Introduction, thème et variations pour hautbois et orchestre de Hummel.

Conscient de la nécessité absolue d'élargir le répertoire de son instrument, Heinz Holliger joue pour le hautbois un rôle aussi important que celui de Mstislav Rostropovitch pour le violoncelle. De très nombreux compositeurs écrivent pour lui et sa femme, la harpiste Ursula Holliger : André Jolivet (Controversia pour hautbois et harpe, 1968), Edison Denisov (Romantic Music pour hautbois, harpe et trio à cordes, 1969 ; Double Concerto pour hautbois, flûte et orchestre, 1970 ; Concerto pour hautbois, 1988), Franck Martin (Trois Danses pour hautbois, harpe et orchestre, 1970), Hans Werner Henze (Doppio Concerto, 1966), Klaus Huber (Noctes intelligibilis lucis pour hautbois et clavecin, 1961), György Ligeti (Double Concerto pour flûte, hautbois et orchestre, 1972), Isang Yun (Double Concerto, 1977 ; Sonate pour hautbois et harpe, 1979 ; Concerto pour hautbois, 1991), Brian Ferneyhough (Coloration, 1972), Witold Lutoslawski (Double Concerto pour hautbois, harpe et orchestre, 1980), Paul Heinz Dittrich (Concert avec plusieurs instruments no 3, 1979), Toru Takemitsu (Eucalypts 1, 1970 ; Eucalypts 2, 1971 ; Distance, 1973), Elliott Carter (Trilogy, pour hautbois et harpe, 1992 ; Oboe Quartet, pour hautbois et cordes, 2001), mais aussi Gilbert Amy, György Kurtág, Luciano Berio, Milko Kelemen, Vinko Globokar, Niccolo Castiglioni, Krzysztof Penderecki et Karlheinz Stockhausen. Tout ce répertoire — ainsi que le concerto de Bruno Maderna qu'il inscrit souvent au programme de ses concerts —, il le défend avec un grand engagement personnel. [...]

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Pour citer cet article

Pierre BRETON. HOLLIGER HEINZ (1939- ) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • HAUTBOIS

    • Écrit par Juliette GARRIGUES
    • 765 mots
    • 4 médias
    La Sequenza VII de Luciano Berio (1969), dédiée au prodigieux hautboïste Heinz Holliger, représente une recherche tout à fait à part : le compositeur fait dialoguer dans une sorte de polyphonie le son de l'interprète (souffle, petites déclamations de la voix, claquement des lèvres...) avec celui...

Voir aussi