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HALLUCINATIONS

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Évolution et thérapeutique

Onirisme et psychoses

Quelles que soient leurs variétés séméiologiques, les troubles psychosensoriels s'inscrivent, schématiquement, dans la double perspective évolutive suivante : tantôt les symptômes sont ceux d'un état hallucinatoire aigu ; tantôt ils sont liés à une perturbation durable. Dans la première hypothèse, il s'agit en général d'onirisme. L'onirisme est fait de visions et de scènes hallucinatoires complexes qui sont projetées par le patient, à la façon d'un « rêve vécu », dans son champ spatial environnant. Ses contenus se détachent sur un fond d'obnubilation psychique. Ils comportent une forte charge anxieuse, entraînant des activités motrices ou verbales tumultueuses. Parfois, la bouffée confuso-onirique survient de façon inopinée, sans cause apparente. Habituellement, elle est occasionnée par une intoxication, un traumatisme, un état infectieux. Le plus souvent, elle se dissipe sans laisser de traces.

À l'inverse, dans la seconde hypothèse (au cours des psychoses hallucinatoires chroniques et des schizophrénies), les troubles psychosensoriels sont liés à une profonde altération de la personnalité, dont ils jalonnent l'évolution morbide. C'est ainsi qu'au début, par exemple, d'un syndrome discordant, on observe surtout des hallucinations élémentaires et des manifestations d'automatisme mental qui mettent en échec le sentiment d'autonomie de la personne. Puis, pendant de nombreuses années, les hallucinations sont franches, souvent polarisées selon un système antagoniste (persécution-consolation). Simultanément on note les attitudes de défense et la désignation des persécuteurs. Lorsque l'activité hallucinatoire poursuit son « activité dissociative » (A. Porot), il n'est pas rare que les thèmes de mégalomanie fassent leur apparition. Enfin, en période d'involution, le délire hallucinatoire s'amenuise : c'est là le mode de résolution habituel des psychoses schizophréniques.

Le traitement

Il semble bien que les thérapeutiques anciennes (sédatifs et calmants, hydrothérapie et physiothérapie, thérapeutiques suggestives) restaient sans grand effet face à la prégnance des structures perceptives hallucinatoires. Plus tard, les méthodes de choc permirent des résultats plus sensibles et surtout plus sélectifs, comme le prouvent l'efficacité remarquable de la sismothérapie sur les accès confuso-oniriques et l'atténuation habituelle des surcharges hallucinatoires chez les délirants chroniques soumis à l'insulinothérapie.

Mais, surtout, les découvertes de la pharmacologie moderne ont conduit à des constatations saisissantes, depuis que l'on étudie de façon systématique les drogues dites hallucinogènes et hallucinolytiques.

Le terme d'hallucinogène a été proposé par A. Hoffer et H. Osmond en 1954, pour désigner des substances (certaines ont été isolées depuis peu, d'autres sont connues de longue date) capables d'introduire quasi instantanément le sujet dans un système de relations psychosensorielles fait de sa propre altérité dissociée. On peut citer la mescaline, le L.S.D., la taxaréine, ainsi que certaines substances dérivées de l'adrénaline ou du tryptophane.

Les hallucinolytiques sont des antagonistes des hallucinogènes ; leur « chef de file », la chlorpromazine, a été découvert en 1952, bientôt suivi d'un grand nombre d'autres produits généralement désignés sous le nom de neuroleptiques ; les uns sont capables de réduire l'impétuosité des paroxysmes oniriques ; les autres sont efficaces sur l'activité hallucinatoire rebelle des psychoses chroniques au point d'entraîner une transformation radicale du vécu asilaire et des possibilités de réadaptation.

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Écrit par

  • : ancien directeur du Laboratoire pathologique de la Sorbonne, médecin-chef à l'hôpital psychiatrique de Bonneval, professeur à l'université de Paris-V

Classification

Pour citer cet article

Henri FAURE. HALLUCINATIONS [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Média

Vision de Milton de sa seconde femme, J. H. Füssli - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Vision de Milton de sa seconde femme, J. H. Füssli

Autres références

  • BION WILFRED R. (1897-1979)

    • Écrit par
    • 4 827 mots
    ...hallucinose s'appliquent au fonctionnement de la personnalité psychotique tel que le conçoit Bion. Dans un tel cadre, ce dernier décrit, à côté des hallucinations franches bien connues (visuelles, auditives, olfactives, gustatives ou tactiles), des hallucinations « fugaces » ou « évanescentes » et...
  • CONFUSION MENTALE

    • Écrit par
    • 2 014 mots
    ...images oniriques défilent en une succession discontinue ou s'ordonnent en un enchaînement scénique dont la thématique tour à tour le captive ou le terrifie. Le monde extérieur sert de support aux projections hallucinatoires, mais surtout, mal perçu, déformé, il concourt à dramatiser l'ambiance ; les voix sont...
  • ÉPILEPSIE

    • Écrit par et
    • 6 164 mots
    • 3 médias
    ...de micropsie, de macroacousie ou de microacousie, suivant qu'un objet ou un son paraît soudain plus grand ou plus petit, plus fort ou assourdi), ou par un état hallucinatoire (perceptions sans objet), au cours duquel, par exemple, le sujet croit voir ou entendre, dans leurs moindres détails, une scène...
  • HALLUCINOGÈNES, littérature

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    • 1 média

    « Je comparerai », dit Baudelaire dans Du vin et du haschisch (1851), « ces deux moyens artificiels, par lesquels l'homme exaspérant sa personnalité crée, pour ainsi dire, en lui une sorte de divinité. » Pour Baudelaire, à ce moment, la différence entre les deux substances est assez radicale...

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