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GOUVERNEMENT

La responsabilité du gouvernement

« Les ministres sont solidairement responsables devant les chambres de la politique générale du gouvernement... » Ainsi s'exprimait l'article 6 de la Loi constitutionnelle française du 25 février 1875. Énoncé de cette manière ou selon une autre rédaction, le principe de la responsabilité du gouvernement est clair : le Parlement a le droit de mettre fin aux fonctions du gouvernement ; en contrepartie, le gouvernement a l'obligation de bénéficier de la confiance du Parlement.

Les mécanismes de la responsabilité

L'énoncé du principe de la responsabilité ne suffit pas à régler toutes les questions.

Il importe de savoir devant qui le gouvernement est responsable. Lorsque le Parlement est composé d'une seule assemblée, ce qui est le cas dans les pays nordiques, il est évident que la solution s'impose d'elle-même. Lorsque au contraire, il existe deux assemblées, comme en France, en Allemagne, au Royaume-Uni, en Belgique, en Italie, en Espagne ou aux Pays-Bas, il importe de savoir si la responsabilité s'exerce devant les deux assemblées ou devant l'une d'entre elles seulement. Dans la plupart des pays, les Constitutions prévoient que la responsabilité ne fonctionne que devant la chambre élue au suffrage universel direct. La seconde assemblée, qu'elle soit baptisée Chambre des lords, Sénat ou Bundesrat, ne détient pas, en général, la possibilité de renverser le gouvernement. Cela découle de la nature différente des deux assemblées : la première, Chambre des députés ou Assemblée nationale, exprime directement la volonté des électeurs, tandis que la seconde exprime fréquemment la volonté des États fédérés au sein d'une fédération ou, plus généralement, des collectivités territoriales de base. En Italie, en revanche, il est explicitement prévu que le gouvernement doit bénéficier de la confiance des deux chambres, ce qui repose sur une très faible différenciation entre la Chambre des députés et le Sénat.

Il est essentiel que soient définis des mécanismes très précis de responsabilité, que celle-ci soit actionnée par le gouvernement lui-même – lorsqu'il pose une question de confiance – ou par les membres de l'assemblée pertinente lorsqu'ils veulent émettre un vote de défiance, en particulier à travers le dépôt et le vote d'une motion de censure. De plus en plus, les Constitutions contemporaines décrivent de façon minutieuse les conditions dans lesquelles le gouvernement peut mettre en jeu sa responsabilité, ou selon lesquelles les députés sont habilités à la provoquer. Il s'agit d'éviter que des mécanismes trop souples ou trop rapides ne conduisent à des mises en jeu répétées de la responsabilité, voire à des votes successifs de défiance, ce qui, à terme, conduit à affaiblir le système constitutionnel lui-même et peut déboucher sur une véritable crise politique, comme ce fut le cas en France sous la IVe République et comme le vit aujourd'hui l'Italie.

Une solution très perfectionnée se trouve dans la Constitution allemande, qui prévoit ce qu'il est convenu d'appeler « la motion de défiance constructive ». Lorsqu'il souhaite renverser le gouvernement, le Bundestag doit en effet, à la majorité absolue de ses membres, élire en même temps un nouveau chancelier, qui sera chargé de constituer le nouveau gouvernement. Il ne peut donc pas y avoir de vacance du pouvoir entre l'ancien et le nouveau gouvernement.

Sans aller aussi loin, le système de l'article 49 de la Constitution française prévoit que la motion de censure doit être votée à la majorité absolue des membres composant l'Assemblée nationale, constatant ainsi qu'il existe une majorité de rechange contre la majorité qui avait jusqu'alors soutenu le gouvernement.

En général, les Constitutions[...]

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Écrit par

  • : ancien conseiller d'État, ancien président du tribunal constitutionnel d'Andorre, président émérite de l'Association internationale de droit constitutionnel

Classification

Pour citer cet article

Didier MAUS. GOUVERNEMENT [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Hirohito au Parlement - crédits : Keystone/ Hulton Archive/ Getty Images

Hirohito au Parlement

Lionel Jospin - crédits : Pierre Boussel/ AFP

Lionel Jospin

Autres références

  • ACTE DE GOUVERNEMENT

    • Écrit par F. LAMOUREUX
    • 645 mots

    Certaines décisions de l'exécutif échappent à tout recours devant quelque juridiction que ce soit et constituent cette catégorie très particulière d'actes de l'autorité publique qu'on appelle « actes de gouvernement ».

    L'immunité juridictionnelle de ces actes est...

  • ALLEMAGNE (Politique et économie depuis 1949) - République fédérale d'Allemagne jusqu'à la réunification

    • Écrit par Alfred GROSSER, Henri MÉNUDIER
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    Les constituants ont voulu assurer la stabilité gouvernementale, tout en faisant du chef de l'exécutif l'émanation de l'Assemblée. Le chancelier est élu, sans débat, à la majorité absolue. Jusqu'ici, il n'y a jamais eu échec du candidat proposé par le président. La marge la plus étroite a été celle...
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    Malgré la séparation des pouvoirs, le gouvernement fédéral (formé des ministres fédéraux et du chancelier fédéral, qui le dirige) entretient des liens très étroits avec les autres organes de l’État.
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    • Écrit par Pierre AUBENQUE
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    ...extrême de la tyrannie, le commandement politique diffère du rapport de maître à esclave, car il s'adresse à des hommes libres. En droit, le meilleur gouvernement est la monarchie, c'est-à-dire une forme de gouvernement analogue au commandement que, dans l'ordre domestique, le père exerce sur les enfants....
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