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TRUFFAUT FRANÇOIS (1932-1984)

François Truffaut - crédits : Santi Visalli/ Getty Images

François Truffaut

Trente ans après sa disparition, à l’âge de cinquante-deux ans, le nom de François Truffaut demeure un des plus connus et des plus révérés du cinéma français. Aux États-Unis, on parle d’une Truffaut’stouchcomme il y eut une Lubitsch’stouch et La Nuit américaine, oscar du meilleur film étranger en 1974, y a obtenu un énorme succès. Truffaut a également marqué nombre de jeunes cinéastes de l’Europe de l’Est d’avant la glasnost, aussi bien qu'un Iranien tel qu’Abbas Kiarostami ou encore les nouveaux réalisateurs des années 1970-1980 de Corée, Hong Kong ou Taïwan. À la mort du cinéaste, le grand quotidien japonais Asahi Shimbun parlait d’« un style propre que l’on pourrait appeler “le monde Truffaut” ».

En France, sa mort brutale – le 21 octobre 1984 – en a fait un mythe, à mi-chemin entre Jean Vigo et James Dean. En 1981, Truffaut remporte dix césars pour Le Dernier Métro, mais, deux ans plus tard, son dernier film, Vivement dimanche !, « un film du samedi soir conçu pour faire plaisir », est accueilli fraîchement. En fait, le cinéaste, chef de file de la nouvelle vague, pâtira toute sa vie de la comparaison avec Jean-Luc Godard, le moderne, l’inventeur d’un nouveau langage cinématographique. Truffaut, lui, utilise sans cesse des formes, des types de récits classiques, mais c’est pour leur donner une vie et un sens nouveaux. Il n’est pas seulement un auteur parce que, depuis Les 400 Coups, il nourrit son œuvre de sa vie, mais parce que son œuvre constitue un monde cohérent, aussi bien dans ses thèmes que dans son écriture.

« La vie, c’était l’écran »

François Truffaut - crédits : Hulton-Deutsch Collection/ Corbis Historical/ Getty Images

François Truffaut

François Truffaut est né le 6 février 1932, à Paris, de père inconnu. Sa mère, Janine de Montferrand, secrétaire-dactylo à L’Illustration, doit accoucher en secret. Roland Truffaut, architecte-dessinateur, épouse Janine et donne son nom à l’enfant. D’abord élevé par ses grands-parents, François se retrouve à dix ans à Paris, entre une mère qui ne lui demande que de se faire oublier et un père surtout préoccupé d’alpinisme. La lecture, d’abord avec la collection des Petits Classiques Fayard, puis à travers Balzac, Proust, Cocteau, Céline, Léautaud et Genet, lui sert de refuge. Ce qui vaut encore plus pour le cinéma, où il se rend en cachette et pour lequel il sèche les cours avec son camarade Robert Lachenay. Dans ces conditions, sa scolarité, désastreuse, est ponctuée de fugues, de mensonges et de petits larcins. À quatorze ans, il quitte l’école pour « vivre sa vie ». Mais pour lui, « la vie, c’était l’écran » et ce le sera toujours.

En 1948, à la suite de dettes et de malversations entraînées par le ciné-club que le futur réalisateur vient de fonder, Roland Truffaut le fait placer dans un centre pour mineurs délinquants. Heureusement, François Truffaut a rencontré André Bazin, critique déjà réputé, qui le prend sous son aile et qui le sortira d’une situation encore bien pire : la prison militaire, après une déception amoureuse, qui l’a fait s’engager puis déserter en pleine guerre d’Indochine. André Bazin le pousse à écrire afin de canaliser son excès de passion, voire de haine. Et lorsque Bazin participe à la création des Cahiers du cinéma en 1951, François Truffaut en sera. Il fera partie du noyau actif regroupé derrière Maurice Schérer (Éric Rohmer), avec Jacques Rivette, Jean-Luc Godard, Claude Chabrol – ceux que Bazin appellera « hitchcocko-hawksiens », en référence à deux de leurs maîtres, Alfred Hitchcock et Howard Hawks. Leurs armes critiques sont la suprématie de la mise en scène sur le sujet et la politique des auteurs (« il n’y a pas d’œuvres. Il n’y a que des auteurs », écrit Jean Giraudoux). À vingt-deux ans, Truffaut devient célèbre en publiant « Une certaine tendance du cinéma français » (Cahiersducinéma, n° 31, janvier 1954), un brûlot[...]

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Écrit par

  • : critique et historien de cinéma, chargé de cours à l'université de Paris-VIII, directeur de collection aux Cahiers du cinéma

Classification

Pour citer cet article

Joël MAGNY. TRUFFAUT FRANÇOIS (1932-1984) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

François Truffaut - crédits : Santi Visalli/ Getty Images

François Truffaut

François Truffaut - crédits : Hulton-Deutsch Collection/ Corbis Historical/ Getty Images

François Truffaut

Marie-France Pisier - crédits : P.P. Film Polski/ Coll. Tout le cinéma/ D.R.

Marie-France Pisier

Autres références

  • LES QUATRE CENTS COUPS, film de François Truffaut

    • Écrit par Michel MARIE
    • 944 mots

    Contre toute attente, ce premier long-métrage de François Truffaut (1932-1984) se voit sélectionné pour le festival de Cannes, en 1959. De plus, il y remporte le prix de la mise en scène. À vingt-six ans, Truffaut, critique et redoutable polémiste, est cependant loin d'être inconnu. Il a violemment...

  • CAHIERS DU CINÉMA

    • Écrit par Jean-Louis COMOLLI
    • 1 152 mots
    • 1 média

    La plus ancienne et la plus connue des revues de cinéma paraissant en France. Son ancienneté même et la diversité des tendances critiques qui s'y sont succédé rendent difficile toute description (et a fortiori tout jugement) synthétique. La caractéristique la plus constante de la revue est peut-être...

  • CINÉMA (Aspects généraux) - Histoire

    • Écrit par Marc CERISUELO, Jean COLLET, Claude-Jean PHILIPPE
    • 21 694 mots
    • 41 médias
    ...tous les moyens. Ils parviennent à réaliser leurs premières œuvres avec des budgets dérisoires : Le Beau Serge de Chabrol (1958) ; Les 400 Coups de Truffaut (1959) ; À bout de souffle de Godard (1960) ; Lola de Demy (1960). Agnès Varda avait été la première à tourner un film à petit budget, en...
  • CINÉMA (Aspects généraux) - La cinéphilie

    • Écrit par Marc CERISUELO
    • 4 018 mots
    ...délibérément le premier contre le second et instaure une rhétorique du dénigrement – souvent justifié – qui sera reprise telle quelle trente ans plus tard par François Truffaut quand il s'en prendra à « Une certaine tendance du cinéma français ». Le plus étonnant est de voir ce type de discours s'amplifier...
  • CRITIQUE DE CINÉMA

    • Écrit par Joël MAGNY
    • 5 004 mots
    • 1 média
    ...d'auteur au cinéma, on l'a vu, n'est pas nouveau. C'est le rôle capital que lui donnent les futurs acteurs de la nouvelle vague qui est cette fois décisif. Dans « Une certaine tendance du cinéma français » (Cahiers du cinéma, n0 31, janvier 1953), François Truffaut s'attaque à un cinéma de scénaristes...
  • Afficher les 20 références

Voir aussi