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FALACHAS

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Des origines entre légende et histoire

Quant à l'histoire, Friedmann cherche habilement à se rapporter aux diverses opinions sur la question controversée des origines des Falachas. La tradition amharique et la tradition des Juifs éthiopiens font référence au roi Salomon (972 env.-env. 932 av. J.-C.) et à la séduction déployée par la reine de Saba pour expliquer l'origine des dynasties et l'ensemble historico-culturel de l'Éthiopie. Une incertitude pèse sur l'identification de la reine et aussi sur celle de la ville et du royaume qui portent le même nom, Saba. Une théorie a placé les trois dans l'Est, entre les très anciens peuples sabéens du Yémen, une autre, remarquablement présentée par David Kessler dans The Falashas, dans le Nord, vers la ville de Méroé, dans la région du Soudan connue sous l'ancien nom de Kouch. À la période de l'Exil remonteraient les traditions concernant la tribu perdue d'Israël dont le lieu d'arrivée est associé à Kouch et à l'Éthiopie, selon l'argumentation proposée par le voyageur juif du ixe siècle Eldad Hadani. Ses déclarations, jointes à l'attestation d'un rabbin égyptien du xve siècle, ont servi de base à la reconnaissance officielle de la judaïcité des Falachas par le rabbinat d'Israël en 1973, permettant ainsi leur immigration légale en Israël, mais au prix d'un humiliant rituel, semblable à une conversion, qui a été abrogé par la suite.

Maintenant, des preuves archéologiques, épigraphiques et anthropologiques existent, qui montrent l'origine sudarabique du peuplement sémitique de l'Éthiopie et associent l'histoire de la région à celle de l'Arabie. La provenance sudarabique est attestée par la toponymie ainsi que par des formes de cultes et de technologies, par des techniques militaires et par l'emploi de quelques plantes alimentaires. Dès le ve siècle avant J.-C., entre les deux rives de la mer Rouge circulent les Sabéens et les Éthiopiens avec leurs marchandises. Le royaume d'Axoum, ancêtre de l'Éthiopie, surgit au ier siècle avant J.-C. dans une situation de pluralisme culturel. Néanmoins, la présence juive au Yémen, au Soudan et en Égypte se heurte à la thèse de l'appartenance des anciens Falachas à la population locale agaw, un des piliers de la civilisation d'Axoum. Cette population parlait une langue du groupe africain dit couchitique qui, en Éthiopie, a reculé devant l'expansion du groupe sémitique, principalement représenté par la langue éthiopienne classique, le guèze, dont la formation structurée daterait du ive siècle ; elle est presque contemporaine de la christianisation de l'Éthiopie et de deux siècles antérieure à la christianisation officielle des royaumes qui ont continué la vie cosmopolite de Méroé. Vers le iiie siècle, dans le sillage de la conquête de l'Arabie du Sud par les rois d'Axoum, d'étroites relations reprennent entre les deux bras de la mer Rouge. Au même moment, la tribu de Himyar affirme progressivement son autorité sur toute l'Arabie du Sud. Il est notoire que dans ces territoires, comme dans ceux qui furent soumis d'abord à la domination romaine et ensuite à la domination gréco-byzantine, le judaïsme a été prosélyte. La présence de communautés christiano-juives dans la péninsule arabique et au Moyen-Orient a été rappelée dans l'ouvrage de vulgarisation Les Falasha, dû à Bernard Nantet pour le récit historique et à Édith Ochs pour l'intégration en Israël. Elle donne à réfléchir sur la pénétration en profondeur d'idées monothéistes et de pratiques qui semblent dérivées de prescriptions religieuses du Pentateuque, antérieures à la compilation du Talmud et de la Thora et abandonnées par le judaïsme. Enfin, au vie siècle, le royaume d'un roi juif du Yémen est détruit[...]

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Écrit par

  • : chercheur-professeur au département d'études politiques de l'université de Catane, Italie

Classification

Pour citer cet article

Vittorio MORABITO. FALACHAS [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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Autres références

  • AFRIQUE (Structure et milieu) - Géographie générale

    • Écrit par
    • 21 496 mots
    • 29 médias
    ...du Nord ont gagné la France dans le flux de retour des pieds-noirs (années 1960) ou se sont installés en Israël. De même, il ne reste que très peu de Falachas, communauté de juifs noirs aux origines obscures qui vivaient en Éthiopie dans la région de Gondar : ils ont été transférés en Israël...