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ÉDUCATION Économie de l'éducation

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Les effets de l'éducation

Les effets de l'accumulation de capital humain sur les revenus du travail et la croissance

La formulation de la théorie du capital humain s'est dès l'origine accompagnée d'une tentative de vérifier l'hypothèse centrale selon laquelle les travailleurs les plus éduqués perçoivent des revenus plus élevés du fait de leur plus forte productivité. Dès 1958, Jacob Mincer déduit d'un modèle théorique d'investissement en capital humain une équation empirique très simple selon laquelle les revenus du travail d'un individu dépendent de son nombre d'années d'études et de son nombre d'années d'expérience professionnelle. Dans cette équation, appelée « fonction de gains du capital humain », l'effet de l'éducation sur les revenus du travail peut s'interpréter comme le rendement de l’investissement en capital humain fait dans le système d'enseignement. Des centaines d'articles, portant sur tous les pays pour lesquels les données individuelles nécessaires existent, ont été publiés qui utilisent cette équation. Presque tous ces articles font état d'un effet positif et significatif de l'éducation sur les revenus du travail : c'est l'un des faits empiriques les mieux établis de la science économique.

Dans les pays développés, où l'enseignement primaire et une partie de l'enseignement secondaire sont obligatoires, l'attention des économistes s'est concentrée sur les rendements des études supérieures. Ces rendements évoluent dans le temps et ne sont pas les mêmes pour tous les travailleurs. Par exemple, si l'accès à l'université se démocratise rapidement alors que la création d'emplois qualifiés suit un rythme inférieur, la surabondance relative de diplômés peut entraîner une baisse du rendement des études supérieures. Les difficultés d'insertion sur le marché du travail que connaissent les diplômés des universités françaises depuis le début des années 1990 peuvent se comprendre ainsi. Par ailleurs, des rendements de l'éducation systématiquement plus faibles pour les membres de minorités ethniques que pour le reste de la population (ou pour les femmes comparées aux hommes) peuvent être le signe de discriminations sur le marché du travail.

Dans les pays en développement où l'enseignement primaire n'est pas universel, les rendements de l'éducation sont généralement les plus élevés à ce niveau, et décroissent ensuite, si bien qu'ouvrir de nouvelles écoles paraît plus rentable que de créer des universités. Depuis les années 1980, sous l’influence des agences d’aide au développement, de nombreux pays ont ainsi réorienté leurs politiques éducatives en faveur de l’enseignement primaire, non sans effets pervers. L'enseignement supérieur a été affaibli, et certains pays n'ont plus la capacité de former correctement leurs professeurs du primaire et du secondaire.

L'effet de l'éducation d'un individu sur ses revenus devrait se traduire au niveau des pays par un effet sur la croissance économique. Les modèles théoriques dits de « croissance endogène » développés dans les années 1980 et 1990 à partir des travaux de Robert Lucas (Prix Nobel 1995) et Paul Romer insistent d'ailleurs sur le rôle de l'éducation comme facteur d'innovation et de progrès technique et, donc, de croissance. Il s'est longtemps révélé difficile d'identifier cet effet à l'aide des données en comparaison internationales disponibles, qui mesuraient la quantité d'éducation (taux de scolarisation ou nombre moyen d’années d'études des adultes). Il est d’ailleurs possible que, dans certains pays, les progrès de la scolarisation aient réellement échoué à stimuler la croissance, faute de politiques économiques adéquates[...]

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Pour citer cet article

François LECLERCQ. ÉDUCATION - Économie de l'éducation [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 04/09/2013

Autres références

  • ÉDUCATION / INSTRUCTION, notion d'

    • Écrit par
    • 1 299 mots

    On pourrait penser, dans un premier temps, que les rapports entre « éduquer » et « instruire » sont simples à établir. Si l'on se réfère à la définition qu' Emmanuel Kant donne de l'éducation, à la fin du xviiie siècle, l'instruction apparaît, à côté « des soins, de...

  • AFGHANISTAN

    • Écrit par , , , , , , et
    • 37 316 mots
    • 19 médias
    Par ailleurs, les politiques publiques, largement imposées de l'extérieur, sont irréalistes dans leur définition. Ainsi, l'éducation est l'un des seuls domaines où le ministère afghan est un acteur central, notamment parce qu'il gère le personnel. Pourtant, la stratégie, définie par les organisations...
  • ALPHABÉTISATION

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    ...marchands. En France, l'écriture de la langue française et l'invention de l'imprimerie vont rendre définitive la sécularisation de la culture écrite. C'est autour des xvie et xviie siècles qu'une demande d'école, émanant des communautés urbaines et parfois rurales, s'affirme. Dès lors, l'histoire...
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    Éducateur britannique, headmaster (directeur) de la célèbre public school de Rugby, Thomas Arnold exerça une forte influence sur l'éducation privée en Angleterre. Il était le père du poète et critique Matthew Arnold.

    Né le 13 juin 1795 à East Cowes, sur l'île de Wight, Thomas Arnold fait...

  • ART (Aspects culturels) - La consommation culturelle

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    ...tient les goûts en matière de culture légitime pour un don de la nature, l'observation scientifique montre que les besoins culturels sont le produit de l' éducation : l'enquête établit que toutes les pratiques culturelles (fréquentation des musées, des concerts, des expositions, lecture, etc.)...
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