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ÉCONOMIE (Histoire de la pensée économique) Marxisme

La péréquation du taux de profit

Les prix de production

En fait, Marx élabore la péréquation du taux de profit pour répondre à un autre problème, posé par la concurrence entre les capitaux. Un capital n'est motivé que par les profits qu'il peut réaliser. Et, pour un montant de capital donné, les profits ne dépendent que du taux de profit, si bien qu'un capital se déplace là où il estime que le taux de profit est le plus élevé. Or si la norme était que les marchandises s'échangent à valeur égale, alors, pour un même montant de capital et pour un même degré d'exploitation, ce seraient les activités à faible composition organique qui auraient les plus forts taux de profit, puisque ce sont elles qui produisent le plus de valeur :

En conséquence, les capitaux se déplaceraient vers les activités à faible composition organique – à faible productivité –, et leurs mouvements seraient contraires au développement des forces productives.

C'est pourquoi Marx affirme que, dans le capitalisme, la norme de l'échange n'est pas la valeur, mais le prix de production. Cette norme est telle que, quels que soient leur montant, leur composition organique et leurs activités, tous les capitaux réalisent un même taux de profit : le taux général de profit. Ce taux est le taux moyen de l'ensemble des capitaux, calculé en valeur. Avec le même exemple numérique que ci-dessus, le taux général de profit (r*) est :

Π1 = 100 + (0,175 (100) = 117,5,

Π2 = 100 + (0,175 (100) = 117,5.

Les échanges s'effectuant à ces prix, le capital investi dans l'activité 1 vend à un prix de production Π1 = 117,5, alors qu'il a produit M1=110 de valeur, soit un gain de 7,5. Et le capital investi dans l'activité 2 vend à un prix de production Π2 = 117,5, alors qu'il a produit M2=125 de valeur, soit une perte de 7,5. Au total, le premier capte 7,5 de la valeur produite par le second.

Mais les prix de production ne sont qu'une norme autour de laquelle les prix de marché fluctuent selon l'offre et la demande. Si le prix de marché d'une activité est inférieur à son prix de production et, donc, son taux de profit effectif inférieur au taux moyen, cela implique que les prix de marché de quelques autres activités sont supérieurs à leur prix de production et leurs taux de profit effectifs supérieurs au taux moyen. En conséquence, des capitaux quittent la première activité pour s'investir dans les secondes. L'offre de la première décroît, ce qui pousse à la hausse son prix de marché, tandis que les offres des secondes s'accroissent, ce qui tend à tirer à la baisse leur prix de marché.

Ce même mécanisme explique aussi ce qui incite un capitaliste à développer les forces productives. Soit un capitaliste produisant 2 unités d'une marchandise avec un montant de capital productif de 100. Supposons qu'un autre découvre une technique plus performante permettant d'en produire 3 avec 100, que le prix d'une unité se fixe à 60 sur le marché et que le taux moyen de profit soit de 30 p. 100. Le premier vend alors pour 120, soit un taux de profit effectif de 20 p. 100, et le second vend pour 180, soit un taux de 80 p. 100. Le premier a donc intérêt à abandonner sa technique pour investir dans la plus performante.

Le débat sur la transformation des valeurs en prix de production

La péréquation du taux de profit, alias la transformation des valeurs en prix de production, est la thèse de Marx qui a été la plus controversée. Le débat commence dès 1885, lors de la publication par Engels du livre III du Capital. Mais il prend véritablement tournure en 1907 avec la contribution de Ladislaus von Bortkiewicz, qui dit rectifier une erreur commise par Marx dans l'exposé de la péréquation. Il resurgit après la Seconde Guerre mondiale et se nourrit de la thèse d'un[...]

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Écrit par

  • : docteur d'État en sciences économiques, professeur des Universités

Classification

Pour citer cet article

Michel ROSIER. ÉCONOMIE (Histoire de la pensée économique) - Marxisme [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Karl Marx - crédits : Courtesy of the trustees of the British Museum

Karl Marx

Les Temps modernes, C. Chaplin - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Les Temps modernes, C. Chaplin

Autres références

  • MARITIMISATION DE L'ÉCONOMIE

    • Écrit par Geoffroy CAUDE
    • 3 979 mots
    • 8 médias

    Depuis l’Antiquité, la voie maritime a permis aux navigateurs de commercer en transportant dans leurs navires des quantités de marchandises très supérieures à celles que permettaient les voies terrestres – ainsi, les Égyptiens, qui allaient jusqu’à Sumatra quelque 1200 ans avant notre ère ou, plus...

Voir aussi