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WINNICOTT DONALD WOODS (1896-1971)

Né dans le Devon, en Angleterre, Donald W. Winnicott fit des études médicales et se spécialisa en pédiatrie avant d'accéder, en 1923, au poste de médecin-assistant au Paddington Green Children's Hospital, où il allait exercer pendant quarante ans. Une formation analytique engagée, dès le début des années trente, avec James Strachey, puis avec Joan Riviere, le conduisit à prendre rapidement une part active aux activités de la Société britannique de psychanalyse. Il devait jusqu'à sa mort y occuper une place importante et en assumer la présidence de 1956 à 1959 puis de 1965 à 1968. Winnicott, par sa personnalité et son œuvre, a marqué profondément l'évolution contemporaine de la psychanalyse. Dans l'histoire du mouvement psychanalytique, Freud lui-même distinguait un temps de la solitude, un temps du compagnonnage, puis la période de l'institutionnalisation. Resterait à écrire la suite de cette histoire en mettant en scène une « seconde génération » des figures marquantes apparues après 1925, tels Melanie Klein, Jacques Lacan et Donald Winnicott. Dans cette génération, Winnicott doit être crédité d'une originalité supplémentaire. Il est, en effet, un des rares grands psychanalystes, sinon le seul, à avoir profondément influé sur la recherche et la pensée analytiques contemporaines sans pour autant être devenu un chef d'école : il n'y a pas de « winnicottiens » au sens où il y a des « kleiniens » ou des « lacaniens ». C'est là un trait qui se trouve en consonance avec son œuvre théorico-clinique, dont André Green a pu dire qu'elle est essentiellement une « pensée du paradoxe ».

Le champ d'investigation

Tout au long de la vie et de l'œuvre de Winnicott, on retrouve à la fois une orientation pédiatrique et une orientation psychanalytique, qui, sans que l'une détrône l'autre, s'accordent en un va-et-vient continuel. C'est vers 1930 que Winnicott apparaît sur la scène psychanalytique anglaise, à une époque où elle est particulièrement animée. En 1926, en effet, Ernest Jones, alors président de la Société britannique, invite Melanie Klein à venir travailler à Londres. Elle y suscite un renouveau enthousiaste et passionné de la recherche psychanalytique. Peu avant la Seconde Guerre mondiale, une opposition se dessine entre ses vues et celles d' Anna Freud, qui, elle aussi, s'installe définitivement à Londres en 1939. Les divergences, sur l'analyse d'enfants d'abord et bientôt sur les conceptions fondamentales de l'analyse, deviennent très vite aiguës, voire conflictuelles. Sans jamais aller jusqu'à une scission, elles ont établi un partage, au sein de la Société britannique, entre « kleiniens » et « anna-freudiens ». Dans le même temps, un troisième groupe se forme, non point intermédiaire entre les deux courants antagonistes, malgré son appellation de « Middle Group », mais plutôt indépendant, en ce sens que, d'une part, il se donne une personnalité théorique propre, non dogmatique, et que, d'autre part, il ne se reconnaît pas de leader : si Winnicott en a été la figure peut-être la plus prestigieuse, ce groupe n'a jamais pour autant porté le nom de celui-ci, car il compte d'autres personnalités originales telles que Masud Khan, Marion Milner, John Bowlby, Donald Sutherland.

L'apport de Winnicott à la théorie, à la psychopathologie et à la clinique psychanalytiques ne se laisse pas aisément formaliser : d'abord parce que sa pensée était foncièrement opposée à une conceptualisation achevée ou totalisée, puis parce qu'elle associe intimement clinique et théorie (ce qui en fait la richesse, mais aussi la difficulté), enfin parce que les concepts qui y sont repérables sont eux-mêmes essentiellement interdépendants, chacun renvoyant à tous les autres. L'« espace » du développement[...]

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Écrit par

  • : maître assistant à l'université de Paris-VII, psychanalyste, membre de l'Association psychanalytique de France

Classification

Pour citer cet article

François GANTHERET. WINNICOTT DONALD WOODS (1896-1971) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • DIFFÉRENCE SEXUELLE (psychanalyse)

    • Écrit par Odile BOMBARDE
    • 1 309 mots
    ...commun aux deux sexes, et l'intérieur invisible de la mère comme la source des plus anciennes situations d'angoisse. Considérant la dyade mère-enfant, Donald W. Winnicott pose un « féminin pur », apulsionnel, assurant le « sentiment d'être » par opposition au « faire » situé du côté de la ...
  • ENFANCE (Les connaissances) - La petite enfance

    • Écrit par Hélène STORK
    • 8 741 mots
    • 2 médias
    ...la théorie psychanalytique de l'étayage pulsionnel. « Cette chose qu'on appelle nourrisson n'existe pas », s'écriait le pédiatre et psychanalyste D. W.  Winnicott 1940, voulant souligner ainsi l'unité fondamentale qui lie le bébé et sa mère, avant que le premier ne passe de l'initiale dépendance totale...
  • ÉTATS LIMITES ou BORDERLINE

    • Écrit par Rémi TEVISSEN
    • 1 352 mots
    ...développement de la relation d'objet dans l'organisation borderline. Après Helen Deutsch, qui décrit en 1942 les personnalités « comme si » (as if), Donald W. Winnicott, en Angleterre, étudie le « faux self » de sujets dont l'apparente adaptation à la réalité aurait valeur de structuration défensive...
  • HONNETH AXEL (1949- )

    • Écrit par Gérard RAULET
    • 1 854 mots
    ...autorisés à se reconnaître en fonction de leurs besoins spécifiques. Elle repose sur les liens affectifs unissant une personne à un groupe restreint. S’appuyant sur les travaux de Winnicott, Honneth insiste sur l’importance de ces liens affectifs dans l’acquisition de la confiance en soi, indispensable...

Voir aussi