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DEUTÉRIUM

En 1932, H. C. Urey, F. G. Brickwedde et G. M. Murphy mettent en évidence l'existence du deutérium, isotope de l'atome d'hydrogène, en analysant les raies du spectre de Balmer issues d'un résidu lourd de distillation fractionnée d'hydrogène liquide. Ces résultats furent confirmés la même année par W. Bleaknay à l'aide du spectrographe de masse.

Le deutérium est un isotope stable, de numéro atomique 1, de poids atomique 2, 014 102 u et de symbole D ou 21 H. Ce corps simple est présent dans la nature, on le retrouve ainsi dans l'air, l'eau et les molécules organiques. L'hydrogène contient en moyenne 0,0115 p. 100 de deutérium.

Comme l'hydrogène 1H, le deutérium existe à l'état de molécule diatomique. Le dideutérium (D2) est un gaz incolore, liquéfiable à 23,67 K (20,39 K pour la molécule de dihydrogène H2), avec un point triple à 18,72 K.

Un mélange gazeux de dihydrogène (H2) et de dideutérium (D2) conduit à un équilibre entre les trois espèces moléculaires possibles pour les atomes 11 H et 21 H : H2 (molécule de dihydrogène), D2 (molécule de dideutérium) et HD (molécule d'hydrure de deutérium). Cet équilibre isotopique est représenté par l'équation suivante : H2 + D2 ⇆ 2HD.

Tout comme le dihydrogène H2, le dideutérium D2 est constitué de deux formes allotropiques : l'orthodeutérium (molécule dont les deux spins nucléaires sont parallèles) et le paradeutérium (molécule présentant un couplage antiparallèle de spin).

Le dideutérium D2 peut être obtenu par électrolyse de l'eau lourde. On peut aussi le préparer directement par distillation du dihydrogène liquide H2. Ce dernier procédé de production met en œuvre une technologie de pointe (étanchéité absolue, expériences effectuées à basse température).

Une molécule de dioxyde de deutérium ou eau lourde D2O se compose d'un atome d'oxygène et de deux atomes de deutérium. Dans la nature, l'eau contient en moyenne 0,015 p. 100 d'eau lourde.

D2O est séparé de H2O par électrolyse de l'eau. Lors de cette opération, l'hydrogène léger se dégage beaucoup plus rapidement à la cathode que le deutérium, et ainsi la concentration de l'électrolyte en D2O augmente. Ce principe est utilisé dans l'industrie afin de produire le dioxyde de deutérium en grande quantité.

Les propriétés physiques de D2O sont peu différentes de celles de l'eau, H2O. L'eau lourde bout à 101,4 0C et fond à 3,813 0C sous la pression normale. L'analyse de l'eau lourde peut être réalisée par différentes méthodes : la spectrométrie infrarouge, la résonance magnétique nucléaire, les mesures d'indice de réfraction et de densité.

Le domaine nucléaire utilise une propriété particulière de l'eau lourde : sa section efficace de capture des neutrons (σ = 0,000 46 barn), qui est mille fois inférieure à celle de H2O (σ = 0,33 barn). Cette propriété originale permet l'utilisation de D2O comme modérateur dans certains réacteurs nucléaires. En dehors de cette principale utilisation industrielle, l'eau lourde est employée pour étudier l'effet isotopique de solvant. L'eau lourde ainsi que le dideutérium D2 sont également utilisés dans la synthèse de molécules marquées au deutérium.

La substitution au sein d'une molécule d'un atome par un isotope ne modifie que faiblement les propriétés chimiques globales de cette dernière. Toutefois, les vitesses des réactions qui mettent en jeu la molécule « marquée » sont modifiées. Ce changement, qui reste faible, est appelé effet isotopique.

Il existe en fait trois effets isotopiques : primaire, secondaire et celui qui est associé au solvant. Dans le cas de l'effet isotopique primaire, la liaison qui lie l'isotope à la molécule est rompue. Cette rupture intervient au cours[...]

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Écrit par

  • : enseignant-chercheur à l'Institut national des sciences et techniques nucléaires-Commissariat à l'énergie atomique, Saclay

Classification

Pour citer cet article

Akli HAMMADI. DEUTÉRIUM [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • DÉTECTEURS DE PARTICULES

    • Écrit par Pierre BAREYRE, Jean-Pierre BATON, Georges CHARPAK, Monique NEVEU, Bernard PIRE
    • 10 978 mots
    • 12 médias
    ...première importance de disposer de nucléons cibles à l'état libre. Lorsqu'on veut étudier les chocs sur neutron, on remplace l'hydrogène par du deutérium dont le noyau est composé d'un proton et d'un neutron. Ceux-ci étant faiblement liés entre eux, on peut considérer en première approximation...
  • ASTROCHIMIE

    • Écrit par David FOSSÉ, Maryvonne GERIN
    • 4 388 mots
    • 3 médias
    ...glaces jouent alors un rôle passif dans la chimie du gaz interstellaire en captant les espèces les plus abondantes, limitant ainsi la destruction des ions. Dans les régions les plus opaques et les plus denses des nuages sombres, on observe en effet de nombreux ions moléculaires (N2H+ par exemple) et des...
  • HYDROGÈNE

    • Écrit par Paul HAGENMULLER
    • 3 539 mots
    • 6 médias
    Trois isotopes sont connus. L'hydrogène (symbole H) léger, dont le noyau est formé uniquement d'un proton, est de loin le plus répandu. Le deutérium (symbole D), dont le noyau contient également un neutron, n'existe qu'à un taux de 0,015 p. 100 dans l'hydrogène naturel. Le ...
  • HYDROGÈNE (physique)

    • Écrit par Bernard PIRE
    • 6 157 mots
    • 9 médias
    Le deutérium (2H ou D, de numéro atomique 2) a été découvert en 1931 par le chimiste américain Harold Urey (1893-1981). Son noyau est composé d’un proton et d’un neutron ; très peu toxique, il n’est pas radioactif. Son abondance atomique sur Terre varie de 20 à 150 ppm (parties par millions), selon les...
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Voir aussi