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COCA

Il existe une confusion très largement répandue entre la cocaïne, alcaloïde isolé pour la première fois par le chimiste et pharmacien allemand Albert Niemann ( 1834-1861 ) en 1859, et la feuille de coca dont on l'extrait. La coca appartient à la famille des Erythroxylaceae du genre pantropical. Deux de ses quelque 250 espèces, que l'on trouve sur le continent sud-américain jusqu'à 2 000 mètres d'altitude, y sont cultivées depuis très longtemps et ont des feuilles riches en cocaïne (et en d'autres alcaloïdes) : l'Erythroxylum coca Lam., appelée aussi coca bolivienne ou coca Húanuco, que l'on rencontre principalement dans les vallées chaudes de Bolivie et au Pérou sur le versant oriental de la cordillère des Andes, et l'Erythroxylum novogranatense (Morris) Hieronymus, appelée aussi coca colombienne, qui pousse dans les vallées chaudes de Colombie et du nord de l'Équateur..

La coca - crédits : Encyclopædia Universalis France

La coca

Culture de la coca - crédits : Alain Labrousse

Culture de la coca

Mais beaucoup d'autres espèces, en particulier Erythroxylium laeteviens O. E. Schulz, renferment aussi de la cocaïne. La plante de coca est un arbuste qui mesure de 50 centimètres à 2 mètres de hauteur. Ses feuilles ont une forme ovale et présentent, de chaque côté de la nervure centrale, un pli foliaire saillant et arqué très caractéristique. Le tronc est couvert d'une écorce rugueuse de couleur rougeâtre, tandis que les fleurs, nombreuses, petites et blanches, naissent sur les rameaux, éparses ou en groupes. Le fruit est une drupe de type ovoïde, de couleur rougeâtre foncé, qui contient une seule graine.

Au moment de la découverte de l'Amérique, la feuille de coca était mâchée par les indigènes du continent jusqu'en Amérique centrale et aux Caraïbes. Les Incas, en particulier, contrôlaient une grande partie des cultures, dont ils destinaient la production à l'élite nobiliaire et sacerdotale. Les Espagnols interdirent d'abord l'usage de la coca qualifiée de « talisman du Diable », avant d'en développer la culture lorsqu'ils se furent aperçus qu'elle stimulait le travail des Indiens envoyés par dizaines de milliers dans les mines. Aujourd'hui, son utilisation se limite aux populations andines du Pérou et de la Bolivie et à des minorités indiennes de Colombie ou de la forêt amazonienne. Dans les Andes, la prise de la coca est un véritable rituel : l'Indien extrait d'une petite bourse tissée, appelée chuspa en quechua, quelques feuilles sèches qu'il porte à sa bouche et triture sans les avaler. Puis il mord dans un petit morceau de pâte calcaire, plus ou moins dur ou amer, la llipta ou tocra. Il reprend quelques feuilles, un peu de llipta, et ainsi de suite jusqu'à ce qu'il ait formé une petite boule. Après avoir placé cette dernière entre la joue et les dents, il la remue très doucement de façon à extraire progressivement le jus des feuilles. Cette dernière phase dure en général quarante-cinq minutes.

Mineurs des Andes mastiquant de la coca - crédits : Magrit Vermes

Mineurs des Andes mastiquant de la coca

Rituel andin - crédits : Alain Labrousse

Rituel andin

La llipta, qui joue le rôle de réactif alcalin, est élaborée, selon les régions, avec des racines de quinua (ou d'autres plantes) et de l'écorce de cacao, qui sont brûlées, humidifiées, puis enterrées pendant plusieurs mois. En Colombie, le mambe, que l'on obtient à partir de coquillages et d'os réduits en cendres, est une poudre blanche calcaire. Elle est contenue dans une petite calebasse, le poporo. On l'extrait au moyen d'une spatule que l'on porte à sa bouche. La prise de la coca, que l'on appelle en quechua acullico ou hallpay, est effectuée cinq à six fois par jour par les paysans, qui utilisent pour cela de 30 à 60 grammes de feuilles.

Les quantités de cocaïne ingérées au cours de cette opération sont infimes, et l'on ne considère plus aujourd'hui son utilisation comme une forme de toxicomanie. On a également longtemps cru qu'elle constituait un coupe-faim. Mais des études menées par[...]

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Écrit par

  • : retraité de l'Éducation nationale, expert dans le domaine de la géopolitique des drogues

Classification

Pour citer cet article

Alain LABROUSSE. COCA [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

La coca - crédits : Encyclopædia Universalis France

La coca

Culture de la coca - crédits : Alain Labrousse

Culture de la coca

Mineurs des Andes mastiquant de la coca - crédits : Magrit Vermes

Mineurs des Andes mastiquant de la coca

Autres références

  • ANESTHÉSIE

    • Écrit par Francis BONNET, François CHAST
    • 4 117 mots
    • 2 médias
    Jusqu'au milieu du xxe siècle, l'anesthésique local le plus efficace a été extrait des feuilles de la « plante divine des Incas », à savoir la coca.
  • BOLIVIE

    • Écrit par Virginie BABY-COLLIN, Jean-Pierre BERNARD, Universalis, Jean-Pierre LAVAUD
    • 11 790 mots
    • 8 médias
    ...(température moyenne annuelle de 18 0C à Cochabamba). L'agriculture tropicale d'exportation (café, cacao) ne peut concurrencer la culture de la coca, dont les quatre récoltes annuelles assurent de meilleurs revenus aux paysans, bien que les profits de la filière soient surtout générés plus en...
  • COCAÏNE

    • Écrit par A. M. HAZEBROUCQ
    • 669 mots
    • 1 média

    L'Erythroxylon coca (famille des Linacées), cultivée surtout en Amérique du Sud d'où la plante est originaire, produit la cocaïne au niveau des feuilles par transformation de l'ornithine. Les racines paraissent totalement dépourvues d'alcaloïde. La teneur en alcaloïde varie selon les échantillons...

  • COLOMBIE

    • Écrit par Universalis, Marcel NIEDERGANG, Olivier PISSOAT, Clément THIBAUD
    • 13 648 mots
    • 5 médias
    ...s'imposent en contre-pouvoirs d'un État absent et où le commerce de la drogue et des armes est presque le seul lien direct avec l'extérieur. La culture de la coca est prédominante dans les Llanos et la forêt amazonienne où, malgré les campagnes de fumigation (Plan Colombia depuis 1999), les surfaces cultivées...
  • Afficher les 8 références

Voir aussi