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LITVAK ANATOLE (1902-1974)

Cinéaste américain, Anatole Litvak est né à Kiev, en Ukraine.

Bien qu'il ait dirigé quelques films muets à Leningrad vers 1924, sa carrière véritable commence après son émigration en Allemagne (1929). Scénariste à l'U.F.A. (Universum Film Aktiengesellschaft) de 1933 à 1936, il dirige pendant la même période plusieurs films à Berlin, à Londres et enfin à Paris (1936), d'où il émigre pour Hollywood. Il y travaille pour la Warner Bros, puis pour la Twentieth Century Fox, et sera l'un des principaux collaborateurs de Frank Capra pour la série de documentaires : Pourquoi nous combattons (1942-1945). En 1947, le succès mondial de La Fosse aux serpents lui permet de recommencer une carrière internationale, surtout marquée par des productions américaines de prestige.

La pratique des films tournés en deux ou trois versions, notamment autour d'un couple de chanteurs ou de vedettes célèbres, était courante lors des débuts de Litvak en Allemagne. Aussi, à Paris, s'oriente-t-il d'abord vers des mélodrames solidement construits qui donnent toutes leurs chances à des acteurs tels que Harry Baur (Cette Vieille Canaille, 1933) et Charles Vanel. Mais c'est un roman-feuilleton en costumes, prototype d'une série de remakes sur un thème inusable, qui assura sa célébrité : le fameux Mayerling de 1936, joué par Charles Boyer et Danielle Darrieux. Cette évocation pour midinettes d'un drame historique, dont les conséquences politiques sont soigneusement gommées, ouvre à Litvak la voie d'Hollywood.

Tenu en même temps pour un spécialiste de l'Europe centrale, Litvak collabore aux œuvres de propagande antinazie. L'habileté purement technique qu'il y déploie donne la mesure exacte de son talent. On chercherait en vain dans son œuvre la trace de préoccupations ou de préférences personnelles. Aujourd'hui, les films de sa période la plus célèbre, celle de l'après-guerre, à commencer par La Fosse aux serpents, apparaissent totalement factices dans leur recherche de nouveaux moyens d'émotion, en l'occurrence l'évocation de l'univers asilaire. Il n'y met en réalité en mouvement qu'une frénésie fabriquée qui se retrouve dans Raccrochez, c'est une erreur (1948), thriller pseudo-réaliste fondé sur un postulat invraisemblable. Il y a plus de sincérité dans Un acte d'amour (film tourné en France en 1953), grâce surtout à l'interprétation de Kirk Douglas. De même, dans Aimez-vous Brahms ? (1961), Litvak a réussi une transposition honorable de l'univers de Françoise Sagan, malgré une distribution hétérogène dominée par Ingrid Bergman, dont il avait auparavant presque ridiculisé le talent en l'employant dans Anastasia (1956). Ce film est un exemple achevé d'exploitation commerciale d'une fausse énigme historique : ce fut d'ailleurs un échec commercial.

Ayant cependant gardé la confiance des producteurs, Litvak, installé en France dans les dernières années de sa vie, dirige encore La Nuit des généraux (1966). Ses deux registres habituels (le mélodrame, l'évocation du passé) s'y conjuguent dans une douteuse analyse des états d'âme de quelques chefs du IIIe Reich agonisant. Il y a eu chez ce cinéaste un sens du public assez poussé pour lui éviter sinon des fautes de goût, du moins excès dans la démesure ou la préciosité.

— Gérard LEGRAND

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