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SORDI ALBERTO (1920-2003)

Né à Rome en 1920, Alberto Sordi a grandi sous le fascisme. Son entrée dans le monde du spectacle s'est faite par la petite porte, comme figurant dans des films tournés à Cinecittà, ou comme doubleur d'Oliver Hardy. Après quelques rôles de second plan, il devient progressivement un des représentants les plus sûrs du spectacle italien. Commencée à la fin des années 1930, sa carrière s'est poursuivie sans interruption jusqu'à la fin des années 1990 : soixante ans de présence, et près de deux cents films, marqués par une personnalité inimitable.

Figure emblématique de la comédie italienne dont il a puissamment contribué à fixer les caractéristiques – « un néo-réalisme comique, satirique, ironique », selon ses propres mots –, Alberto Sordi a travaillé avec les meilleurs spécialistes du genre, tels Luigi Zampa, Steno, Dino Risi, Mario Monicelli, Luigi Comencini, Alberto Lattuada, Nanni Loy, Ettore Scola. D'abord, un peu hésitant sur la nature des rôles qui lui convenaient, il a réussi à créer, à partir du début des années 1950, un « caractère » qui, au-delà de la variété des histoires, des situations, des milieux, conserve sa valeur symbolique par rapport à la société italienne. Sous le titre d'Histoire d'un Italien (1979), l'acteur a d'ailleurs composé pour la télévision un montage d'extraits de ses principaux films accompagnés de matériel d'archives. « Je me suis fixé – confie-t-il à la revue Positif – un programme : aller au même rythme que l'évolution des mœurs. Tout ce qui se produisait en Italie, moi je le représentais avec mon personnage. J'ai fréquenté tous les milieux, des prolétaires aux grands industriels, des employés aux nobles. J'ai illustré tous les aspects de la société italienne ».

À l'instar d'autres grands comédiens, Alberto Sordi n'a pas hésité à se lancer dans la mise en scène. Ses dix-huit films – de Fumo di Londra (1966) à Incontri proibiti (1998) – témoignent d'un sens aigu de l'observation de ses contemporains et d'une maîtrise efficace du rythme narratif. Et s'il ne s'est jamais soucié de savoir si les gens allaient rire ou non, par contre il s'est toujours préoccupé de savoir si le film allait ou non refléter la réalité de la vie, si les gens allaient se reconnaître dans les situations et, par voie de conséquence, se divertir.

La galerie de portraits composée par Alberto Sordi renvoie à un archétype unique, celui de l'Italien avec ses défauts – l'égoïsme, la trahison, la lâcheté, le transformisme permanent – et ses qualités – la capacité d'adaptation, la volonté de vivre – qui permettent de surmonter toutes les crises : « Je donne toujours à mes personnages – note Sordi – ces caractéristiques, cette force qui font que, si un personnage subit une humiliation, un échec, il peut avoir un moment d'abandon mais ensuite il se reprend : son énergie frustrée finit par l'emporter. Le type de comique que j'ai mis sur pied se fonde exclusivement sur cette vitalité à communiquer, à raconter » (« Entretien avec Alberto Sordi », in J. A. Gili, Le Cinéma italien, Paris, 1982).

Ainsi, les personnages interprétés par Alberto Sordi constituent une véritable comédie humaine. On y trouve de jeunes fanfarons (Les Vitelloni de Fellini, 1953 ; Un americano a Roma de Steno, 1954 ; I magliari de Rosi, 1959), des maris coureurs d'aventures (Le Cheikh blanc de Fellini, 1952 ; La Belle de Rome de Comencini, 1955 ; Il Marito de Loy et Puccini, 1958 ; Le Veuf de Risi, 1959), des débrouillards hypocrites (L'Arte di arrangiarsi de Zampa, 1954 ; Le Jugement dernier de De Sica, 1961), des bourgeois frustrés (Le Boom de De Sica, 1963 ; Un bourgeois tout petit petit de Monicelli, 1977 ; Le Roman d'un jeune homme pauvre[...]

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Écrit par

  • : professeur émérite, université professeur émérite, université Paris I-Panthéon Sorbonne

Classification

Pour citer cet article

Jean A. GILI. SORDI ALBERTO (1920-2003) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • COMÉDIE ITALIENNE, cinéma

    • Écrit par Jean A. GILI, Gérard LEGRAND
    • 3 496 mots
    • 3 médias
    ...Risi et d'autres réalisateurs. Mais par-delà leurs différences d'origine, les « cinq grands » (Vittorio Gassman, Nino Manfredi, Marcello Mastroianni, Alberto Sordi et Ugo Tognazzi) incarnent chacun un aspect, voire plusieurs, de l'Italien. Rien de moins abstrait que cette généralisation, les Italiens...
  • FELLINI FEDERICO - (repères chronologiques)

    • Écrit par Joël MAGNY
    • 1 071 mots

    20 janvier 1920 Naissance de Federico Fellini à Rimini, dans une modeste famille de la petite bourgeoisie.

    1923-1938 Enfance paisible et études très moyennes au collège et au lycée de Rimini. Federico Fellini découvre le cinéma avec Maciste aux enfers, de Brido Grignone (1925) au cinéma Fulgor....

Voir aussi