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AGRIGENTE

Évolution historique

La fondation de la colonie d'Akragas par les habitants de la voisine Géla aidés par les Rhodiens (Rhodes était l'une des métropoles de Géla) est l'une des dernières étapes de l'aventure coloniale grecque : elle se situe au début du vie siècle avant J.-C. (vers 580) ; les deux fondateurs, chefs de l'expédition, s'appelaient Aristonoos et Pistilos. Il s'agissait, de la part de Géla, de « répondre » à la fondation de Camarine par Syracuse une vingtaine d'années auparavant : bloqués vers l'est, les habitants de Géla cherchent un débouché vers l'ouest, sans menacer toutefois le territoire de la lointaine Sélinonte.

Selon Pindare (IIe Olympique, v. 11-12), Agrigente est l'« œil de la Sicile » : elle occupe une position stratégique, au centre de l'île et face à Carthage ; de fait, son histoire s'est souvent confondue avec celle de l'hellénisme occidental.

Huilerie sur la Rupe Atenea - crédits : Encyclopædia Universalis France

Huilerie sur la Rupe Atenea

L'Akragas grecque vit moins de deux siècles ; avant d'être détruite par les Carthaginois à la fin du ve siècle (406 av. J.-C.), elle connaît une alternance de régimes tyranniques ( Phalaris de 570 à 554, Théron de 488 à 473 en particulier), oligarchiques et démocratiques. Les deux principaux tyrans marquent de leur personnalité l'histoire d'Agrigente ; Phalaris vaut mieux que l'image du souverain cruel, faisant brûler ses victimes dans un taureau d'airain, que nous donne de lui la littérature antique ; l'archéologie nous apprend que sous son règne la ville connut un développement rapide. Sous Théron, elle est un centre de rayonnement littéraire : à la cour du tyran viennent des poètes comme Simonide, Bacchylide et surtout Pindare, qui compose à partir de 490 deux odes pour Théron vainqueur à Olympie, deux odes pour son frère Xénocrate victorieux aux jeux Pythiques et Isthmiques et une autre pour le flûtiste d'Agrigente Midas (XIIe Pythique) ; ainsi est célébrée la grande famille de Théron, celle de Emménides. C'est à cette époque que naît à Agrigente Empédocle, futur philosophe, et que travaille l'architecte Phaïax, particulièrement habile pour les aménagements hydrauliques (égouts, canalisations). L'opulence de la ville, qui est évoquée par l'historien Diodore de Sicile plusieurs siècles plus tard, atteint son apogée après la bataille d'Himère (480 av. J.-C.) : alliée à Syracuse et à Himère, Agrigente triomphe de Carthage (le même jour que Salamine, faisaient semblant de croire les Anciens !).

Tombeau de Théron, Agrigente (Sicile) - crédits : Encyclopædia Universalis France

Tombeau de Théron, Agrigente (Sicile)

Après sa destruction, Agrigente sort pour un temps de l'histoire et n'est reconstruite que vers 338 avant J.-C. par le Corinthien Timoléon, nouveau maître de Syracuse. Pendant le siècle qui suit, elle devient un enjeu entre Carthage et Rome qui finit par en prendre le contrôle définitif en 210 avant J.-C. Sous la République romaine, elle souffre des exactions de Verrès et des révoltes d'esclaves, mais elle jouit par la suite d'une relative tranquillité ; son port reste actif ainsi   que sa vie économique (agriculture, textiles, soufre).

Selon Diodore de Sicile, Agrigente a compté 200 000 habitants (dont 20 000 citoyens) ; il s'agit probablement de l'ensemble des habitants de la ville et du territoire. On notera que l'ekklesiasterion, bâtiment destiné à accueillir les citoyens, contenait 4 500 places environ. L'estimation de Diogène Laërce (800 000 habitants) est certainement exagérée.

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Écrit par

  • : directeur scientifique adjoint au département des sciences de l'homme et de la société du C.N.R.S.

Classification

Pour citer cet article

Michel GRAS. AGRIGENTE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Italie : carte administrative - crédits : Encyclopædia Universalis France

Italie : carte administrative

Plan de la ville antique d'Agrigente - crédits : Encyclopædia Universalis France

Plan de la ville antique d'Agrigente

Huilerie sur la Rupe Atenea - crédits : Encyclopædia Universalis France

Huilerie sur la Rupe Atenea

Autres références

  • ATLANTE

    • Écrit par Martine Hélène FOURMONT
    • 137 mots

    Terme d'architecture grecque, forgé sur le nom d'Atlas, géant qui soutenait la voûte du ciel sur ses épaules. L'atlante désigne une statue masculine qui, à l'égal des caryatides, sert de support dans un édifice.

    Les atlantes jouaient le rôle des colonnes, des piliers...

  • GRÈCE ANTIQUE (Civilisation) - La religion grecque

    • Écrit par André-Jean FESTUGIÈRE, Pierre LÉVÊQUE
    • 20 084 mots
    • 8 médias
    ..., île que l'on disait vouée aux « deux déesses » (on localisait même à Enna le rapt de la jeune fille par le Seigneur infernal). Ainsi, à Agrigente, de vieux sanctuaires autochtones (grottes ou enclos sacrés enserrant des autels) annexés par Déméter et Coré, qui ont pris la place des Dames...
  • GRÈCE ANTIQUE (Civilisation) - Urbanisme et architecture

    • Écrit par Roland MARTIN
    • 4 716 mots
    • 7 médias
    Agrigente offre un autre exemple raffiné d'une architecture urbaine de prestige. Le site, enfermé dès le ve siècle par une vaste enceinte, chevauche un groupe de collines et de vallées limitées, comme à Sélinonte, par le cours de deux fleuves, l'Hylas et l'Akragas. La ville s'est installée dans...
  • SICILE

    • Écrit par Maurice AYMARD, Michel GRAS, Claude LEPELLEY, Jean-Marie MARTIN, Pierre-Yves PÉCHOUX
    • 17 925 mots
    • 9 médias
    ...siècle dans le monde grec ses spéculations à la fois rationnelles et mystiques. Cependant, les villes s'enrichissaient de nombreux monuments. Sélinonte et Agrigente offrent toujours leur incomparable ensemble de temples, construits aux vie et ve siècles. Le mécénat des tyrans et l'orgueil des cités ont...

Voir aussi