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ORIENT QUESTION D'

La guerre de Crimée et ses conséquences (1850-1878)

Les années qui suivent la résolution de la crise égyptienne constituent pour l'Empire ottoman une période de paix relative au cours de laquelle sont mises en application les réformes prévues par la charte de Gül-Hané, avec le soutien moral des Anglais, cependant que les Russes sont favorables aux traditionalistes et, par ailleurs, exercent une forte pression sur les principautés moldo-valaques.

De l'affaire des Lieux saints à la guerre de Crimée (1850-1856)

Une querelle sérieuse surgit à propos des Lieux saints entre la France, protectrice des catholiques, et la Russie, protectrice des orthodoxes. Par les Capitulations, la France avait fait reconnaître les droits des religieux latins sur les Lieux saints ; mais, en 1757, les Grecs ont obtenu l'éviction des religieux latins au profit des orthodoxes et, en 1808, les Russes ont fait admettre leur droit de protection sur les Lieux saints, sans aucune réaction de la part des Français. C'est seulement en 1850 que Louis-Napoléon Bonaparte, désireux de s'attirer l'appui des catholiques français, émet des revendications sur les Lieux saints et réclame le respect des Capitulations. Une commission mixte, puis une commission turque de conciliation ayant échoué, le tsar Nicolas Ier cherche à attirer les Anglais dans son camp en leur proposant un partage des territoires ottomans (janvier 1853), puis son ambassadeur Menchikov exige du sultan des garanties pour les chrétiens du « culte gréco-russe » de l'Empire ; ces exigences sont repoussées par le sultan, que soutiennent les Français et les Anglais.

Guerre de Crimée, R. Fenton - crédits : Roger Fenton/ Getty Images

Guerre de Crimée, R. Fenton

En mars 1854 est conclue une alliance turco-franco-anglaise : les Français y voient un moyen de redorer leur blason auprès des Turcs et d'étendre leur influence en Orient, les Anglais celui de s'opposer à l'expansion russe et de jouer un plus grand rôle politique dans le Levant en vue de protéger la route des Indes. De la Dobroudja, la guerre – déclarée par les Turcs à la fin de 1853 – est portée en Crimée où le fait essentiel est le siège de Sébastopol (octobre 1854-septembre 1855).

Le traité de Paris : règlement de la Question d'Orient (1856-1862)

Les Russes ayant remporté quelques succès en Anatolie orientale et le nouveau tsar Alexandre II se montrant plus conciliant, un accord est dès lors possible : il aboutit à la signature du traité de Paris (30 mars 1856).

Ce traité revêt une importance particulière dans la Question d'Orient : on a même pu croire qu'il en apportait la solution. Il comportait les clauses suivantes : évacuation des territoires réciproquement conquis ; garantie de l'intégrité du territoire ottoman ; recours, en cas de conflit entre la Porte et une puissance occidentale, à la médiation des autres puissances ; neutralisation de la mer Noire ; internationalisation du Danube et de ses embouchures, dont la Russie est écartée par des rectifications de frontières ; indépendance de la Valachie et de la Moldavie ; renouvellement de la Convention des Détroits ; enfin, promulgation par le sultan d'une nouvelle série de réformes (hatt-i hümayūn de février 1856).

De ce traité résulte peu après l'union de la Valachie et de la Moldavie qui élisent le même prince, Alexandre Couza (janvier-février 1859) ; trois ans plus tard, la fusion est réalisée et donne naissance à la Roumanie (1862).

Au Liban, à la suite d'attaques répétées des Druzes contre les Maronites (1861), avec l'accord de Constantinople et des grandes puissances, un corps expéditionnaire français intervient ; il demeurera sur place jusqu'en 1871. En juin 1861, une commission mixte accorde au Liban un statut spécial, devenu définitif en 1864, de province autonome gouvernée par un chrétien assisté d'un conseil administratif.

Un autre conflit, qui a éclaté au Monté-négro,[...]

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Écrit par

  • : membre de l'Institut, professeur émérite à l'université de Provence-Aix-Marseille-I

Classification

Pour citer cet article

Robert MANTRAN. ORIENT QUESTION D' [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

1800 à 1850. Indépendances américaines - crédits : Encyclopædia Universalis France

1800 à 1850. Indépendances américaines

Guerre de Crimée, R. Fenton - crédits : Roger Fenton/ Getty Images

Guerre de Crimée, R. Fenton

Traité de San Stefano - crédits : AKG-images

Traité de San Stefano

Autres références

  • MOUVEMENT DES NATIONALITÉS DANS L'EUROPE BALKANIQUE ET DANUBIENNE - (repères chronologiques)

    • Écrit par Vincent GOURDON
    • 479 mots

    1774 Le traité de Kutchuk-Kaïnardji, qui met fin à la guerre russo-turque (1768-1774), donne aux Russes un droit de protection sur les chrétiens des Balkans.

    1821 Déclenchement de la révolte anti-ottomane à partir des provinces danubiennes, à l'initiative des sociétés secrètes helléniques....

  • BALKANS ou PÉNINSULE BALKANIQUE

    • Écrit par Jean AUBOUIN, Michel ROUX
    • 7 514 mots
    • 1 média
    Cedernier processus, encouragé et contrôlé par les puissances européennes, ruine la domination ottomane dans les Balkans. La Grèce est indépendante dès 1830 ; l'émancipation de la Serbie, amorcée en 1815, est parachevée par le congrès de Berlin (1878), qui reconnaît son indépendance...
  • CRIMÉE (GUERRE DE)

    • Écrit par William Peter Jackson SMITH
    • 496 mots
    • 2 médias

    Conséquence de la politique menée par Napoléon III pour essayer de rompre la coalition européenne qui, depuis 1815, réduit le rôle de la politique étrangère de la France. Envisageant certains remaniements de frontières, avec l'accord de l'Angleterre et de la Russie, et voulant engager l'intérêt...

  • ÉGYPTE - L'Égypte coloniale

    • Écrit par Nada TOMICHE
    • 6 549 mots
    • 14 médias
    ...victoires égyptiennes et fait peser une seconde menace sur Constantinople. Mais, prenant vigoureusement parti pour la Turquie dans ce qu'on appelle la « question d'Orient », c'est-à-dire la lutte ouverte entre la Porte et l'Égypte, l'Angleterre, la Russie, l'Autriche...
  • GRÈCE - De la Grèce byzantine à la Grèce contemporaine

    • Écrit par Jean CATSIAPIS, Universalis, Dimitri KITSIKIS, Nicolas SVORONOS
    • 21 411 mots
    • 12 médias
    ...libéralisme européen, menaçaient l'entente fragile de la France et de l'Angleterre autour du principe légitimiste de la Sainte Alliance, d'autant plus que ces deux puissances étaient en complet désaccord sur laquestion d'Orient. Il a donc fallu en venir à un compromis pour régler la question grecque.
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Voir aussi