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EXTRÊME-ORIENT QUESTION D'

L'expression « question d'Extrême-Orient » appartient au vocabulaire d'une historiographie traditionnelle et « européocentrique ». Elle recouvre cependant des problèmes réels, nés de la domination directe ou indirecte des grandes puissances de l'Europe occidentale et des États-Unis sur cette partie du monde extrême-oriental qu'on peut limiter à la Chine, au Japon et à la presqu'île indochinoise. La question d'Extrême-Orient commence à se poser autour de 1840 et prend fin avec la dislocation du système colonial et semi-colonial. Cette pénétration « occidentale », qui revêt des formes diverses mais liées entre elles (politique, militaire, économique, culturelle, religieuse), a provoqué, d'une part, la résistance des populations intéressées et, d'autre part, des rivalités entre les grandes puissances.

Les origines

Les contacts entre l'Extrême-Orient et l'Europe occidentale sont anciens. Les Portugais arrivèrent en Chine au début du xvie siècle. Bien accueillis, ils ne tardèrent pas à susciter la haine en raison de leurs brutalités et furent parqués dans l'îlot de Macao. Au xviiie siècle, des Jésuites installés à Pékin jouissaient à la cour d'un prestige considérable ; mais le fanatisme de certains missionnaires aboutit à la proscription du christianisme. Les relations commerciales continuèrent cependant. À Canton, les marchands hollandais, anglais et portugais, qui troquaient de l'opium contre du blé et de la soie, devaient passer par l'intermédiaire d'une corporation de marchands chinois disposant d'un monopole d'État, le Cohong (Gonghang). Même situation au Japon, où seuls les Hollandais, installés dans l'îlot de Deshima, face à Nagasaki, pouvaient effectuer quelque commerce.

La guerre dite de l'Opium (1840-1842), dont Palmerston déclare qu'elle a pour objet d'« assurer la sécurité future du commerce britannique », pose pour la première fois la question d'Extrême-Orient. Les Anglais obtiennent de la Chine, par le traité de Nankin (29 août 1842), la possession de l'île de Hong Kong et le droit de commercer dans cinq ports : Canton, Shanghai, Amoy, Fuzhou et Ningbo. Dans ceux-ci, les agents anglais pourront établir des relations directes avec la population chinoise sans passer par le Cohong. En matière criminelle, les Anglais seront traduits, non devant les tribunaux chinois, mais devant leurs propres tribunaux (convention supplémentaire de novembre 1843). D'autres puissances (États-Unis et France) arrachent des avantages semblables. Le traité conclu avec la France reconnaissait en plus aux missionnaires catholiques la liberté d'apostolat.

Dans certaines parties de l'Extrême-Orient, la pénétration européenne revêt la forme classique de l'occupation coloniale. Il en est ainsi pour la presqu'île indochinoise. Les Anglais, qui tiennent Singapour depuis 1819, ont achevé en 1885 la conquête de la Birmanie. Les sultanats de Malaisie passent sous protectorat anglais entre 1874 et 1909. La France contrôle la plus grande partie de la péninsule avec les trois pays vietnamiens (colonie de Cochinchine, protectorats de l'Annam et du Tonkin), auxquels s'ajoutent les deux unités historiques distinctes du Cambodge et du Laos. Quant au Siam, la France et l'Angleterre y ont délimité par leur accord du 8 avril 1904 leurs zones d'influence respectives.

De telles méthodes, strictement coloniales, ne pouvaient être appliquées à l'égard de pays comme la Chine et le Japon, ne serait-ce qu'en raison des rivalités qui opposaient les grandes puissances les unes aux autres. D'ailleurs, la transformation du Japon à partir de 1868 apporte un élément nouveau à la question d'Extrême-Orient. Tantôt en accord, tantôt en opposition avec l'Occident, le Japon joue son propre jeu dans la politique de pénétration[...]

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Écrit par

  • : maître assistant à la faculté des lettres et sciences humaines de Paris

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Pour citer cet article

Jean BRUHAT. EXTRÊME-ORIENT QUESTION D' [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Seconde guerre de l'opium, F. Beato - crédits : Felice Beato/ Getty Images

Seconde guerre de l'opium, F. Beato

Soldats russes - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Soldats russes

Yuan Shikai - crédits : Topical Press Agency/ Hulton Archive/ Getty Images

Yuan Shikai

Autres références

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