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LAVOISIER ANTOINE LAURENT (1743-1794)

Les grands travaux scientifiques

En 1768, il entreprit d'approfondir la nature des quatre éléments considérés depuis l'Antiquité comme porteurs d'une réalité inaccessible à l'analyse scientifique : la terre, l'eau, l'air et le feu.

Certes, les chimistes contemporains utilisaient déjà la balance, car depuis la diffusion de la mécanique newtonienne tous connaissaient le principe de la conservation de la matière, que personne n'avait éprouvé le besoin de formuler explicitement ; mais, comme en dehors des essais sur les métaux précieux la chimie n'avait pas dépassé le stade d'une analyse qualitative imprécise, la pesée ne faisait pas partie des manipulations systématiques. Lavoisier, qui sa vie durant devait rechercher la précision en toute chose, aborda ce problème avec le souci de suivre par la pesée les modifications qu'entraînaient toutes les manipulations. Son attention se porta en premier lieu sur les expériences par lesquelles on avait prétendu prouver la possibilité de changer l'eau en terre. En observant le développement d'un végétal dans un vase empli de terre simplement arrosée, Van Helmont avait cru pouvoir conclure que l'eau devait se changer en terre pour former la masse de ce végétal. Boyle avait abouti à la même conclusion, après avoir constaté qu'une once d'eau distillée deux cents fois dans un vase finissait par y laisser six drachmes de terre. Lavoisier répéta l'expérience dans un pélican de verre hermétiquement clos et pesé à l'avance, dans lequel il maintint l'eau en ébullition durant cent jours. Il constata que le poids total du système n'avait pas varié et que la quantité de matière terreuse passée à la longue en dissolution ou en suspension dans l'eau avait un poids égal à celui perdu par le pélican.

Lavoisier s'intéressa ensuite aux problèmes de saturation des phosphates, à l'étude des sels magnésiens, du bleu de Prusse, de l'acide spathique et de l'acide citrique. Son attention ayant été attirée en 1772 sur les nouveaux « airs » découverts par Joseph Priestley, il décida d'étudier ces « airs » et les phénomènes de la combustion. Commençant par répéter les expériences de ses prédécesseurs, il fut dès l'abord frappé par l'augmentation du poids des métaux par la calcination. Cette constatation lui ayant montré l'inutilité de recourir à la théorie du phlogistique (cf. chimie-Histoire), il fit part de ses idées dans deux articles anonymes publiés dans le Journal de physique en octobre 1773 et en mars 1774. En janvier 1774, il fit paraître sous son nom le premier tome des Opuscules physiques et chimiques, dans lesquels il faisait l'historique des « émanations élastiques qui se dégagent des corps pendant la combustion, pendant la fermentation et pendant les effervescences » et exposait de « nouvelles recherches sur l'existence d'un fluide élastique fixé (acide carbonique) dans quelques substances et sur les phénomènes qui résultent de son dégagement ou de sa fixation ». Priestley, de passage à Paris en octobre 1774, annonça à Lavoisier qu'en chauffant sur une cuve à mercure le précipité per se (oxyde mercurique rouge), au moyen des rayons solaires concentrés par une forte lentille, il venait d'obtenir ce qu'il appelait l'« air déphlogistiqué ». Lavoisier refit l'expérience et fut le premier à comprendre que l'air privé de phlogistique était en réalité un « air » particulier. Il venait de découvrir que l'air de l'atmosphère était un mélange de deux gaz différents : l'air vital (l'oxygène) et la mofette (l'azote), le phlogistique n'ayant rien à voir dans sa composition.

Les expériences ultérieures de Lavoisier établirent le rôle de l'air vital dans la formation de[...]

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Écrit par

  • : ingénieur civil des Mines, membre correspondant de l'Académie internationale d'histoire des sciences, professeur à l'université de Paris-I

Classification

Pour citer cet article

Arthur BIREMBAUT. LAVOISIER ANTOINE LAURENT (1743-1794) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

<it>Portrait d'Antoine Laurent Lavoisier et de sa femme</it>, J.-L. David - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Portrait d'Antoine Laurent Lavoisier et de sa femme, J.-L. David

Autres références

  • LAVOISIER : LES COMBUSTIONS ET LA VIE

    • Écrit par Gabriel GACHELIN
    • 308 mots
    • 1 média

    Au moment où, en 1772, Antoine Laurent Lavoisier (1743-1794) débute ses expériences sur la combustion, l'opinion des chimistes était dominée par la théorie du phlogistique, un agent assimilable au feu et nécessaire autant à la combustion, à la calcination qu'à la respiration. Lavoisier...

  • ACIDES & BASES

    • Écrit par Yves GAUTIER, Pierre SOUCHAY
    • 12 364 mots
    • 7 médias
    Ce fut Lavoisier qui, le premier, tenta d'établir une corrélation entre les manifestations de l'acidité et la composition chimique des substances. S'appuyant sur le fait que la combustion de nombreux éléments (carbone, soufre, phosphore) dans l'oxygène conduit à des oxydes formant...
  • AIR

    • Écrit par Jean PERROTEY
    • 2 154 mots
    • 2 médias
    ...« nitre », d'où le nom d'« esprit nitro-aérien » alors donné à l' oxygène. Un siècle plus tard, la nature de l'air est vraiment élucidée par Lavoisier. L'expérience par laquelle il établit la composition de l'air est, encore à notre époque, un modèle de rigueur scientifique et de raisonnement...
  • BERTHOLLET CLAUDE LOUIS (1748-1822)

    • Écrit par Michelle GOUPIL-SADOUN
    • 1 193 mots
    ...royale des sciences dès 1778. Le jeune chimiste y fut admis comme adjoint le 15 avril 1780, associé le 23 avril 1785, et pensionnaire le 7 janvier 1792. Avec Fourcroy, Guyton de Morveau et Monge, il faisait partie du petit cercle de jeunes savants qui se réunissaient à l'Arsenal, autour de Lavoisier, dont...
  • CALORIQUE

    • Écrit par Georges KAYAS
    • 376 mots

    Ancien nom de la chaleur considérée comme un fluide pondérable dérivant du feu platonicien. Passant à travers les parois des vases (à cause de l'acuité de ses arêtes et de ses sommets pointus), il provoquait, d'une part, la dilatation des corps (en s'insinuant entre leurs propres particules qu'il...

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Voir aussi