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URBANISME Urbanisme et société

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Une révolution qui n'est peut-être pas terminée

La grande épreuve subie par la ville et par l'urbanisme procède du renversement des proportions entre ruraux et citadins au cours d'un siècle qui a vu quadrupler la population des pays industriels. En dépit des efforts d'arrière-garde des défenseurs des valeurs foncières et rurales, le transfert des forces économiques a été pratiquement total dans des pays qui rassemblent aujourd'hui un milliard d'hommes et les quatre cinquièmes de la fortune du globe. Économie et société sont aujourd'hui intégralement urbaines. Mais la mutation a été trop brutale pour que l'urbanisme et l'image même de la ville aient suivi. C'est sans doute à cet égard, plus encore que sur le plan technique, que le terme de révolution industrielle prend sa pleine signification. Dix siècles de société antique ont sécrété leurs villes. Cinq siècles de renaissance urbaine ont abouti à la plénitude de l'urbanisme du xviiie siècle. Cent cinquante ans de développement industriel accéléré et d'accumulation de population urbaine à la recherche de compositions sociales plus ou moins durables n'ont engendré qu'un désordre apparent dans lequel la projection de techniques nouvelles a apporté la confusion. La recherche d'un répit, d'un équilibre, même temporaire, est déjouée par le déphasage entre les rythmes de l'urbanisme, qui sont pluridécennaux, et l'emprise des techniques sur la modulation de la société et de la vie quotidienne. L'urbanisme est-il possible ou n'est-il qu'une utopie ?

Jamais on n'a tant construit d'immeubles, de quartiers urbains, de villes nouvelles qu'entre 1850 et nos jours. La population urbaine dans la seule Europe occidentale des années 1980 est passée de quelques dizaines de millions à 250 millions d'individus, dans l'ensemble des pays industriels de 50 millions à 500 millions. En même temps, les villes devenaient sièges d'industries, de formes nouvelles d'entrepôt et de commerce, de gestion financière ; elles étaient pourvues de vastes installations de services liées notamment à l'essor des chemins de fer. Les dimensions se placent sur un autre registre qu'autrefois. Et la première question à poser est celle de la cohérence des dimensions et de l'unité sociale de la ville. Pour la traiter, il faut tenter de définir la société urbaine née de la révolution industrielle et de ses rapports avec les manifestations de l'urbanisme depuis plus d'un siècle. C'est en fait la société du xixe siècle qui est en cause globalement, encore que le secteur de population rurale reste pour un temps étranger aux processus de l'urbanisation. La première image, c'est celle de la société industrielle analysée par Karl Marx et qui correspond au schéma général de la société des dernières décennies du xixe siècle : classe prolétarienne, « classe dangereuse », suivant l'expression de Louis Chevalier, bourgeoisie rapidement enrichie, qui a besoin d'immeubles et d'espaces de prestige pour ses entreprises et ses résidences, classes moyennes d'employés, d'intermédiaires, de représentants des professions libérales, dont le nombre augmente sans cesse. Y a-t-il un urbanisme répondant à cette société ? Une urbanisation, certes, et remarquablement conforme à sa structure, un urbanisme peut-être, mais plus à titre de sous-produit que d'opération créatrice globale procédant d'une intention délibérée.

L'afflux des travailleurs de l'industrie, venus des campagnes, initialement parqués dans des mansardes, des sous-sols, des greniers, des masures de faubourgs, a imposé des constructions nouvelles dont les loyers devaient être à la mesure des salaires qu'on leur donnait. Pour éviter une trop grande mobilité de[...]

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Pour citer cet article

Pierre GEORGE. URBANISME - Urbanisme et société [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Média

Bâtiments de l’Exposition universelle de 1900 - crédits : London Stereoscopic Company/ Getty Images

Bâtiments de l’Exposition universelle de 1900

Autres références

  • ALBERTI LEON BATTISTA (1404-1472)

    • Écrit par
    • 3 110 mots
    • 8 médias
    ...cité idéale a un plan rationnel, avec des édifices régulièrement disposés de part et d'autre de rues larges et rectilignes. Cette nouvelle conception de l'urbanisme, en rupture avec les pratiques médiévales, est liée sans doute à l'essor sans précédent de la cité-république. Alberti reprend la plupart des...
  • ALPHAND ADOLPHE (1817-1891)

    • Écrit par et
    • 1 674 mots

    Ouvrir de nouveaux espaces, assainir les anciens, créer des jardins, embellir l'ensemble, tels sont les différents gestes d'une même démarche qui ont conduit à faire de Paris une capitale moderne au xixe siècle. Jean-Charles Adolphe Alphand, paysagiste et administrateur français de...

  • ANGIVILLER CHARLES CLAUDE DE LA BILLARDERIE comte d' (1730-1809)

    • Écrit par
    • 607 mots
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    La faveur de Louis XVI vaut à d'Angiviller de remplacer, en 1774, le marquis de Marigny comme surintendant des bâtiments du roi. Ses idées sont plus personnelles que celles de son prédécesseur, mais il reconnaît la valeur de l'œuvre accomplie par lui grâce aux sages conseils dont il a su s'entourer...

  • ANTHROPOLOGIE URBAINE

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    L’autre grande école d’anthropologie urbaine est britannique et voit le jour à la fin des années 1930 en Rhodésie du Nord (auj. Zambie), alors dominée par la Grande-Bretagne. Le Rhodes-Livingstone Institute y est fondé en 1937, avec pour mission d’étudier les changements affectant les sociétés d’Afrique...
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