Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

SUPPORTS / SURFACES

Réduire l’art à ses éléments essentiels

C’est dans cette perspective qu’il faut comprendre la formule Supports/Surfaces, et la séduction qu'elle a exercée sur les artistes qui l'ont adoptée. Le support (toile, apprêtée ou non, châssis) et la surface sont un peu les éléments premiers du tableau, dans la tradition de la peinture ; ce qui resterait, en somme, si l'on pouvait, par hypothèse, décanter un art en laboratoire pour en extraire les constituants spécifiques. Revendiquer support et surface comme programme, c’était démystifier le rôle de l'artiste, lui retirer les privilèges mystérieux de l’inspiration pour le ramener dans la sphère du travail – une valeur sanctifiée dans une vision marxiste du monde, alors largement dominante chez les artistes et les intellectuels français (mais qui était aussi à la source des textes de Greenberg).

Les peintres affiliés à Supports/Surfaces respectèrent assez strictement le programme de réduction des moyens de la peinture à ses constituants essentiels, s’appropriant qui la déstructuration du châssis, qui l’exposition de la toile pliée ou tendue, qui l'imprégnation méthodique du tissu, comme autant de signatures... La mise en avant des vertus propres aux gestes élémentaires excéda souvent cependant le territoire de la peinture : les bois méthodiquement équarris par Toni Grand (1935-2005), les objets façonnés par Noël Dolla (né en 1945), les cordes nouées par Claude Viallat traduisaient une fascination pour les techniques et les outils primitifs qui avaient plus à voir avec les recherches du préhistorien André Leroi-Gourhan qu'avec celles de Greenberg.

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : professeur à l'École nationale supérieure des beaux-arts de Paris

Classification

Pour citer cet article

Didier SEMIN. SUPPORTS / SURFACES [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ANTI-ART

    • Écrit par Alain JOUFFROY
    • 3 063 mots
    • 1 média
    ...États-Unis et en Italie (arte povera), alors que ce même mot fait symptomatiquement défaut en France (Nouveau Réalisme, Objecteurs, Figuration narrative, Support-surface, etc.). Ceux qui ont été le plus loin dans la résiliation de l'art : Daniel Pommereulle, Erik Dietmann, Tetsumi Kudo et Daniel...
  • DEVADE MARC (1943-1983)

    • Écrit par Ramón TÍO BELLIDO
    • 938 mots

    Le peintre Marc Devade est mort alors qu'il allait avoir quarante ans, laissant une œuvre déjà riche et complexe. Marc Devade était peintre, mais aussi écrivain. Membre du comité de rédaction de la revue Tel Quel, cofondateur et rédacteur de Peinture, cahiers théoriques, il était l'un...

  • GRAND TONI (1935-2005)

    • Écrit par Didier SEMIN
    • 792 mots

    Visage taillé à la serpe, gestes décidés, parole économe, mais chaleureuse : pour tous les visiteurs du mas du Mouton, à Mouriès, où était son atelier, Toni Grand incarnait la figure du sculpteur. On avait beau se répéter que la morphopsychologie est une farce, on ne pouvait se défaire de l’impression...

  • PAGÈS BERNARD (1940- )

    • Écrit par Servane ZANOTTI
    • 509 mots

    Venu à Paris étudier la peinture, Bernard Pagès découvre en 1960 l'atelier Brancusi. Cette rencontre essentielle se concrétise quelques années plus tard lorsqu'il choisit de se consacrer uniquement à la sculpture, sensible au « plaisir du travail physique et [à] la notion du temps » qu'elle lui apporte....

Voir aussi