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ROME ET EMPIRE ROMAIN Les origines

Le départ dans l'histoire d'une ville ou bien d'un peuple destiné à un haut avenir est, le plus souvent, entouré d'un halo qui le dérobe à un examen et à une vision précise. On comprend aisément pourquoi. L'historien est mal armé pour l'étude d'une période, très reculée dans le temps, qui n'est connue que par des sources très postérieures. De plus, une tendance naturelle porte l'imagination du peuple et des écrivains à enjoliver et donc à déformer la naissance de leur patrie. Rome ne fait pas exception à cette règle générale, et la question de ses origines continue à poser des problèmes qu'il n'est pas facile de résoudre.

-600 à -200. Philosophes et conquérants - crédits : Encyclopædia Universalis France

-600 à -200. Philosophes et conquérants

Où en est arrivée la recherche à l'heure actuelle et quelle doit être notre attitude à l'égard de questions qui se posent depuis des siècles et auxquelles des réponses diverses et parfois opposées ont été données ? Un point est acquis : Rome ne s'est pas développée en vase clos, et on ne comprend sa naissance et ses premiers temps qu'en la replaçant dans la vie de tout le centre de la péninsule italienne. Le tableau d'une ville progressant, sans solution de continuité et par une sorte de mouvement purement individuel, depuis d'humbles débuts jusqu'à la maîtrise de l'Italie, puis de l'ensemble du monde méditerranéen est un tableau tout à fait artificiel, ne correspondant absolument pas à la complexité des faits. Rome, dès son apparition, et pendant une période fort longue, a fait partie intégrante de la communauté des peuples latins dont elle a partagé le destin. Comme l'ensemble du Latium, elle a entretenu des rapports étroits avec les deux civilisations de haut niveau qui en quelque sorte l'encadraient au sud et au nord : la civilisation grecque de Grande-Grèce et de Sicile apparue, dès le milieu du viiie siècle, sur les côtes italiennes, et la civilisation étrusque qui, peu après, prend un essor rapide dans les régions côtières, puis internes, de Toscane. Son histoire n'a pas été celle d'une croissance continue ; aux progrès ont succédé des reculs et des replis, et la tradition doit donc être constamment contrôlée et rectifiée sur plusieurs points.

Faut-il pour autant rejeter en bloc la tradition légendaire concernant Évandre, Énée et Romulus et ne prêter aucune foi aux beaux récits de l'annalistique romaine qui ont nourri, jusqu'à l'époque moderne, l'esprit et l'imagination ? Ce serait une lourde erreur. Les progrès de l'archéologie et de l'histoire ont, depuis plusieurs décennies, apporté à cette tradition nombre de confirmations irréfutables. Le village romuléen du Palatin est apparu, sous la pioche des fouilleurs, avec la date que lui attribuait l'historiographie ancienne. La Rome des Tarquins est ressortie de terre avec la richesse et la puissance que lui prête Tite-Live. Aussi la position de la science à l'égard des légendes concernant les origines de Rome est bien claire. Il faut les rejeter quand apparaissent avec clarté les éléments forgés de toutes pièces, les déformations, les contaminations qui sont l'œuvre de l'orgueil national ou de la fierté gentilice. Mais, quand les légendes résistent au travail serré de la critique, il convient au contraire de leur attacher la plus grande importance et de discerner le fonds de réalité qu'elles recouvrent.

Une perspective nouvelle s'est aujourd'hui dessinée grâce aux travaux de G. Dumézil, spécialiste de l'histoire des religions. Dans l'histoire primitive de Rome apparaissent, à côté des faits réels et des légendes tardives, de très anciens mythes indo-européens qui se sont conservés dans d'autres religions, mais qui ont pris, dans l'esprit des Romains, une forme historique et se présentent comme des épisodes vécus, à valeur nationale et [...]

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Écrit par

  • : directeur d'études à l'École pratique des hautes études

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Pour citer cet article

Raymond BLOCH. ROME ET EMPIRE ROMAIN - Les origines [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

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-600 à -200. Philosophes et conquérants - crédits : Encyclopædia Universalis France

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Autres références

  • CIVILISATION ROMAINE (notions de base)

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    • 4 292 mots
    • 18 médias

    Le destin de Rome est celui d’une obscure bourgade de la péninsule italienne devenue, en l’espace de quatre siècles, une mégapole, capitale d’un immense empire s’étendant de l’Écosse à l’Arabie, des confins sahariens aux rives du Danube. Ce processus historique s’accompagna de la disparition de la ...