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FORD RICHARD (1944- )

Richard Ford - crédits : Ulf Andersen/ Getty Images

Richard Ford

Richard Ford est né, en 1944, et a grandi à Jackson, dans le Mississippi – un État où l'écriture est, dit-il, « comme en suspension dans l'air : les voix de Faulkner, de Tennessee Williams, d'Eudora Welty, de Walker Percy y sont autant d'incitations à devenir écrivain ». Seul pourtant son premier roman, paru lorsqu'il avait déjà trente-deux ans, A Piece of my Heart (1976, Une mort secrète) se passe dans ce Sud mythique. Un ouvrier travaillant sur un chantier de construction dans le lointain Montana et un étudiant faisant son droit à Chicago – deux Sudistes en exil – reviennent au pays natal, où, disait Thomas Wolfe (autre Sudiste déraciné), « on ne revient jamais ». Leurs chemins se croisent au « cœur des ténèbres », dans une petite île cernée par la boue du grand fleuve et habitée de figures grotesques : là l'ouvrier se fait tuer de sang-froid par un jeune garçon, une sorte de Huckleberry Finn psychotique, chargé de garder la propriété privée où il est entré par inadvertance. C'est le vieux Sud des contes gothiques, mais comme revisité par d'absurdes « hommes creux », sans racines, aussi absents d'eux-mêmes que le Meursault (L'Étranger) de Camus.

De souche à la fois écossaise et irlandaise, le père de Richard Ford était originaire de l'Illinois ; sa mère, de l'ouest de l'Arkansas. Lorsqu'ils eurent, sur le tard, cet enfant unique et « trop couvé », ils étaient mariés depuis plus de quinze ans et avaient vécu tout ce temps plus ou moins « sur la route », au hasard des tournées du père, voyageur de commerce pour une marque d'amidon. À la naissance de Richard, la famille loua une maison à Jackson, mais, l'été, mère et fils continuèrent longtemps à accompagner le père dans ses voyages, jusqu'à sa mort, d'une crise cardiaque, quand Richard avait seize ans. Peut-être est-ce ce passé familial qui explique que Richard Ford ait si souvent déménagé : des études dans le Michigan, six ans à Princeton, une maison dans le quartier français de La Nouvelle-Orléans, un bungalow dans le Montana. La vieille errance des Américains toujours un peu sans feu ni lieu, voilà son vrai thème.

The Ultimate Good Luck (1981, Au bout du rouleau) est un roman noir, un thriller existentialiste, qui se passe au Mexique, où Richard Ford a vécu deux ans et qui, dit-il, « fascine l'Amérique parce qu'il reste le reflet d'un passé violent qu'elle ne parvient pas à oublier ». C'est l'histoire de Quinn, un ancien du Vietnam venu essayer de faire sortir de prison le frère de la femme qu'il aime, incarcéré pour trafic de drogue. Sous le soleil brûlant, le Mexique est comme une autre planète, et Quinn, solitaire sans attaches, sans projet ni mémoire, s'y retrouve, lui aussi, comme un « étranger » sur terre.

Wildlife (1990, Une saison ardente) est un roman de l'Ouest. Une voix laconique et comme détimbrée raconte : « À l'automne de 1960, alors que j'avais seize ans et que mon père était momentanément sans emploi, ma mère rencontra un homme du nom de Warren Miller et tomba amoureuse de lui. » On est dans le Montana. Les incendies de forêt rougeoient dans le ciel d'automne. Les parents sont venus là dans l'espoir de profiter du boom pétrolier, mais en vain. Le père cherche refuge dans l'alcool. Il a trouvé un emploi temporaire de « soldat du feu ». Pendant trois jours où il est absent, la mère, accompagnée de son fils, rend visite à Warren Miller, riche de ses silos à grains et seul dans sa grande maison. Après avoir bu et dansé toute la nuit, elle pense qu'elle va refaire sa vie avec lui, mais il est déjà parti, avec une autre femme. À son retour, fou de rage, le père met le feu à la maison. L'Ouest n'est plus le lieu des grandes espérances sous le vaste ciel, mais une sorte de terrain vague : on croit encore y mener son chariot[...]

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Écrit par

  • : professeur de littérature américaine à l'université de Paris IV-Sorbonne et à l'École normale supérieure

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Richard Ford - crédits : Ulf Andersen/ Getty Images

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