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PRÉCOLOMBIENS Amérique du Nord et Arctique

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La prise de conscience du passé préhistorique est survenue très différemment, et de façon presque opposée, en Amérique et en Europe. Sur le Vieux Continent, le temps « historique », dont l'origine fut longtemps confondue avec la Genèse biblique, semblait installé presque partout depuis le Déluge. Mais au xixe siècle, la reconnaissance d'une industrie lithique primitive, jusqu'alors insoupçonnée, associée à une faune disparue, témoignant d'un environnement glaciaire dont l'ancienneté et l'étrangeté défiaient l'imagination, fit éclater la représentation traditionnelle du passé. S'imposa alors soudainement l'existence d'un temps « préhistorique » et « antédiluvien », à l'origine insaisissable et de plus en plus lointaine, et au mode de vie primitif et sauvage, opposé à celui des civilisations historiques.

En Amérique du Nord (considérons ici l'Amérique du Nord anglo-saxonne et le Québec), le temps « historique » commença seulement lorsque les Européens rendirent compte par écrit de leurs rencontres avec des populations autochtones majoritairement dépourvues d'écriture, soit, selon les régions, entre le début du xvie siècle et la première moitié du xxe siècle. Ces Amérindiens, ou Indiens d'Amérique (le Nouveau Continent ayant été pris pour l'Inde), parurent d'abord non seulement privés de temps « historique », mais aussi dépourvus d'un passé lointain qui n'était pas non plus envisagé pour les descendants d'Adam et d'Ève. Par la suite, dans une vision détachée de la Bible, ils furent imaginés comme les survivants d'un stade primitif de l'humanité, comme une illustration de la vie préhistorique qui se révélait en Europe, ou comme les descendants d'Européens, d'Hébreux ou d'Africains égarés au bout du monde – là où, croyait-on, ils n'avaient pu arriver que récemment. En l'absence de références chronologiques dans les cultures matérielles amérindiennes et de technique de datation absolue, il était difficile de percevoir une évolution diachronique de ces cultures et de distinguer les plus anciennes. Elles furent donc naturellement étudiées dans une perspective ethnographique plutôt qu'archéologique. De plus, cette absence d'« histoire » et le fait qu'en Amérique du Nord la plupart des Amérindiens ne mettaient pas en valeur la terre, mais vivaient surtout de chasse, de pêche et de cueillette, conforta les colons dans leur bonne conscience d'avoir plus de droits sur le territoire que les autochtones. Ainsi s'installa dans l'esprit des Nord-Américains une forte résistance, en partie inconsciente, à reconnaître la grande ancienneté des Amérindiens.

Le développement des connaissances et des concepts

L'élaboration de l'archéologie préhistorique en Amérique du Nord

Dans leur ouvrage classique sur l'histoire de l'archéologie américaine, Gordon R. Willey et Jeremy A. Sabloff distinguent cinq grandes périodes marquant l'évolution de cette discipline. Nous les réduirons ici à quatre.

La période spéculative

Elle commence avec l'arrivée des Européens et s'achève en 1840. Les objets comme les observations d'intérêt archéologique sont recueillis au hasard des explorations et constituent des curiosités de collectionneurs, servant de support à des explications alimentées plutôt par l'imagination que par des raisonnements scientifiques. C'est alors que sont créés les principaux musées et les grandes institutions au sein desquels se constitueront les collections et s'amorceront les réflexions sur le passé de l'Amérique. Un précurseur se distingue malgré tout dès la fin du xviiie siècle, en la personne de Thomas Jefferson (1743-1826), qui allait être le troisième président des États-Unis.[...]

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Écrit par

  • : docteur d'État de l'université de Paris-I-Sorbonne, archéologue, professeur honoraire au département des sciences de la Terre et de l'atmosphère, université du Québec à Montréal

Classification

Pour citer cet article

Patrick PLUMET. PRÉCOLOMBIENS - Amérique du Nord et Arctique [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 25/03/2009

Médias

Pointes lancéolées à cannelures - crédits : Encyclopædia Universalis France

Pointes lancéolées à cannelures

Pointes lancéolées sans pédoncule - crédits : Encyclopædia Universalis France

Pointes lancéolées sans pédoncule

Couteaux ou pointes bifaces emmanchés - crédits : Encyclopædia Universalis France

Couteaux ou pointes bifaces emmanchés

Autres références

  • AGUADA CULTURE

    • Écrit par
    • 373 mots

    Développée dans le nord-ouest de l'Argentine, dans la région qui s'étend depuis la vallée Calchaqui jusqu'au nord de la province de San Juan, la culture aguada se situe, chronologiquement, dans la période céramique moyenne, entre 650 et 850.

    L'économie aguada était basée sur...

  • AGUADA FÉNIX, site archéologique

    • Écrit par
    • 2 830 mots
    • 3 médias

    Le site prémaya d’Aguada Fénix (Tabasco, Mexique) a été révélé au public en 2017. Son identification repose sur l’analyse, par l’archéologue Takeshi Inomata (université de l’Arizona), de relevés lidar de l’Instituto Nacional de Estadística y Geografía (INEGI), originellement destinés à l’étude de...

  • AMÉRINDIENS - Hauts plateaux andins

    • Écrit par
    • 4 689 mots
    Avant l'arrivée des Espagnols, les vallées d'altitude de la Cordillère des Andes étaient habitées par des groupes ethniques qui reconnaissaient des lignées ancestrales spécifiques, possédaient leurs propres sanctuaires et lieux sacrés désignés sous le nom générique huacas, portaient...
  • AMÉRIQUE (Structure et milieu) - Géographie

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    Examinons maintenant les faits archéologiques et les différentes hypothèses qu'ils étayent avec plus ou moins de bonheur. Actuellement, trois thèses s'affrontent. Quelques chercheurs suggèrent une arrivée très ancienne, antérieure à la première crue froide du Wisconsin vers — 70 000 ou durant cette...
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