PORCELAINE

La qualité de la porcelaine chinoise, l'harmonie et la diversité de ses formes et de ses décors, son indiscutable antériorité, puisqu'elle était déjà mise au point techniquement sous la dynastie Sui (589-618), ont assuré son prestige dans le monde entier. La fascination qu'elle a exercée s'explique aussi par le mystère, qui parut longtemps miraculeux aux yeux des étrangers, d'une matière issue de la terre et néanmoins translucide, brillante, sonore. Les premières pièces qui parviennent en Occident, dans quelques cours princières des xiv e et xv e siècles, y sont considérées comme des trésors et serties de montures d'orfèvrerie. À partir du xvi e siècle, les faïenceries européennes (Delft, Nevers, Rouen, etc.) s'emploient à imiter la porcelaine, des collections se constituent, des essais sont partout tentés pour en élucider le secret de fabrication, mais ils n'aboutiront qu'au xviii e siècle. Du xvii e au xix e siècle, enfin, les Compagnies des Indes feront affluer une porcelaine « de commande » sur les marchés de l'Europe entière et jusqu'en Amérique du Nord et du Sud.

Dès le ix e siècle, les navigateurs arabes introduisent la céramique chinoise au Moyen-Orient, où elle inspirera bientôt les faïences de l'Iran, de la Syrie, de la Turquie. La diffusion s'en fera de plus en plus massive, et l'on a retrouvé des porcelaines chinoises non seulement dans toute l'Asie orientale et dans celle du Sud-Est, mais aussi en Inde, en Égypte, et même sur les côtes orientales de l'Afrique. Partout elles sont précieusement conservées, comme en témoignent les anciennes collections toujours visibles à Istanbul et à Téhéran.

Déjà manifeste sous les Tang et les Song (618-1279), cette exportation chinoise prend sa signification mondiale à partir des Yuan (1280-1368), période pendant laquelle la porcelaine se signale par des innovations majeures qui vont conditionner tous ses développements ultérieurs.

— Daisy LION-GOLDSCHMIDT

L'histoire de la porcelaine japonaise, qui ne remonte qu'au début du xvii e siècle, est encore mal connue. Vers 1650, cette production est remarquée par les agents de la Compagnie des Indes néerlandaises, et leurs commandes contribuent à son développement. Les « vieux Japon », ou « Imari » (du nom du port d'où ils étaient acheminés vers Nagasaki), sont appréciés en Europe dans les années 1675-1725, et les décors de Kakiemon inspirent les premières porcelaines de Meissen et les pâtes tendres françaises et anglaises.

— Madeleine PAUL-DAVID

De ses origines au xviii e siècle, l'histoire de la céramique européenne tout entière pourrait être considérée comme la longue recherche entreprise par l'Occident pour fabriquer de la porcelaine chinoise. L'anglais qui désignait par le terme china toute catégorie de porcelaine traduit bien cette fascination. Mais, plus que la composition chimique de la porcelaine extrême-orientale, c'est l'apparence extérieure de celle-ci que l'on a tenté de reproduire : d'où la diversité chimique des produits céramiques dits « porcelaine » fabriqués en Occident. De la porcelaine chinoise, ils ne retiennent souvent qu'une caractéristique : la translucidité. Dans bien des cas, voulant faire de la porcelaine chinoise, on n'est parvenu qu'à produire des objets qui sont en réalité des verres opacifiés à l'étain. Il ne s'agit pas de porcelaine.

De façon plus satisfaisante on est arrivé au stade de la « porcelaine tendre », dont la surface se raye à l'acier. Sa composition chimique, d'ailleurs extrêmement variable, est fondamentalement différente de celle de la porcelaine chinoise, puisqu'elle ne comporte pas de kaolin. La porcelaine tendre se divise en deux catégories essentielles. L'une est dite française (ou à[...]

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Écrit par

  • Marcelle BRUNET : bibliothécaire du musée de la Céramique, Sèvres
  • Antoinette FAŸ-HALLÉ : conservateur au musée national de la Céramique, Sèvres
  • Daisy LION-GOLDSCHMIDT : chargée de mission au Musée national des arts asiatiques-Guimet
  • Madeleine PAUL-DAVID : ancien maître de recherche au CNRS, professeure honoraire à l'École du Louvre, chargée de mission au Musée national des arts asiatiques-Guimet
  • Tamara PRÉAUD : conservateur en chef du patrimoine, chargée des archives de la Manufacture nationale de Sèvres

Classification

Pour citer cet article

Marcelle BRUNET, Antoinette FAŸ-HALLÉ, Daisy LION-GOLDSCHMIDT, Madeleine PAUL-DAVID, Tamara PRÉAUD, « PORCELAINE », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le . URL :

Médias

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