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PLURILINGUISME

Les notions de «  bilinguisme » et de « plurilinguisme » restent très générales et désignent sans distinction les usages variables de deux ou de plusieurs langues par un individu, par un groupe ou par un ensemble de populations. Leur emploi ne permet pas, par exemple, de différencier les deux cas extrêmes qui peuvent se présenter sur un même territoire : l'un où deux populations, unilingue chacune, se côtoieraient (des médiateurs bilingues sont alors requis), l'autre où chaque membre des deux populations serait bilingue, à des degrés divers. De plus, l'emploi de ces termes peut se révéler carrément inadéquat dans les situations de formation de nouvelles langues, pidgins ou créoles, où la complexité des processus de contact oblitère, tout au moins sur le plan descriptif, la définition de systèmes distincts. D'autres termes tendent ainsi à s'imposer : celui de situation linguistique complexe, général lui aussi, mais sans les présupposés impliqués par bi- ou plurilinguisme, ceux aussi de bilingualité et de diglossie, plus spécifiques au contraire. La notion de bilingualité vise la manière dont une personne particulière est à même de tirer parti des langues auxquelles elle a accès, tant pour son expression, ses modes de penser que dans ses relations sociales. Par opposition, la notion de diglossie met l'accent sur le fait que, dans une société donnée, deux variétés d'une même langue ou deux langues distinctes remplissent des fonctions sociales et institutionnelles différenciées, généralement complémentaires. Malgré cette complémentarité de fait, la différence des fonctions remplies par chaque langue – l'une connaissant, par exemple, une valorisation socio-économique plus importante, l'autre une expansion populaire plus forte – aboutit, dans la plupart des cas, à affecter les deux systèmes en présence de valeurs positives ou négatives. Les langues deviennent l'objet d'enjeux politiques, économiques, culturels, voire religieux, en même temps qu'elles apparaissent comme le symbole de ces enjeux. De la même façon, on parlera de triglossie ou de quadriglossie.

L'évolution de la terminologie est à mettre en rapport avec, d'une part, des transformations profondes des théories concernant les rapports entre langage et société et, d'autre part, l'évolution de la recherche dans ce domaine. Avec le développement, depuis les années 1960, de la sociolinguistique (sociologie du langage et linguistique sociale), les études des processus de contact du seul point de vue du système des langues ont trouvé des compléments nécessaires et ont souvent permis un dépassement dans la prise en compte des fonctions sociales et psychologiques du langage : les langues servent la communication mais également la signification et la connaissance, les discours auxquels elles fournissent leur matériau font fonction de lien social. Parler, c'est aussi signifier une identité, participer à des mouvements sociaux (que ce soit ou non de manière délibérée), aux processus qui transforment les langues ainsi que les rapports entre elles et ceux qui les parlent.

Un nombre important de disciplines peuvent ainsi être concernées par l'étude des plurilinguismes : principalement la linguistique, la sociologie et la psychologie, mais aussi l'histoire, le droit et l'économie.

Les processus intersystémiques

La question que se pose le linguiste est la suivante : que se passe-t-il au niveau de la langue en tant que système quand deux ou plusieurs langues sont employées par un même individu ou par un groupe ? D'où une analyse et l'emploi de termes propres à la linguistique : les études linguistiques des plurilinguismes ont donc un caractère à la fois technique et abstrait.

Langues en contact

L'introduction, vers 1950, de la notion de contact dans le domaine de[...]

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Pour citer cet article

Penelope GARDNER-CHLOROS et Andrée TABOURET-KELLER. PLURILINGUISME [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • BILINGUISME INDIVIDUEL

    • Écrit par François GROSJEAN
    • 4 284 mots

    De nombreux facteurs favorisent le bilinguisme tels que le contact de langues à l'intérieur d'un pays ou d'une région, la nécessité d'utiliser une langue de communication (lingua franca) en plus d'une langue première, la présence d'une langue parlée différente de la langue écrite...

  • BELGIQUE - Géographie

    • Écrit par Christian VANDERMOTTEN
    • 6 705 mots
    • 6 médias
    Environ 60 % des Belges sont néerlandophones ; ceux-ci sont localisés dans le nord du pays. Les 40 % de francophones se trouvent dans le sud du pays et à Bruxelles. La très grande majorité – de l'ordre des neuf dixièmes – de la population bruxelloise utilise le français, du moins dans ses contacts administratifs,...
  • CANADA - Espace et société

    • Écrit par Anne GILBERT
    • 12 678 mots
    • 5 médias
    On compte plus de six cents Premières Nations au Canada et plus de soixante-dix langues autochtones. Il est commun de les regrouper selon les territoires qu’ils occupaient au moment de l’arrivée des premiers Européens : peuples autochtones des forêts de l’Est, des plaines, du plateau, de la côte nord-ouest,...
  • CERVEAU ET BILINGUISME

    • Écrit par Jean-Marie ANNONI
    • 804 mots
    • 1 média

    On sait, depuis les découvertes de Paul Broca en 1861 et de Carl Wernicke en 1874, et des recherches successives, que le système langagier chez le droitier monolingue repose essentiellement sur un réseau fronto-temporo-pariétal gauche. Ce constat est vrai pour plus de 90 p. 100 des sujets droitiers...

  • FRANCE (Arts et culture) - La langue française

    • Écrit par Gérald ANTOINE, Jean-Claude CHEVALIER, Loïc DEPECKER, Françoise HELGORSKY
    • 15 699 mots
    • 2 médias
    ...de l'Institut national d'études démographiques (I.N.E.D.) a montré que les habitants du territoire national sont soumis, peu ou prou, à l'influence de 470 langues non françaises, langues régionales ou langues étrangères. Des cours spéciaux sont prévus pour les nouveaux arrivants et des cours de rattrapage...
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Voir aussi