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PARNASSE, mouvement littéraire

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L'école parnassienne

Ce solitaire, ce lyrique torturé a fondé une école qui se veut sereine : c'est un mécanisme de la défense du Moi. C'est aussi la réaction d'un temps. Flaubert estime Leconte de Lisle tout en le trouvant trop élégiaque. Comme Baudelaire, Leconte de Lisle professe que « la moralité d'une œuvre d'art, c'est sa beauté », mais, égratigné par Baudelaire qui raille l'« école païenne », il range ce dernier parmi les « montreurs ». Nature impérieuse au verbe incisif, il ne peut régner que sur ses cadets de vingt ans, et c'est, en effet, autour de 1840 que sont nés les futurs parnassiens : Dierx, Villiers de l'Isle-Adam en 1938, Sully Prudhomme, Des Essarts en 1839, Mérat, Cazalis en 1840, Mendès, Valade en 1841, Coppée, Heredia en 1842, de Ricard en 1843. Il les reçoit le samedi soir dans son modeste appartement (il s'est marié en 1857). Autour de lui, on rivalise – Cazalis dit de Dierx, dévot de Leconte de Lisle : « C'est son chien, son Vacquerie. »

Mendès et Ricard obtiennent de l'éditeur Lemerre la publication du Parnasse contemporain, « recueil de vers nouveaux » extrêmement composite. Leconte de Lisle, qui n'avait pas d'argent, ne l'a pas dirigé, mais il y participe ; et, dans le premier recueil (1866), son nom voisine avec ceux de Baudelaire, Théodore de Banville et Gautier. Au second Parnasse (1869), il donnera « Qaïn » ; au troisième (1876), un fragment de « L'Épopée du moine » : ce recueil avait été dirigé par Banville, Anatole France et Coppée.

Les parnassiens proprement dits, qui portent la marque de Leconte de Lisle et le tiennent pour leur maître, peuvent être divisés en quatre familles.

Les néo-romantiques

Bien que certains traits du romantisme soient épars dans tout le Parnasse, ils sont particulièrement marqués chez Villiers de l'Isle-Adam (1838-1889), poète du rêve surtout connu comme romancier ; chez Catulle Mendès (1841-1909), brillant polygraphe, poète, romancier, dramaturge et critique, au besoin plus « barbare » que le maître (Le Soleil de minuit). Plus discret, plus élevé, poète des « lèvres closes », Léon Dierx (1838-1912), que des pairs élurent « prince des poètes » à la mort de Stéphane Mallarmé, est un excellent ouvrier du vers.

Les intimistes

Les intimistes riment de la prose et se complaisent aux tableaux exigus et soignés. Eux aussi procèdent d'un certain romantisme, par Sainte-Beuve. François Coppée (1842-1908) est un petit bourgeois parisien, malicieux et charitable, dont on raillait, chez Leconte de Lisle même, la muse sans ailes et moralisante. Albert Mérat (1840-1909) ne vise pas plus haut : il rase les collines, la fleur des pommiers, la petite rivière. Léon Valade (1841-1884) a brossé des tableaux de la vie parisienne. André  Lemoyne (1822-1907) a dit le destin de la vie du citadin. Eugène Manuel (1823-1901) ne craint pas de « s'engager », et Hugo vote pour lui à l'Académie en 1881 ; il chante le foyer, la patrie, les ouvriers.

Les historiens

L'histoire est en grand crédit au Parnasse : Des Essarts (1839-1909) rime les Poèmes de la révolution ; L. Xavier de Ricard (1843-1911), aristocrate d'extrême-gauche, évoque la mort de Roland. Anatole France (1844-1924) a eu son heure parnassienne, quand il donnait en 1876 les Noces corinthiennes. Le vicomte de Guerne (1853-1912) célèbre les Siècles morts. Frédéric Plessis peint Septime Sévère dans sa Lampe d'argile. À la même veine appartiennent J. C. Leconte avec le Bouclier d'Arès, la baronne de Baye avec Thaïs ; mais aucun ne rivalise avec l'éclat des tableaux savants enchâssés dans le cadre étroit du sonnet, que Heredia donna dans Les Trophées.

José Maria de Heredia (1842-1905), né d'un père espagnol et d'une mère normande, a appris de Leconte[...]

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Écrit par

  • : correspondant de l'Institut, professeur honoraire de l'université de Bordeaux

Classification

Pour citer cet article

Pierre FLOTTES. PARNASSE, mouvement littéraire [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Autres références

  • BANVILLE THÉODORE DE (1823-1891)

    • Écrit par
    • 664 mots

    Venu à Paris dans son enfance, Théodore de Banville se passionne très jeune pour le spectacle et pour la poésie. Avant vingt ans, il publie son premier recueil de vers ; il y manifeste déjà un talent sûr qui relève d'une conception de la poésie dont il ne se départira jamais.

    S'opposant...

  • BOUILHET LOUIS (1822-1869)

    • Écrit par
    • 237 mots

    Plus que de l'écrivain, c'est de l'ami de Flaubert dont on se souvient aujourd'hui. Le destin de Bouilhet, parallèle à bien des égards à celui de Flaubert, en offre comme une reproduction dans un mode mineur, et sous le signe de l'échec. Condisciple de Flaubert, célibataire comme lui, confiné à Rouen,...

  • BRÉSIL - La littérature

    • Écrit par , , et
    • 12 169 mots
    Le Parnasse est représenté principalement par quatre poètes. Alberto de Oliveira (1857-1937), encore romantique dans Cançõesromânticas (Chansons romantiques, 1878), est le plus attaché à la discipline formelle des parnassiens. Ses œuvres sont réunies en quatre séries de Poesiaspubliées entre...
  • COPPÉE FRANÇOIS (1842-1908)

    • Écrit par
    • 216 mots

    Poète, connu pour sa manière simple et intimiste de dépeindre la vie des humbles. Il débuta comme petit employé au ministère de la Guerre et connut le succès en 1869 avec une pièce de théâtre, Le Passant. Son recueil de poèmes Les Humbles (1872) est le mieux connu et le plus caractéristique....

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